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Drones : Que faire de la cartographie aérienne ?

Prendre de la hauteur pour mieux adapter l'intervention culturale : voilà l'objectif premier des survols. Quitte, au passage, à bouleverser la notion de parcelle.

Jean-Philippe Bernard, en plein travail avec son drone.
Jean-Philippe Bernard, en plein travail avec son drone.
© Chambre d'agriculture 17

Par essence, l'exploitant est au raz du sol. Ou à deux mètres de haut, tout au plus, selon la taille de son tracteur. Pour prendre de la hauteur, il y avait jusqu'à présent les satellites, mais les nuages jouaient parfois les troubles-fêtes. L'arrivée des drones en agriculture coïncident donc avec d'autres demandes, plus parcellaires. Ces ailes volantes sont équipées de capteurs multispectraux ou de caméras qui, combinées avec un GPS, scannent littéralement la parcelle de blé, d'orge, de colza ou de vignes. De ces survols naissent des cartographies précises. Mais comment les exploiter ?
L'avantage des drones est de permettre de couvrir de grandes surfaces et d'analyser plusieurs zones de plantations en un temps record. Les appareils fournissent aux agriculteurs et aux ingénieurs agronomes des informations indispensables sur les cultures agricoles ou autres plantations comme les vignes. Les cartographies sont de type PRI-R (Proche infrarouge, Rouge) ou RVB (Rouge, Vert, Bleu, longueur d'onde visible).  Des spécialistes de l'agriculture y détectent le moindre souci dans les différences de couleurs. «Le traitement photogrammétrique des images, réalisé avec des capteurs multispectraux pour obtenir des cartes ortho-mosaïques, facilite la localisation des maladies, permet d'optimiser et de cibler précisément les zones à traiter, limite ainsi l'utilisation des engrais ou les coûts de traitement et détermine les zones en manque d'irrigation», assure-t-on chez Drone Malin, le spécialiste français de la vue aérienne. «Couplé avec des images aériennes de précision, [ces données] permettront aux agriculteurs d'effectuer des comptages, de vérifier l'état général et la vigueur des végétaux, de visualiser les zones endommagées, en excès d'eau ou ayant subit des dégâts de gibiers.» Le drone embarque un ou plusieurs capteurs selon les mesures à faire : estimation de la biomasse, taux de chlorophylle, stress hydrique ou simple imagerie, repérage des arbres malades dans une forêt, etc. Plus rapide pour dresser un état des lieux, le drone a donc un avantage sur les autres techniques, surtout en cas d'aléa climatique. L'agriculture de précision qu'il rend possible grâce à ces détections expresses pourrait permettre au monde agricole, selon une étude de l'organisation anglaise Nesta, de diminuer le coût des intrants et d'optimiser les rendements -de 2 à 5 % dans le cas du blé. Les revenus d'une exploitation moyenne pourraient ainsi être augmentés de «près de 20 %».
Le cabinet d'audit PwC estime que le marché potentiel pour les drones agricoles avoisine les 30,5 milliards d'euros. Selon le Parlement européen, le secteur européen du drone est en plein développement. Les recherches montrent que le secteur pourrait créer plus de 150 000 emplois d'ici 2050. Il est aussi estimé que d'ici 10 ans, l'industrie du drone pourrait représenter 10 % du total du marché européen de l'aviation (autour de 15 milliards d'euros par an). Certains experts prévoient plus de 5 milliards d'euros par année pour le marché des drones civils en Europe et les services qui en découleront d'ici 2035. La Commission reste par contre prudente, car elle s'inquiète des conséquences négatives sur l'expansion du marché des drones d'un système de réglementation fragmenté entre États membres, voire de l'absence de réglementation dans près de la moitié des pays.  Ceci sans parler du cadre légal divisé entre les États membres et l'UE sur la base du poids des drones ; une caractéristique jugée arbitraire par la Commission qui propose une réévaluation et une révision de la réglementation en s'appuyant sur ce qui existe déjà dans le domaine de l'aviation civile.
C'est dire l'importance que va prendre cette technologie dans les années à venir. Se déclinent déjà à la suite des fabricants des opérateurs (comme Airinov), mais aussi des fournisseurs de cartographies, de logiciels ou de guidage.

Deux drones à la Chambre

La Chambre d'agriculture 17-79 s'est elle aussi investie dans cette aventure. Jean-Philippe Bernard et Christophe Mauget travaillent avec les deux drones déjà acquis. «Nous passons au-dessus des champs pour prendre des photos...» s'amuse Jean-Philippe Bernard. «Nous volons à 50 m de hauteur, et jusqu'à 150 m, en passant plusieurs fois au-dessus d'une parcelle en prenant 150 à 200 photos.» Des images en couleur standard ou télédétection, thermique ou agronomique. «Cela nous permet de faire des diagnostics agronomiques en fournissant des cartes des parcelles avec des dégradés de couleurs. À 150 m de hauteur, à la vitesse de 10 m/s, nous avons des réalisations spatiales de l'ordre du mètre.» Jean-Philippe Bernard en profite pour apporter quelques précisions météorologiques : «le drone travaille même par temps nuageux, mais pas avec du vent ou de la pluie. Le satellite, lui, a une précision de 5 m sur 5».

L'optimisation différentielle

«Les exploitants attendent de cet outil des conseils classiques», complète-t-il. Des outils utilisant cette cartographie produite existent, permettant d'intégrer les données. Surtout chez les entrepreneurs de travaux agricoles. «C'est un langage universel de cartographie SIG», indique Jean-Philippe Bernard. Pour lui, l'établissement d'une carte ne doit pas permettre de découvrir l'hétérogénéité de la parcelle. «Elle confirme ce qui est observé au sol». La Chambre propose alors de travailler de façon «différentielle», là où l'exploitant travaillait jusqu'alors de manière homogène sur sa parcelle. «L'intérêt de la télédétection est de pouvoir interpréter la réalité, peu visible ou détectable au sol, et de chercher une explication à cette dernière.» On cherche la cause, on ajuste, on compense. C'est le rôle du conseiller de compléter avec des analyses de sol, des réglages des appareils, des zones plus sèches... «La plante est notre indicateur, notamment sur le stress hydrique.» Quant au gain, in fine, après la compensation, Jean-Philippe Bernard attend encore des résultats d'expérimentation : «c'est une vraie révolution culturelle dans les conduites culturales. Notamment sur les unités de travail en surface et la différenciation entre ces unités. Il faut réfléchir au morcellement de la parcelle au mètre près, concevoir une nouvelle unité de travail en complexifiant les parcours culturaux.» Multiplication des données d'intervention, meilleures réponses : entre exploitations de plus en plus grandes et «morcellisation», la pratique doit changer. «L'évaluation de cette télédétection se verra à la récolte et dans les gains de rendement.» Cartes papiers et explications vont de pair pour la prestation drone de la Chambre.

 

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