Formation : Les vaches sont à l'école et dans la ville
Elle était la base du lycée agricole. 106 ans après elle est toujours là, remplissant son rôle de formation et une exploitation à part entière.
Elle est insérée dans le tissu péri-urbain saintais, coincée entre routes et lotissements. L’exploitation agricole du lycée agricole Georges Desclaude n’envie rien à ses homologues saintaises. Sinon, la place. 180 ha. Des vaches laitières (Prim’Holstein et 10 % de brunes des Alpes) de la vigne et des céréales font un mix entre production, circuits courts et halle pédagogique pour les élèves en formation dans le lycée. L’exploitation emploie 3 salariés, reçoit les aides PAC, et mise sur les circuits courts. L’exploitation produit 60 % du chiffre d’affaires en lait de vache sur 80 ha, dédiés à l’autonomie alimentaire du cheptel, via les cultures non irriguées de sorgho, aux cultures de vente (80 ha, 15 % du chiffre d’affaires) et 12 ha de vignes pour le cognac (10 ha) et le pineau (2 ha en rouge) livrés en vendanges fraîches à Océalia (25 % du chiffre d’affaires). «Nous travaillons exactement comme une exploitation» commente Christian Himmonet, chef de cette exploitation Desclaude. Lui est fonctionnaire, ancien professeur du lycée Renaudin à Jonzac, les trois autres salariés sont rémunérés par l’exploitation, structure privée ainsi que 0.9 d’ETP en occasionnels. «Notre mission est de produire, d’être un support pédagogique et de réaliser des expérimentations» complète-t-il le tableau. Les 140 têtes de bétail sont là «toute l’année» (elles n’ont pas droit aux vacances scolaires !), sans acheter une bête : «nous sommes en système intensif, 10 000 kg par vache, avec un robot de traite. Elles ne sortent pas en raison de la proximité de la ville. Seules les génisses et les taries sortent.»
100 000 l en circuits courts
Des Prim’Holstein sont pédagogues : «elles voient passer 200 élèves en moyenne par an… et elles acceptent de bonne grâce à être les cobayes pour les mesures, les sabots, etc.» Des Prim’Holstein productives : «les investissements sont à notre charge. 750 K€ dans la stabulation en 2009 ; un vignoble a été refait à neuf. Nous arrivons à avoir des excédents.» Et pour cause, l’exploitation de Desclaude a ménagé ses circuits courts : 60 000 l à un transformateur laitier, 5 000 l dans le distributeur automatique de l’hyper U tout proche, implanté depuis 2010, 25 000 l au glacier Lopez à Royan depuis 2011. Le second en vrac chargé directement, le troisième en pochons de 10 l. Viennent s’ajouter les cantines de Desclaude et de Chadignac. 100 000 l vendus à 0.55 € en moyenne. Christian Himmonet connait à l’euro près ses coûts de production. Une analyse qu’il conduit de pair avec un groupe d’éleveurs à la Chambre d’agriculture. «Cela permet de me comparer à eux en transposant la comptabilité publique en comptabilité privée, avec un centre de gestion.» Faible en coût des aliments grossiers, il dégage ainsi l’intérêt de l’îlot en bordure de Charente, à zéro intrant pour le foin de prairie, de rendement médiocre et de qualité moyenne. Sur l’ilot près de l’exploitation, par manque d’eau d’irrigation, on a fait le choix des sorghos non irrigués (15 ha) aux côtés de maïs irrigués (18 ha) : «nous avons réglé ainsi notre souci d’acidose et des taux très élevés très rémunérateurs.» Le lycée vient en plus… lorsque trois élèves, deux à trois jours par semaine, prêtent main forte. L’exploitation livre 615 000 l à Terra Lacta. «Nos circuits courts sont fournis sans labo. C’est un atout. Mais demandeurs de main-d’œuvre. 50 K€ de recettes et un1/3 temps consacré.» Un «petit créneau» qui démontre l’attrait de circuits courts «simples» et «permet de passer les crises.»
Pédagogiquement, le cheptel sert d’exemple, sans rechercher un passage en bio, car «la marche serait haute à franchir.» Ce n’est pas sans débat avec les élèves et les professeurs du lycée. Les limites spatiales du pâturage obèrent ce transfert. «Il nous faudrait affourer…» La mise aux normes de 2009 a conforté la vocation démonstrative du lycée dans la filière laitière. «Nous assumons ce choix.» Fini aussi le projet de méthanisation, avorté par opposition du voisinage. «Nous repartons plus loin vers la transformation laitière avec l’Enilia, avec un coin de vente des produits de notre EPLEFPA.» 130 k€ d’investissements demandés pour l’heure au Conseil régional. L’exploitation expérimente dans son vignoble la réduction des IFT, les cépages résistants avec le BNIC, et les couverts végétaux et la taille des vignes avec la Chambre. Expérimentation aussi en céréales en blés de force et sur 4 ha en bio. Christian Himmonet imagine une formation de commercialisation des produits agricoles.