Fourrages
Adapter les conduites de troupeau face aux faibles stocks de fourrages
Cet été, le nourrissage des femelles allaitantes va ponctionner les faibles stocks de ce printemps. C’est dès maintenant qu’il faut réagir en adaptant les conduites. L’absence d’anticipation d’achats extérieurs peut conduire à la spéculation et à l’augmentation des coûts de production.
La faiblesse des pluies depuis le début de l’année et les fortes chaleurs pénalisent fortement la production d’herbe. Malgré des stocks d’herbe de bonne qualité, les récoltes en ensilage herbe et foin sont en baisse de 10%, à parfois plus de 30%. Si l’affouragement intervient cet été et en raison de reports de stocks plutôt faibles suite à la sécheresse de 2009, le fourrage peut manquer. Il faut alors faire le point rapidement sur l’exploitation pour anticiper.
Préserver au mieux les performances des animaux
Cette année les bovins seront rationnés mais cela ne doit pas affecter les performances des animaux : croissance, reproduction... La complémentation des veaux les plus tardifs, mâles puis femelles, est le premier levier d’adaptation. Ensuite l’affouragement des vaches suitées interviendra. Un veau peut raisonnablement être sevré à partir de 5 à 6 mois, dès lors qu’il consomme quotidiennement 1,5 à 2 kg de concentré. On donnera également une certaine priorité aux génisses âgées de 1 à 2 ans
Pour les vaches gestantes et les génisses les plus âgées, la complémentation avec un fourrage de moindre qualité ou rationné peut être nécessaire pour les maintenir en état.
La réorganisation des lots et l’accélération des ventes constituent les autres leviers pour gagner quelques kilogrammes de matière sèche par jour. S’il n’est pas nécessaire de rentrer les vaches, il faut en revanche détecter le plus rapidement possible les vaches à réformer pour les finir à l’auge avec une forte complémentation ou les vendre en maigre selon les habitudes et les stocks. En cas d’absence d’herbe, les lots réorganisés seront parqués sur une parcelle.
Fourrages, sels et eau au pâturage
L’affouragement des vaches et des génisses sera guidé aussi par le type et l’état des animaux. L’apport se fera, sous forme d’ensilage d’herbe, de foin et si les stocks manquent, de paille complémentée avec de l’aliment liquide ou du concentré.
Pour les vaches taries, un apport de paille suffira, complété éventuellement par 1,5 à 2 kg de concentrés ou un aliment liquide. Dans le cas d’apport de foin, on peut stabiliser l’apport à 5-7 kg de foin/jour/vache selon l’état de celle-ci.
Pour les vaches suitées, on augmentera le foin ou on rajoutera 2 kg de concentré à la ration précédente. Enfin, les vaches vêlant en août-septembre seront pratiquement affouragées comme en stabulation. Les génisses de 1 à 2 ans recevront 5 kg de foin complété par 1 kg de concentré pour maintenir une légère croissance.
De façon générale, on apportera du sel à l’ensemble des catégories au pâturage. Enfin, l’abreuvement doit être surveillé sur les points d’eau en voie d’assèchement et parfois de moindre qualité. Une vache peut boire 80 à 100 litres d’eau par jour.
A plus de 20% de déficit, prévoir des achats de fourrages
Pour connaître les besoins complémentaires, il faut estimer le déficit fourrager à partir de l’évaluation des stocks disponibles en foin, enrubannage et ensilage, en les comparant aux consommations des années précédentes. Il faudra également prendre en compte le fourrage distribué cet été et prévoir une marge de sécurité.
Si le déficit fourrager estimé est inférieur à 20%, celui-ci pourra être couvert par l’apport de concentrés (prélevés, achetés) ou par des co-produits déshydratés.
S’il est supérieur à 20%, il est nécessaire d’avoir recours à l’achat de fourrages grossiers adaptés. Celui-ci est normalement moins coûteux à l’UF.
Dans le cas de fort déficit, chez les éleveurs finissant des animaux avec de l’ensilage, ce dernier sera à réserver aux femelles d’élevage. La finition se fera alors avec plus de céréales voire uniquement en sec et de la paille. La distribution de paille de céréales ou de pois sera réservée aux bovins à forte capacité d’ingestion, vaches avant vêlage et éventuellement après et les génisses de 2 ans. Les génisses d’un an destinées à l’élevage ne recevront de la paille qu’en dernier recours.
Les pailles en secours
Si le fourrage grossier, ensilage, foin, manque, il faut se tourner vers la paille. Ainsi 10 kg de foin équivalent à 7 kg de paille de bonne qualité en complétant par différents aliments. C’est un moyen simple d’approcher les quantités de paille et de compléments qu’il sera nécessaire d’acheter. Parmi les sous-produits grossiers on peut penser aux pailles de graminées ou légumineuses porte-graines, à la paille de pois et aux pailles de maïs grain. Il est cependant trop tôt pour parier sur cette dernière en raison de conditions de récolte nécessaires : précoces et séchantes.
La paille de pois économisera globalement 50% de la matière azotée et de la céréale, avec les pailles de maïs grain il faut rajouter environ 20 % de matière azotée et n’apporter que le tiers de céréale par rapport à de la paille de blé. Attention, ces produits sont pauvres en minéraux, il faudra absolument apporter de 100 à 120 g (7-21).
Par exemple un déficit de 10 000 kg peut être comblé avec 7 000 kg de paille, 2 200 kg de céréales et 600 kg de tourteaux de soja 48.
L’aliment liquide, un complémentaire azoté pour la paille
Faible en énergie mais riche en azote, l’aliment liquide est le complément idéal des rations à base de paille. Il faut prévoir une transition lente (15 jours). Ce type d’aliment est destiné aux animaux ayant plus de 12 mois et des besoins modérés. La distribution est à faire préférentiellement par arrosage des fourrages utilisés. Il ne faut pas dépasser la quantité de 30 g d’urée / 100 kg de poids vif.
Il faut tirer des enseignements de cette sécheresse pour la prochaine campagne. Certaines prairies notamment les RGI et RGH de plus d’un an seront peut-être à renouveler. D’autre part, il est utile de prévoir quelques tonnes de matière sèche distribuées en pâture et un report de stocks de fourrage. La possibilité de stocker plus ou moins de grain et/ou d’ensiler du maïs constitue une bonne marge de sécurité et permet l’ajustement.