Portrait
Jean-Louis Maury, le melting-pot des passions
A Vernoux-en-Gâtine, Jean-Louis Maury jongle avec les passions. Le changement tient en éveil le vice-président de la Cavac, toujours ravi de rencontrer de nouvelles têtes ou de découvrir d’autres univers.
L’épaule tire un peu. Le sourcil danse. Cette épaule et ce sourcil sont « la propriété » de Jean-Louis Maury. Cet homme de 59 ans à l’omoplate un peu souffreteuse pour cause de nombreux travaux et au sourcil dynamique, prenant parfois des allures d’accent circonflexe - la promesse de nombreux projets à venir -, carbure aux passions. «L’élevage m’a passionné», ajoute-t-il même si au début, ce n’était pas gagné. Car, « tu seras agriculteur mon fils », a asséné à l’époque Maury père. « Mes parents élevaient des vaches allaitantes ici, à Vernoux-en-Gâtine, et comme j’étais le plus âgé des garçons, j’ai été désigné pour les garder. Dommage, je commençais à aimer l’école», déclare celui à qui l’école le rendra bien puisque c’est sur ses bancs qu’il rencontrera Hélène, sa femme et coéquipière.
En 1975, il s’installe alors à La Rémondière, sur les terres de son arrière-grand-père et ce qui n’était pas un choix au début se transforme en passion. Jean-Louis Maury parle même de gène de l’élevage. «Il faut avoir la fibre car c’est un métier contraignant», assure-t-il. Et d’ajouter : «Le plus difficile, c’est de voir mourir un animal sur son exploitation. On culpabilise, on se dit qu’on a mal fait».
Création-cessation-création-cessation-création... Selon lui, sa plus belle réussite dans le domaine de l’élevage est d’avoir changé de production. Porcs, vaches allaitantes, taurillons... le bientôt retraité et sa femme aiment les défis qu’impose le changement. «Quand on passe d’une production à l’autre, il faut se remettre en question, il faut apprendre à regarder les autres travailler.» Les autres, un mot qui reviendra souvent au détour de cet entretien. Les autres qui forment le groupe, cet aspect-là amènera Jean-Louis à prendre des responsabilités à la Cavac. D’abord administrateur à partir de 1994, il passera quelques années à être comme il dit «la courroie de transmission et à observer pour apprendre tous les rouages de la coopérative». En 2008 Jean-Louis deviendra vice-président de la Cavac.
Une évidente continuité
« La coopération m’a toujours intéressé car c’est le travail d’un groupe et c’est aussi, un homme, une voix. C’est l’équité, la transparence et enfin, attribuer à chacun ce qu’il lui revient», dit, le cœur au bord des lèvres, celui qui a bien fait de suivre le chemin de papa. Si cet engagement lui coûte en termes de temps car, dit-il, « si tu t’engages, tu y vas. Si tu n’y vas pas, tu ne t’engages pas», il avoue qu’il a rencontré des agriculteurs qui lui ont apporté plus qu’il ne leur a apporté. « Grâce à mon engagement au sein de la Cavac que j’ai eu plaisir à voir grandir et progresser, je suis sorti de mon exploitation. Cela permet d’avoir une approche différente de son travail, de faire tomber les préjugés.»
Aller à la rencontre des autres est également l’une de ses passions qu’il partage en famille. En 2008, la Sarl La Raymondière (animation et aménagement en milieu rural) est créée par sa femme et son fils Bertrand. «Les chambres d’hôtes ont quant à elle vu le jour en 1992. Chez nous, on a toujours voulu avoir du monde.» Et comme la femme de Jean-Louis «ne sait pas cuisiner pour deux», il semble alors naturel au couple d’ouvrir les portes de sa salle-à-manger. Puis Jean-Louis retapera les bâtiments de la ferme afin d’accueillir la France autour d’une bonne table. «Grâce aux gens qui passent par La Rémondière, je voyage tous les jours», s’empresse d’ajouter l’agriculteur. Avant de confesser l’une de ses qualités premières : «Je sais prendre le meilleur des gens que je rencontre, je focalise sur leurs bons côtés comme dans la vie d’ailleurs». Ce philanthrope à la curiosité aiguisée quitte le temps de quelques jours La Rémondière pour rendre visite à des amis et à la famille, un socle indéniable à ses yeux, n’hésitant pas à parler de clan familial quand il s’agit d’Hélène, de ses fils, de son père et de sa belle-famille.
«Mes trois fils sont allés voir ailleurs, deux sont revenus», raconte-t-il. « Le troisième n’est pas revenu, glisse-t-il dans un sourire. Il travaille à Bruxelles.» L’un de ses fils a pris la suite de la production porcine et Bertrand, gérant de la Sarl La Raymondière, est intermittent du spectacle. Ce qui permet à Jean-Louis de côtoyer des artistes tels que ceux du Cirque du soleil : «Les artistes me touchent, je trouve le monde du spectacle fascinant». Des intermittents du spectacle viennent également donner des représentations à La Rémondière et Jean-Louis ne se fait pas prier pour les rejoindre lors des after. «Le lendemain, il faut se lever. Il m’est arrivé de ne dormir que deux heures», concède-t-il. Une nuit quasi-blanche n’arrête pas cet homme qui a un besoin vital de noircir son agenda.