Les intentions de vote des agriculteurs
Le dernier sondage rendu public à l'occasion du grand débat organisé sur les prochaines élections européennes par Sciences-Po Paris, l'INP AgroToulouse et Réussir est riche d'enseignements. Il pointe en premier lieu un réel intérêt des agriculteurs pour ces élections. En effet, à la question, " quel est votre niveau d'intérêt pour les prochaines élections européennes de 2024 ? ", ils sont 75,9 % à se déclarer intéressés voire très intéressés. Seuls 6,2 % d'entre eux ne " trouvent aucun intérêt " à cette élection.
En comparaison de la moyenne française (6,5/10) et des ruraux (6,2), ces chiffres sont plutôt bons et même supérieurs avec un score de 6,7/10 de moyenne. C'est en partie ce qui explique qu'ils ont l'intention d'aller voter. Ainsi 61,3 % des personnes interrogées ont affirmé être sûrs à 100 % d'aller voter. Sur une échelle de 0 à 10, 91,3 % des sondés ont déclaré vouloir aller voter, ce qui, là encore, marque un civisme réel de la part du monde agricole. Les agriculteurs se situent entre 15 et 16 points de plus que la moyenne des Français (45,1 %) et celle des ruraux (44,8 %) sur la certitude d'aller voter.
Sur les intentions de vote, les agriculteurs semblent refléter à quelque chose près les intentions de la plupart des Français en marquant une nette préférence pour la liste de Jordan Bardella (RN). En effet plus d'un cinquième des exploitants interrogés (20,9 %) déclare vouloir voter pour ce dernier et ses colistiers, devant la liste de la majorité présidentielle conduite par Valérie Hayer (11,4 %) au coude à coude avec celle de François-Xavier Bellamy (LR - 11,3 %).
Les intentions de vote sont tout aussi proches chez les agriculteurs pour la liste des Écologistes de Marie Toussaint (7,2 %) celle d'Alliance rurale (6,2 %) conduite par Willy Schraen et Jean Lassalle et la liste Reconquête (5,9 %) de Marion Maréchal. Ils sont tout autant (7,1 %) à déclarer ne pas savoir pour qui voter ou à déclarer voter blanc ou nul (5,9 %). Enfin une poignée d'entre eux s'apprête à déposer un bulletin dans l'urne pour la liste PS-Place publique de Raphaël Gluscksmann (5,2 %) ou celle de La France insoumise (LFI) pilotée par Manon Aubry (3,9 %). Ce qui déterminera le vote des agriculteurs, toutes listes confondues, tiendra autant aux questions de politiques générales (46,7 %) que des questions agricoles (53,3 %) elles-mêmes. Quant à leur positionnement politique, les exploitants agricoles affirment se situer très majoritairement (83,2 %) au centre et à droite : 15,8 % se positionnent clairement très à droite, 33,1 % à droite et 33,3 % au centre et centre droit, ce qui les situe à droite, au-dessus de la moyenne des ruraux et de l'ensemble des Français. D'ailleurs, ils déclarent se sentir proches des Républicains (23,6 %), du Rassemblement national (20,4 %), de Renaissance (11,1 %), de Reconquête (5,1 %), du MoDem (4,9 %) d'Horizons (4,8 %), de Debout La France (3,7 %) et de l'UDI (3,7 %), LFI ne recueillant que 6,1 % des suffrages, le PS 5,2 % et Les Écologistes 8,4 %.
Cette propension des agriculteurs à choisir un vote contestataire, protestataire alors même que celui-ci s'est exprimé de manière plus modérée au cours des scrutins tout le long de la Ve République est-il le signe de l'exaspération, d'un ras-le-bol ? C'est ce que le sondage a tenté d'analyser en leur demandant les cinq principales raisons des manifestations de janvier à mars. Sans aucune surprise, ce sont les règles liées de près à l'Union européenne qui sont leurs premières cibles : en tête une demande de " plus de cohérence entre les réglementations " (56,6 %), devant la protection des nationaux de la concurrence hors-Europe (50,3 %**). Cette demande précède " l'allègement des normes environnementales " (49,2 %) et la simplification des procédures administratives liées à la Pac (47,8 %).
Lire également l'interview d'Isabelle Boudineau, conseillère régionale de Nouvelle-Aquitaine, en charge de l'Europe et de la coopération européennes, un article sur un podcast sur des initiatives européennes, les candidats dans la Vienne, et les grandes lignes des programmes des principales listes en France.