« Et si on tirait vers le haut le prix des vins charentais ? »
Achetés principalement l’été, ils clament encore toute leur place dans les rayons et en vente directe. Ils veulent se rendre plus visibles.
La gamme est de plus en plus large. De plus en plus de vins charentais sont élaborés, proposés. De plus en plus visibles, avec des logos simplifiés, des cartes-guide, un nouveau visuel de campagne de promotion et des présences multiples dans diverses manifestations. Pour autant, la partie, dans un univers très concurrentiel, est loin d’être gagnée. La qualité a depuis des décennies servi de bélier dans la prise des parts de marché. Maintenant, c’est au tour des prix «pour avancer en catégorie.» Le discours du président des vins charentais n’est pas simple : augmenter les prix passe par la prise de conscience (collective) des producteurs qu’ils ont à y gagner. 600 vignerons, cinq coopératives, quinze négociants… Voilà les vins charentais sur 1500 hectares produisant d’une année sur l’autre autour des 80 000 hl sur un panel de cépages. Si les trois quarts des ventes de vins charentais ont lieu l’été, pour ces «vins plaisir», Thierry Jullion, le président, se fait précis : «pour être crédibles nous devons monter en prix de telle façon que nos clients aient une image positive de nos vins.» Reste que le modèle économique est à définir : «le prix moyen que nous pourrions appliquer est autour des 5 euros. C’est un minimum pour vivre de son métier et ne pas proposer des vins trop chers aux consommateurs.»
Dans le détail, on compte dans les vins charentais blancs, 12 652 hl de Sauvignon en 2017, 4447 hl en Chardonnay et 4 612 hl en assemblage et 1689 hl en Colombard. Pour les vins charentais en rouge et rosé, on totalise 22881 hl de Merlot, 26 866 hl d’assemblage et 3124 de Cabernet sauvignon, 1092 de cabernet franc et autant de Gamay. Il y a 10 hl d’Arrinarnoa. Sur la récolte 2016, commercialisée en 2017 44 % le furent par des coopératives, 21 % par des négociants et un tiers par des vignerons indépendants : au total 78 908 hl dont 30 % de blancs, 36 % de rosés et 34 % de rouges. Pour des ventes essentiellement estivales, les vins charentais ont quand même réussi à essaimer dans d’autres régions.
"Aujourd’hui on voit nos produits"
«Il faut garder ce que nos parents et grands-parents ont su faire et prendre comme virage il y a 40 ans» disait-on lors de l’assemblée générale, mercredi dernier à Royan. Comprendre que céder aux sirènes du tout cognac n’est pas non plus un gage de pérennité de la filière vins de pays. Outre les bons dans la productivité et la qualité réalisés par les vins charentais, une volonté était clairement affichée à Royan : celle d’exister sur les réseaux sociaux et internet. Les cartes «routières», annuaire des producteurs sont là pour guider jusqu’aux exploitations, mais les vins charentais se doivent «d’occuper le terrain autrement.» Selon Jean-Jacques Biteau, il faut mettre en avant la diversité des vins charentais. Une «nouvelle identité» vient de naître pour les vins charentais avec de nouveaux visuels, où est mis en avant le «slow wine» où «l’on prend le temps.» Slogan que veulent décliner les vins charentais. Il transparaissait dans cette assemblée générale, une volonté collective, assise sur la «charte des vins charentais» signée l’an dernier et communiquée à grande échelle. Cet été on relayera par des publicités d’abribus et sur les lieux de villégiature, un peu comme avant, des sets de table.
Les producteurs présents ont pu aussi se familiariser avec la démarche du système de management environnemental (SME). Les vins charentais pourraient ainsi être les premiers à inscrire les procédures de qualité dans les normes ISO 14001. Un groupe de réflexion planche sur sa faisabilité en Charentes. L’exemplaire de certains viticulteurs bordelais en la matière pouvait être déclencheur d’un mouvement plus large chez les producteurs charentais. L’accent rocailleux audois du président de la confédération des vins IGP de France, Michel Servage, balayait l’actualité de cette filière. Il annonçait en autres que la réflexion était en cours, en plus d’un regard attentif sur les Etats généraux de l’alimentation, avec le FMSE sur des assurances récoltes. Intéressé par la démarche environnementale et par la valorisation «sur place», il estime qu’avec l’IGP, les «producteurs ont une pépite entre leurs mains.» Mais pour se faire, il ne souhaite pas que se rajoutent des contrôles terrains extérieurs à la filière. «La différence avec l’AOP réside que les vins IGP peuvent se permettre d’adapter, d’innover face à la demande du consommateur. C’est ce qui est porteur. » Il est réaliste : «faire de la promotion d’un signe de qualité collectivement n’est pas simple.» Il soulignait le volontarisme de la filière charentaise en ce sens.