Expérimentation
Apprendre à se parler pour sortir du mal-être
Du 1er au 4 mars, la MSA Poitou, la chambre 17 (Agridiff) et le Resa animaient une action collective sur la gestion de conflit. L’enjeu ? Comprendre les ressorts de la communication et des émotions pour déminer les situations de crise dans les fermes.
Du 1er au 4 mars, la MSA Poitou, la chambre 17 (Agridiff) et le Resa animaient une action collective sur la gestion de conflit. L’enjeu ? Comprendre les ressorts de la communication et des émotions pour déminer les situations de crise dans les fermes.
Ils sont sept agricultrices et agriculteurs à s’être retrouvés le 1er mars à Missé. Maintes fois reportée pour cause de Covid-19, l’action « Se parler sans s’embourber » initiée par la MSA Poitou a enfin pu se dérouler.
« Nous sommes confrontés à une hausse des demandes de médiation dans les exploitations, en amont des procédures judiciaires, contextualise Emmanuelle Bouet, assistante sociale à la MSA. De nombreuses situations de dépression, d’accidents du travail et d’arrêts trouvent leur source dans un manque de communication entre les associés, salariés, conjoints… Nous nous sommes appuyés sur nos acquis en gestion des conflits pour monter cette action qui vise à mieux comprendre comment parler de soi, écouter l’autre et dire stop aux situations qui s’enveniment et génèrent du mal-être ».
Partir de son émotion
Les trois jours sont denses. Eleveur de bovins allaitants à Mauléon, Anthony Vaillant témoigne : « On s’est livré en confiance dès le premier jour. Participer à ce type d’expérience permet d’avoir le ressenti de personnes qui vivent les mêmes choses que nous ».
Dans les discussions ou lors de jeux de rôles, les histoires se ressemblent : conflit de valeur avec le l’ancien gérant de la ferme vivant toujours sur site ; peine à maîtriser sa colère face à un salarié qui casse du matériel ; évitement d’un associé avec qui on est en froid…
« La fuite, l’explosion et même le compromis ne sont pas des solutions tenables dans le temps, évoque Bernard Pérès (Agridiff). Il s’agit de dire stop et de parler de ce qu’on ressent (je n’en peux plus, je suis démuni ou triste de ce qui se passe) plutôt que de se montrer fataliste ou d’accuser les autres. Le « tu » tues, quand on l’associe à « tu n’es qu’un fainéant, tu aurais dû faire comme ça », etc.».
Pour les animateurs de la session, la crise et le conflit restent toutefois le moment de rupture qui donne l’opportunité d’ouvrir une nouvelle voie : « on sort du statu-quo, ça oblige à trouver des solutions ».
Des clés pour avancer
Ces conseils, ces solutions, c’est justement ce que sont venus chercher les participants. Le dernier jour était consacré à évoquer les personnes tierces – ou ressources – à activer pour se faire aider, voire soigner quand le besoin est là. « On ne se change pas du soir au matin, livre Anthony Vaillant, plutôt prompt à s’emporter face aux soucis. Mais je retiens de ces trois jours quelques acquis qui font déjà la différence dans ma sphère familiale. Quand on parle, on croit être compris, mais ce qu’on donne ou reçoit dans une conversation, ce n’est pas si simple que ça ! ».
La fuite, l’explosion et même le compromis ne sont pas des solutions tenables dans le temps, expose l'animateur de la session, Bernard Pérès.
Pour Anthony, ce temps d’échanges a été plus qu’utile : « j’avais eu une formation sur comment s’exprimer en public, organiser une réunion, parler à ses collègues. On n’y apprend pas à parler de soi. » Et cette communication est désormais essentielle pour l’éleveur, qui tient à garder contact avec les autres participants à cette réunion. Du côté des organisateurs, on se montre satisfait de cette première édition : « elle va dans le sens de la réduction du mal-être voulue par le conseil d’administration MSA. On espère pouvoir en proposer d’autres similaires ».