Les jeunes agriculteurs béninois cherchent à s’émanciper
L’Afdi Nouvelle-Aquitaine, structure de coopération agricole internationale, tenait son assemblée générale le 20 juin au siège du Crédit Agricole Charente-Périgord à Soyaux. Une table ronde a permis de découvrir l’agriculture béninoise, représentée par le président d’une association de jeunes qui souhaite rejoindre l’Afdi.
L’Afdi Nouvelle-Aquitaine, structure de coopération agricole internationale, tenait son assemblée générale le 20 juin au siège du Crédit Agricole Charente-Périgord à Soyaux. Une table ronde a permis de découvrir l’agriculture béninoise, représentée par le président d’une association de jeunes qui souhaite rejoindre l’Afdi.
Eustache Hounkpatin est agriculteur au Bénin, en maraîchage et aviculture. Il est le président de l’Association des jeunes agriculteurs modernes (Ajam) depuis 6 ans. La structure existe depuis 2003, à l’initiative de quatre jeunes. « Ils avaient compris qu’ils devaient se regrouper car ils étaient complémentaires, pour pouvoir échanger, faire évoluer leurs activités ». L’Ajam compte environ 700 membres, dans 7 départements sur les 14 du Bénin. Ils ont entre 18 et 40 ans. « Pour être membre, il faut avoir sa propre activité agricole, insiste Eustache. L’Ajam accompagne l’entrepreneuriat des jeunes. Elle les aide à tenir la bonne gestion de leurs données comptables. Les jeunes viennent vers nous. Nous développons le mentoring pour former de la main-d’œuvre qualifiée en maraîchage, aviculture, pisciculture, etc. ».
Des freins à l’agriculture
Mais l’agriculture béninoise souffre d’un cruel manque de reconnaissance. Elle représente pourtant 32 % du PIB du pays et 70 % de l’emploi. L’État n’appuie pas l’installation de la jeunesse. « Il n’y a aucune politique qui insère et soutient les jeunes. Le financement agricole au Bénin n’existe quasiment pas ou alors grâce à l’Afdi ». Bien plus, les jeunes qui s’installent en agriculture sont parfois découragés, vandalisés. « Il y a des intimidations ». L’Ajam essaie de faire prospérer les projets d’installation, mais dès que les jeunes ont une opportunité d’emploi, ils quittent le milieu agricole… « Les jeunes ne veulent pas dire ce qu’ils font. Ils préfèrent dire qu’ils sont entrepreneurs. Il est aussi difficile d’obtenir l’écoute des anciens. Ils ne nous laissent pas la place… ».
Autre obstacle, une mentalité valorisant les réussites ostentatoires. « Le Béninois fonctionne au suivisme. Il est attiré par ce qu’il voit qui brille. Si nous arrivons à créer des exemples parmi les agriculteurs qui réussissent, peut-être que nous changerons les mentalités ».
Eustache et ses collègues essaient de bousculer l’administration pour défendre leur cause. « Nous savons que les avancées ne seront pas pour nous, mais pour l’avenir. Nous devons faire comprendre que des améliorations sont nécessaires pour rendre l’emploi attractif ». Eustache a bien conscience que l’évolution ne se fera qu’en jouant collectif : « Il faut faire de la politique. Nous allons associer les aînés à notre stratégie d’insertion des jeunes ».
Soutien de l’Afdi recherché
Les représentants de l’Afdi Nouvelle-Aquitaine ont bien entendu le message du président de l’Ajam, se disant prêts à construire ensemble. « L’Ajam a besoin de l’accompagnement de l’Afdi, de son expertise. L’association béninoise ne dispose pas de technicien. Elle n’a qu’un seul comptable. Si nous pouvions former des formateurs, alors nous développerons nos compétences », estime Eustache Hounkpatin.
Reconnaissance de l’agriculture
Gaétan Bodin, président des Jeunes agriculteurs de Nouvelle-Aquitaine, réagit au discours d’Eustache Hounkpatin, reconnaissant qu’en France aussi l’agriculteur n’est pas perçu comme un chef d’entreprise : « Au JA, nous prônons haut et fort que nous sommes des chefs d’entreprises agricoles, un métier complexe, qui nécessite de la gestion, une formation initiale robuste ». Fabian Coyaud, agriculteur charentais, membre des JA très impliqué dans les échanges de l’Afdi en Afrique, se dit troublé par cette absence de reconnaissance de l’agriculture au Bénin. « L’humain par nature a besoin de reconnaissance. En France, malgré tout, l’agriculture attire. Les gens veulent revenir à la terre. Il y a un certain engouement ». Les agriculteurs savent coopérer, se serrer les coudes.