Prédire ce que sera l'eau
Bassin des captages du Vivier > Un projet inédit de modélisation quantitative, et qualitative, des prélèvements en nappe et des transferts d'intrants (nitrates) sur le bassin d'alimentation des sources du Vivier permet d'entrevoir ce que sera l'eau, selon différents scénarios.
Financée par le syndicat des eaux du Vivier (Sev), l'agence de l'eau Loire-Bretagne et le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), et réalisée par le BRGM, en collaboration avec AgroParisTech (l'institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement) et l'Inra, dans le cadre d'un projet d'appui aux politiques publiques, la modélisation quantitative et qualitative du bassin d'alimentation des captages du Vivier a permis de dresser un état des lieux du terrain et de la ressource, et de simuler l'avenir, selon diverses conditions.
Les premiers résultats de cette modélisation unique en France ont été rendus publics à l'été 2018. Cette étude est sans pareil par l'étendue de l'espace analysé et, malgré cela, la précision des mesures effectuées et des données recueillies (de 2000 à 2016, voire plus), puisque le territoire de 170 km2 d'aire d'alimentation de captage a été divisé en mailles de 250 m de côté et les informations ont été collectées auprès de la moitié des exploitations agricoles présentes sur le bassin*.
« Toute modification des prélèvements pour l'irrigation dans le bassin implique un effet rapide et sensible sur le débit de la source du Vivier », indique la synthèse du rapport final de l'étude qui a évalué les réactions du bassin suite à des simulations** simples et plus complexes. Lorsque certains prélèvements sont arrêtés l'été, des gains de débit à la source du Vivier sont observés, est-il aussi souligné. « Je ne me suis jamais opposé au stockage de l'eau pour cela. L'hiver, quand l'éponge est remplie, elle déborde : c'est ce volume d'eau, que le sol ne peut pas piéger, qui peut être stocké pour l'été. La modélisation sert, entre autres, à calculer le bilan volumique, et donc, peut permettre de définir un seuil de remplissage des réserves, en hiver, là où elles seront mises en place », explique Marc Lambert, hydrogéologue, directeur du Sev, à l'origine du projet de modélisation, et animateur du groupe de travail national entre les collectivités sur la protection des captages contre les pollutions diffuses.
L'effort de la profession agricole salué
Quant à la réaction de l'hydrosystème, à une baisse des pressions en nitrates, elle est immédiate mais « la stabilisation du système n'intervient qu'au bout de dix à quinze ans », stipule le rapport de la modélisation (voir graphique ci-dessus). « On a prouvé scientifiquement, déduction faite des variations climatiques, que l'effort de la profession agricole - sur la gestion des fertilisants, les couverts végétaux, la diversification de l'assolement - a fait baisser de 15 % le taux de nitrates dans les nappes », se réjouit Marc Lambert. 95 % des agriculteurs sur le bassin ont au moins une parcelle en zone très vulnérable. Ce sont donc les efforts de tous qui permettent un tel résultat, insiste l'hydrogéologue.
Les prochaines phases de cette étude visent à suivre l'évolution des métabolites des produits phytosanitaires et leur mouvement sur le bassin, et à calculer l'évolution des besoins des plantes, en fonction du climat, en s'appuyant sur les scénarios du groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (Giec).
*Par le Sev et les coopératives, qui lui ont permis d'accéder aux données qu'elles détenaient.
** Une représentation numérique tridimensionnelle du bassin du Vivier sert à réaliser les simulations, à partir des équations d'écoulement dans le sol et de transfert en nappe des intrants.