Le brouillard anglais s'approche des entreprises françaises
Selon toute vraisemblance, le Brexit se fera sans accord. Le 29 mars, la Grande-Bretagne deviendra un pays tiers, nécessitant des formalités douanières. Les entreprises doivent s'organiser, sans pour autant connaître la réglementation qui sera en vigueur.
La date butoir se rapproche à grands pas. Au vu de la difficulté des négociations avec le Royaume-Uni, l'Union européenne se prépare à vivre un Brexit sans accord, effectif à partir du 29 mars prochain, soit dans 43 jours (*). Un saut dans le vide qui inquiète nombre d'opérateurs, qui doivent se préparer au mieux à ces changements, sans pour autant connaître la future réglementation. « De toute façon, que le Brexit soit dur ou doux, le Royaume-Uni va devenir un pays tiers. La question est de savoir s'il sera plutôt comme la Suisse ou comme les États-Unis », pose Jean-Noël Navarro, le directeur régional des services douaniers, à l'occasion de la matinée d'informations proposée aux chefs d'entreprise à la CCI de Niort le 5 février.
Des taxes pouvant aller jusqu'à 40 %
Les enjeux sont forts pour les entreprises régionales car la Grande-Bretagne est un interlocuteur privilégié de la Nouvelle-Aquitaine. Actuellement, elle représente le cinquième marché à l'export et le neuvième à l'import de la plus grande région de France (**). 58% des produits exportés sont agricoles, dont la moitié sont des boissons (vin et surtout cognac). Avec le retour à l'application des règles de l'organisation mondiale du commerce, dès le 30 mars, les Britanniques pourront appliquer librement une taxe qui peut aller de 0 à 40 %. Autant dire que leur décision pourrait sérieusement ébranler certaines productions. « La Grande Bretagne veut signer un transit communautaire qui lui sera spécifique mais elle ne peut le faire tant qu'elle est encore dans l'Union Européenne », déplore le chef des douanes.
Le flou va ainsi être total aux douanes, alors que 80 % des échanges routiers et navals UE-UK passent par la France. De ce fait, Jean-Noël Navarro recommande d'éviter au maximum l'envoi de produits entre le 20 mars et la mi-avril, pendant ce qui sera à n'en pas douter une forte période de latence. Car si la France s'est dotée d'une « frontière intelligente », dès la sortie du pays de l'UE, elle ne sera effective qu'aux ports de Calais et Dunkerque, ainsi qu'au tunnel sous la Manche.
Des contrats à repenser
Tous les acteurs économiques impliqués de près ou de loin dans des échanges avec les Britanniques vont donc devoir redoubler de vigilance car « juridiquement, fiscalement, douanièrement, les entreprises sont responsables », insiste Jean-Noël Navarro. Ce dernier conseille donc de réaliser un diagnostic complet de ses contrats et de se renseigner sur les bases du dédouanement. De nombreux sites recensent les procédures d'échanges commerciaux hors UE (***) mais, problème, la Grande-Bretagne n'y figure pas encore. Les professionnels des secteurs agroalimentaires devront veiller à obtenir des certificats d'export auprès de la DDCSPP pour les échanges d'animaux ou de produits d'origine animale et de la Draaf pour les végétaux ou les produits d'origine végétale. Ils vont également devoir être attentifs aux signes officiels de qualité et d'origine, au nombre de 218 en Nouvelle-Aquitaine (3 000 au niveau européen) car demain, c'est le droit britannique, encore non connu, qui cadrera les niveaux de protection. La Commission européenne espère que le pays mettra en place une législation nationale à même de garantir la continuité de la protection, comparable à celle prévue par le droit de l'Union. Mais à l'heure actuelle, le fog londonien demeure.
(*) Si le Parlement britannique avait ratifié l'accord présenté par la première ministre Theresa May le 15 janvier dernier, les délais auraient pu être allongés jusqu'en août 2022. Il a finalement été rejeté à 432 votes contre seulement 202 pour.
(**) En Deux-Sèvres, c'est le quatrième à l'export et le huitième à l'import.
(***) https://pro.douane.gouv.fr/ ou sur le market access database, et plus spécifiquement Expadon et Impadon, pour tous les professionnels concernés par l'importation des animaux, des denrées et des produits d'origine animale, des végétaux et des produits végétaux. Il faut également s'assurer de disposer d'un compte TRACES pour les animaux et TRACES-NT pour les végétaux.
Pour toute question
A la DGAL : Référent Brexit : francis.geiger@agriculture.gouv.fr
Site web Ministère Agriculture et alimentation : https://agriculture.gouv.fr/brexit
Site web du gouvernement : https://brexit.gouv.fr/sites/brexit/accueil.html
En Nouvelle-Aquitaine :
?Végétaux : DRAAF : Service Régional de l'Alimentation - unité santé du végétal :
?Service : export-sral.draaf-nouvelle-aquitaine@agriculture.gouv.fr
?Chef mission inspection aux frontières : Patrick LAGLAINE : patrick.laglaine@agriculture.gouv.fr
?Animaux et denrées d'origine animale : services départementaux DD(CS)PP
?Ex : DDPP33/ export : ddpp-export@gironde.gouv.fr
?sites web de la DRAAF Nouvelle-Aquitaine
?Circulation des végétaux en intra et extra communautaire:
http://draaf.nouvelle-aquitaine.agriculture.gouv.fr/Circulation-des-vegetaux-ou
?Informations Nouvelle-Aquitaine /Brexit :
http://draaf.nouvelle-aquitaine.agriculture.gouv.fr/Agroalimentaire-IAA