Précipitations
Anticiper et prévenir pour gérer au mieux les crues
Le phénomène hivernal des crues, bien connu, mobilise de nombreux acteurs pour limiter son impact sur la population et les biens. Le dérèglement climatique oblige à réfléchir à des aménagements du territoire dans les années à venir.
Le phénomène hivernal des crues, bien connu, mobilise de nombreux acteurs pour limiter son impact sur la population et les biens. Le dérèglement climatique oblige à réfléchir à des aménagements du territoire dans les années à venir.
La décrue s’amorce dans les rivières des Deux-Sèvres, après le pic du 2 février où la Sèvre niortaise a été placée en vigilance orange. À la station du centre-ville de Niort, le niveau a atteint 12,3 mètres le 3 février. « La décrue a commencé sur le bassin amont, jusqu’à Coulon. En aval, les volumes d’eau restent très conséquents, la décrue sera très lente et progressive, elle pourrait s’amorcer en milieu et fin de semaine », précise Gilles Chourré, directeur adjoint de l’Institut interdépartemental du bassin de la Sèvre niortaise (IIBSN). Plus au nord, les niveaux de la Sèvre nantaise et du Thouet connaissent aussi une lente décrue.
Se préparer à la crise
Ce phénomène hivernal est scruté de près par les services de l’État et les collectivités, qui anticipent des inondations aux graves conséquences pour la population. Au début de l’hiver, les vannes sont abaissées sur la totalité des ouvrages hydrauliques pour retarder au maximum le débordement des cours d’eau. Stéphane Gardenal, technicien à la Communauté de communes de Parthenay-Gâtine, assure le suivi des stations de la Passerelle Saint-Jacques et du barrage de La Peyratte. « Le Thouet peut monter très rapidement, explique-t-il. La manœuvre des vannes est utile au tout début de la crue, après c’est dame nature qui décide. Ici, nous sommes en amont du cours d’eau. On alerte la station de Saint-Loup-Lamairé en aval et celles du Cébron. Le but est de se coordonner pour éviter une vague ».
Avec les phénomènes climatiques plus violents que nous connaissons, nous devons nous tenir prêts .
Les services de prévision des crues sont capables d’estimer les hauteurs des cours d’eau dans les 24 h, 48 h et 72 h. Leurs observations remontent à la Direction départementale des territoires, qui sert d’interface avec le préfet, coordinateur des procédures de crise. « Depuis 2014, nous avons été deux fois en vigilance orange pour la Sèvre niortaise, en 2020 et 2021, jamais pour les autres rivières, témoigne Ghislaine Blanchier, chef du bureau de la gestion de crise au cabinet du préfet. Mais avec les phénomènes climatiques plus violents que nous connaissons, nous devons nous tenir prêts ».
En Deux-Sèvres, la vigilance jaune est suffisante pour enclencher la campagne d’alerte auprès des maires et du département. En cas de vigilance rouge, le préfet coordonne le Centre opérationnel départemental, qui implique le SDIS, l’ARS, le SAMU et les forces de l’ordre.
Identifier les enjeux et informer la population est souvent la seule action possible lors des épisodes pluvieux. « D’une manière générale, nous avons peu de marge de manœuvre face aux événements de crue, explicite Gilles Chourré. Les conditions d’écoulement sont très peu influencées par les manœuvres des ouvrages. Les facteurs les plus importants sont d’ordre physique (intensité des pluies, topographie, pente hydraulique, contraintes de marées en aval) et ne peuvent être maîtrisés ».
Le rôle crucial des prairies permanentes
« Le Marais poitevin est la plus grande zone humide de la façade atlantique », rappelle Dominique Giret, directeur technique du pôle biodiversité et agriculture durable au Parc naturel du Marais poitevin. Il souligne le rôle essentiel du marais comme réceptacle des crues des bassins-versants : « Le marais est une cuvette qui se remplit tous les hivers, avant de laisser évacuer l’eau vers l’océan. Les prairies sont primordiales pour accueillir les crues. En vingt ans, nous avons aidé à la restauration de 1 000 hectares de prairies, en luttant notamment contre la déprise agricole ».
Sa préoccupation actuelle est la montée du niveau de l’océan. « Un programme serait bienvenu pour freiner l’arrivée des eaux dans le marais, met en avant Dominique Giret. Nous plantons quelques haies ici, mais il faudrait en planter de Sepvret jusqu’à Coulon. On ne peut plus assécher le marais. L’agriculture va devoir faire des choix dans les années à venir ».
CRUE ET STOCKAGE DE L'EAU
Alors que le tribunal administratif de Poitiers a annulé le 4 février l’autorisation de construire 21 réserves de substitution dans le bassin de la Boutonne, les crues actuelles ont relancé le débat sur le stockage de l’eau. « Ces crues sont de l’eau douce excédentaire, déclare le président de la Coop de l’eau, Thierry Boudaud, dans un communiqué. Elle n’est plus absorbée par la terre, ni stockée naturellement car les nappes phréatiques superficielles sont en débordement ». L’argument est critiqué par les opposants au projet. Benoît Biteau, député écologiste au Parlement européen, parle dans une vidéo d’un « reméandrage (remettre le cours d’eau dans ses anciens méandres) des fleuves et des rivières » et de la mise en place de l’écrêtement des crues comme solution pour l’irrigation des terres agricoles l’été.