Thouet
Et au milieu de différents points de vue coule de Thouet
Le contrat territorial milieux aquatiques porté par le Syndicat mixte de la vallée du Thouet vise notamment à réduire l’étagement artificiel du Thouet. Les ouvrages sont au cœur de la discussion de laquelle devra naître un compromis entre usages et préservation du milieu.
Lundi 24 janvier s’ouvrait l’enquête publique relative à la déclaration d’intérêt général (DIG) des travaux concernant la restauration et la préservation du Thouet et de ses affluents, à l’établissement d’un droit de passage temporaire sur les propriétés privées et à l’autorisation prévue par les articles L. 214-1 à L. 214-6 du Code de l’environnement. Suivront préalablement à toute intervention sur les barrages, les études d’incidence. Des temps de concertation seront alors organisés.Effectivement, la gestion des ouvrages qui ponctuent les 152 kilomètres parcourus par le Thouet en Deux-Sèvres fait couler beaucoup d’encre. La directive-cadre sur l’eau (DCE) demande aux Etats membres d’atteindre d’ici 2015 le bon état des ressources en eau. Depuis sa traduction en droit français en 2006, agences de l’eau et syndicats de rivières ont engagé sur leur secteur des diagnostics « afin de mesurer les altérations subies par le milieu », expliquent Olivier Constantin et Guillaume Charruaud. Les deux techniciens du Syndicat mixte de la Vallée du Thouet (SMVT) définissent la zone qui les concerne : « Le SMVT intervient sur l’ensemble du Thouet, des sources à la limite départementale avec le Maine-et-Loire. Mais également sur ses trois affluents, le Gâteau à Airvault, la Cendronne à Availles-Thouarsais et le Palais qui se jette dans le Thouet à Parthenay ». A partir du diagnostic des cours d’eau, un comité de pilotage, composé de 33 membres représentatifs des différents usagers, a négocié et consigné au sein du contrat territorial milieux aquatiques une série d’actions. Au terme de l’année 2015, leur mise en œuvre et effets seront évalués. « Pour préserver les espèces relictuelles, pour améliorer la biodiversité, le programme prévoit d’intervenir sur un certain nombre de paramètres dans l’objectif de retrouver le bon état hydromorphogique des zones à enjeux biologiques, de restaurer la continuité écologique (laquelle continuité écologique des milieux aquatiques se définit par les possibilités de déplacements des organismes vivants ainsi que par le transport des sédiments) dans les zones d’actions prioritaires et de retrouver sur certaines portions affectées, la qualité biologique. »
Des compromis
Parmi les nombreuses actions programmées – intervention sur les annexes et le lit majeur ; intervention sur le lit mineur, les berges et la ripisylve – il y en a une qui interpelle particulièrement les adhérents de l’ASA (Association syndicale autorisée) de Taizé, Maulais, Missé. Pour rétablir la continuité écologique, le contrat territorial milieux aquatiques prévoit une réduction du taux d’étagement artificiel de la rivière par rapport à sa pente naturelle. A ce titre, il est prévu de travailler sur le niveau des barrages. « Les ouvrages abandonnés seraient arasés, pour les autres des compromis seront recherchés localement. Des interventions qui respecteront l’ensemble des usages antérieurs à la mise en œuvre du programme », précisent Olivier Constantin et Guillaume Charruaud rappelant la mission de médiation qui incombe à leur fonction. 115 barrages sur 152 km de rivière sont des chiffres qui leur semblent bon à rappeler. Cette artificialisation nuit selon eux au bon état écologique du Thouet. Jean-Michel Dinais, président de l’ASA et porte-parole des propriétaires d’ouvrages présents sur les communes de Taizé, Maulais, Missé, interprète les choses différemment : « Ces chaussées dont la restauration en 1972 a été financée par les propriétaires et des fonds publics permettent aux prairies et aux peupliers de se développer sur ce secteur ». Le militant est convaincu que sans ces ouvrages, le niveau des puits du secteur baisserait. « Mon père a connu une période sans barrage. L’été, le Thouet se transformait en véritable oued. Je ne veux par connaître pareille situation. » Convaincu que le SMVT fait fausse route, l’ASA défend dans le cadre d’une inévitable transformation des ouvrages l’installation de « pelles » afin de pouvoir réguler le niveau de la rivière. « Et faire marche arrière facilement à moindre frais si besoin. » Sur le terrain, un consensus devra être trouvé. L’objectif législatif à l’échéance de 2015 s’impose.
A noter que l'enquête publique (du 24 janvier au 11 février 2011) concerne Thouars, Airvault , Allonne, Argenton-l’Eglise, Assais-les-Jumeaux, Aubigny, Availles-Thouarsais , Azay-sur-Thouet , Le Beugnon , Châtillon-sur-Thouet, Le Chillou, Gourgé, Lhoumois, Louin, Missé, Neuvy-Bouin, Parthenay , La Peyratte , Pougne-Hérisson , Saint-Aubin-le-Cloud , Saint-Généroux , Saint-Jacques-de-Thouars , Saint-Jean-de-Thouars , Saint-Loup-Lamairé , Saint-Martin-de-Sanzay , Sainte-Radegonde , Sainte-Verge , Secondigny , Taizé , Le Tallud , Tessonnière.
Les droits et devoirs de chacun
Evoquant le contrat territorial milieux aquatiques décliné par le Syndicat mixte de la vallée du Thouet, Jean-Pierre Poupinot juge le travail entrepris légitime. « La rivière compte 115 ouvrages en Deux-Sèvres. Il y a des sections où le niveau de retenue d’un ouvrage arrive au pied du précédant ». Le président de l’Association des riverains et éclusiers des Deux-Sèvres défend cependant un travail de concertation, d’échanges entre le SMVT et les propriétaires et appelle à une réflexion site par site ou par petits groupes cohérents de sites. « Il faut discuter au cas par cas sans perdre de vue que l’objectif du contrat territorial milieux aquatiques porte sur l’ensemble de la rivière. Des constructions sont abandonnées où bloque l’écoulement des eaux. Compte tenu de la longueur du Thouet, il y a moyen de trouver des compromis. » L’actuelle situation donne au Thouet des allures de succession de plans d’eau, juge l’observateur. « L’eau ne court plus que l’été. En réduisant les étagements le programme vise le rétablissement des sections où l’eau circulera plus régulièrement. » Il rassure son entourage en certifiant « qu’il n’est pas question de tout supprimer, et n’oublie pas, par ailleurs, de rappeler que le statut privé des ouvrages ne permet pas à l’administration de disposer des constructions. Les propriétaires ayant accompli leur devoir doivent être respectés. Rien ne se fera sans leur consentement ». Jean-Pierre Poupinot rappelle que les droits appellent les devoirs et vice versa. « Si menace il devait y avoir sur les moulins ou autre chaussée, notre association se battra au côté des propriétaires dont l’ouvrage entretenu ne fait pas obstacle à la continuité écologique, cadre le président. Et de conclure : « Les sites détériorés, laissés à l’abandon ou qui font entrave à la continuité écologique n’ont aucun intérêt ».