La colère est toujours dans le pré
La mobilisation des agriculteurs ne faiblit pas dans la région. Vendredi dernier, 300 d’entre eux se sont donné rendez-vous à Poitiers-Sud pour protester contre l’inefficacité du gouvernement et réclamer la démission de Stéphane Le Foll.
Ils étaient venus pour maintenir la pression, pour montrer au gouvernement qu’ils n’ont pas l’intention de baisser pavillon. Après de nombreuses actions menées tout au long de la semaine dernière, les agriculteurs picto-charentais ont une nouvelle fois fait entendre leur colère et leur désarroi vendredi 5 février. Cette fois, c’est Poitiers qui a été l’épicentre de leur mobilisation. Dès potron-minet, des files interminables de tracteurs sont parties des quatre coins du département, mais aussi des Deux-Sèvres et de Charente, et ont convergé vers la zone commerciale de Poitiers-Sud.
Les élus de la région invités sur une exploitation
Au total, environ 180 machines étaient présentes. Une véritable démonstration de force de la part d’exploitants à bout de nerfs. « On ne veut pas de subventions de la part du gouvernement, on veut des prix justes », clame Sébastien Taillefer, céréalier à Marigny-Brizay (86), pour résumer l’état d’esprit général. En ligne de mire des agriculteurs, les responsables politiques, qui semblent faire la sourde oreille face aux actions menées jusqu’à présent, bien que le président de la République ait promis de s’exprimer sur la question avant le Salon de l’agriculture.
Quant à Michel Caillé, secrétaire général de la Fnsea 86, il réclame la démission pure et simple du ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll. « Les prix ne cessent de baisser, la pression des charges est énorme. On a besoin d’un électrochoc, d’un homme neuf qui puisse nous défendre au niveau européen. Stéphane Le Foll, lui, a complètement échoué ». « Il n’a amené aucune solution, n’a pas défendu notre métier. Il doit partir », ajoute Xavier Renaud, secrétaire général de la Fnsea 79.
Après être arrivés progressivement aux ronds-points de Poitiers-Sud, les manifestants y ont établi un barrage filtrant. De quoi énerver certains automobilistes. « Cela ne nous plaît pas d’embêter les gens dans leur quotidien mais si on veut se faire entendre, on n’a pas le choix. Globalement, le grand public nous comprend », souligne le président des JA de la Vienne Romain Martineau, ce qui a pu se vérifier sur le terrain. « Faut tenir le coup les gars », lâche un artisan taxi après avoir ouvert la vitre de son véhicule. « Vous avez raison de mener des actions. On fera la même chose d’ici peu », glisse un jeune chauffeur-livreur à un agriculteur lui distribuant un tract.
Les grandes surfaces visées
S’ils ne sont pas des réponses concrètes à leurs difficultés, ces messages de soutien ont apporté du baume au cœur des exploitants. Des certitudes plus que jamais bienvenues sur le bien-fondé de leur combat.
En début d’après midi, les agriculteurs ont levé le camp pour partir en cortège. Objectif : faire le tour de Poitiers en s’arrêtant devant chaque grande surface. « Il y en aura pour tout le monde », lance Michel Caillé. En moins de trois heures, les accès de toutes les grandes surfaces de la ville sont bloqués avec des pneus et des bottes de paille.
Au final, les automobilistes de Poitiers ont été bloqués, ou ralentis, jusqu’à 21h.
Les JA sur la brèche et un sentiment d’abandon
«Aucun résultat, aucun soutien ». Le ton est donné par Guillaume Mandin, administrateur de JA 79 et président de JA Poitou-Charentes, pour expliquer l’action dans la nuit du 3 au 4 février, à Niort. Une centaine de jeunes agriculteurs ont signé le déchargement de pneus, fumier, lisier, bâches… devant la mairie, la préfecture, le conseil départemental, la DDT, dont ils ont muré l’entrée. Le lendemain de cette manifestation, tout comme la semaine précédente, à Champdeniers, ou lors du blocage de la N10, « aucun appel des politiques », poursuit-il. D’où la poursuite des manifestations, qui traduisent autant de « manque de considération, d’attention à ce qui se passe dans la campagne », poursuit-il.
« Comment se fait-il que n’ayons pas plus de réaction que ça de la part des députés, sénateurs, conseillers départementaux », poursuit pour sa part Julien Chartier, président de JA 79. « C’est la preuve que l’agriculture est abandonnée au niveau local et national. Ils renvoient la balle à Bruxelles. Il faut que la partie de tennis s’arrête ».
« Seule Séverine Vachon, vice-présidente du conseil départemental, m’a appelé », rectifie-t-il. « Mais plutôt que de me parler des difficultés du moment, elle m’a parlé de Life outarde. On n’en veut pas ! », lui a-t-il répondu. Les jeunes attendent des réponses sur un point : « des prix ! ».
Depuis le début de la semaine, les syndicalistes sont « fortement » poussés par leur base. Réponse vraisemblablement cette fin de semaine.