La Fnpl consulte les éleveurs pour construire son argumentaire
Dans le cadre d’une tournée régionale qui aura duré un mois, la Fnpl, représentée par Marie-Thérèse Bonneau, faisait escale à Parthenay pour débattre de la stratégie syndicale à adopter face à l’organisation du marché dans laquelle la production s’est noyée.
À une « période stratégique » de la campagne et deux jours avant une nouvelle invitation des troupes à se mobiliser aux abords des grandes surfaces, (voir page 3), la vice-présidente vendéenne de la Fnpl, Marie-Thérèse Bonneau, était à Parthenay, pour « avoir un retour du terrain à propos de ce qui a été fait ou pas » et définir « ce qui est à engager dans les prochaines semaines. » Le moment est important, à l’approche de la traditionnelle vitrine annuelle parisienne de l’agriculture ainsi que des négociations sur les marques nationales entre la distribution et la transformation laitière. Les acteurs de l’aval et les pouvoirs politiques sont les cibles des messages que veulent crier les producteurs.
Charte des valeurs
« Vous verrez que, dans les bilans qu’ils présenteront, 2015 sera une bonne année pour les industriels », assure Marie-Thérèse Bonneau. Constatant que la volatilité défavorable est totalement répercutée aux fournisseurs des laiteries, elle appelle à une « législation française qui protège le maillon de la production », et que ce dernier soit pris en compte dans les négociations entre transformateurs et commerçants. La Fnpl souhaite voir les relations contractuelles régissant les produits transformés être modifiées par une « charte des valeurs. » L’idée est de remettre la valeur de la matière première lait dans la négociation et de la contractualiser entre les trois maillons. Pour les producteurs, ce serait un espoir de s’assurer que le coût de production est au moins couvert.
D’une manière générale, les représentants des producteurs dénoncent le manque de transparence qui caractérise les partenaires économiques. « Il n’est pas normal » qu’une organisation de producteurs n’a pas une vue sur le mix produit de l’entreprise qui établit les factures de ses fournisseurs. Idem pour la coopération : « être coopérateur sans connaître la stratégie de l’entreprise est ennuyeux. » Marie-Thérèse Bonneau poursuit : Un fonctionnement de coopérative où les coopérateurs ne décident pas, « ça se dénonce ! »
Côté pouvoirs politiques, tous les échelons sont dans le viseur des producteurs. Si, en Belgique par exemple, la distribution et la restauration hors domicile priorisent « un acte d’achat citoyen », en France, il semblerait qu’il y ait encore du travail à faire, auprès des collectivités notamment. Dans un cahier des charges, « écrire que la cantine doit s’approvisionner à moins de 50 km pour garantir un temps de transport inférieur à 4 heures, ce n’est pas anticoncurrentiel », illustre la vice-présidente.
Car le gendarme libéral européen est bien un acteur qui incite encore à l’immobilisme. Hors de question d’entrer dans un quelconque schéma d’entente. Faire en sorte que les producteurs obtiennent une valorisation de leur produit passera donc par d’autres mécanismes, qui ne verront le jour que si la pression syndicale s’exerce simultanément dans les bureaux et sur le terrain.
La France isolée
« Nous ne pouvons pas passer d’un système aussi cadré que les quotas à rien du tout. L’Europe, premier producteur mondial de lait, doit avoir une politique laitière » qui doit tendre vers un volume de production correspondant à la capacité commerciale. Sans quoi, l’année 2016, déjà mal engagée, ne sera pas plus favorable aux éleveurs que 2015. Mais dans une Europe où certains estiment qu’une crise est utile pour faire disparaître les outils les moins performants au profit des leaders, la France est isolée. Un petit signe d’espoir de changement subsiste néanmoins. Depuis que d’autres pays, dont l’Irlande, patrie du commissaire Phil Hogan, font état de la situation difficile des éleveurs, « j’ai l’impression que la crise n’est plus seulement française, mais est devenue européenne », ironise Marie-Thérèse Bonneau.