Découvrir le berceau thouarsais de la résistance
Le village de Tourtenay a accueilli les premiers parachutages de matériel, en 1941, pour organiser la Résistance. Par des visites dynamiques, le centre Résistance et Liberté perpétue sa mémoire.
Le village de Tourtenay a accueilli les premiers parachutages de matériel, en 1941, pour organiser la Résistance. Par des visites dynamiques, le centre Résistance et Liberté perpétue sa mémoire.
En cette chaude après-midi d’août, nous sommes une poignée de curieux à nous retrouver devant le portail des écuries du château de Thouars, où se tient le centre régional Résistance et Liberté (Crrl), un espace muséographique associatif créé en 2001 par d’anciens résistants et de nombreux partenaires institutionnels. Nous avons rendez-vous pour découvrir l’histoire insolite du village troglodyte de Tourtenay, où naquit une des premières poches de résistance de la zone occupée lors de la seconde guerre mondiale.
La visite démarre au Crrl lui-même, où Marion Stevens, notre guide, nous fait découvrir l’exposition permanente retraçant l’ambiance régnant à Thouars sous le joug nazi. Premier tableau : l’annonce d’un couvre-feu strict dans la ville, dont les mesures doivent être respectées sous peine d’être… fusillé ! Tout un pan du mur de la salle, très pédagogique, consiste en une fresque historique émaillée de documents d’archives et d’objets clés, ancrant le visiteur dans le thouarsais : un laisser-passer, une carte postale censurée (pas plus de cinq mots !), la réplique des armes qui étaient envoyées aux résistants, mais aussi un des vrais parachutes retrouvés à Tourtenay…
Un lieu idéal choisi deux fois
En quelques mots bien choisis, Marion Stevens recrée l’époque : « Il ne s’agit pas d’un cours d’histoire, mais d’ouvrir la réflexion sur trois phases essentielles de la résistance : réagir, s’engager et construire la société d’après », indique-t-elle. Le tout en reconstituant les faits concrets, comment se sont organisés les réseaux – d’abord de contre-propagande puis paramilitaire – sur les lieux où ils se sont formés. Chacun reprend ainsi sa voiture : direction le village de Tourtenay ou, plus précisément, un champ au milieu de nulle part, où une stèle rappelle qu’eurent lieu quatre parachutages de matériel en 1941. « Il y avait essentiellement des émetteurs radio, l’enjeu étant de communiquer les positions allemandes à Londres », retrace la guide.
Pourquoi ce lieu ? Isolé mais pas trop, il se trouve près d’un réseau de rivières (Loire, Thouet, Dive) qui forment des rubans lumineux les soirs de pleine lune, comme autant de repères pour les aviateurs. Marion raconte la confrérie Notre-Dame, réseau résistant de renseignement né ici mais couvrant un territoire de Brest à Biarritz, et dont les agents ont été stoppés par une répression féroce. Elle raconte aussi qu’en 1943, deux ans après le démantèlement local de ce réseau, un autre mouvement de résistance choisit Tourtenay pour cette fois-ci parachuter 3,5 tonnes d’armes qui serviront à libérer le pays.
Les fermiers au cœur du dispositif
La troisième station de notre visite se situe donc dans le village même de Tourtenay, où nous marchons dans les pas de ces hommes et femmes qui, scotchés à la radio, attendaient le message personnalisé leur indiquant un parachutage imminent, et s’organisaient ensuite pour aller récupérer le matériel.
Deux familles de fermiers ont particulièrement été actives dans ces réseaux : les Touret en 1941 puis les Pichot en 1943. La guide nous délivre les anecdotes au fil des pas. « Il faut imaginer sur ce chemin le char à bœuf tractant un container d’armes jusqu’aux caves troglodytes de la ferme. Ou encore ce fermier qui remonte 2 km dans le noir chercher une serpe pour dégager le parachute léger d’un émetteur radio coincé dans un arbre… ». Le pari d’honorer la mémoire de ces résistants de la première heure et de mieux saisir les enjeux de la seconde guerre mondiale, par le prisme du local, est réussi.