Revenu agricole 2012
Les écarts se creusent entre grandes cultures et élevage
Malgré une évolution positive en 2012 pour l’ensemble de la « ferme » France, les disparités se sont accrues entre les grandes cultures tirées par la bonne orientation des marchés et les productions animales qui n’ont pu répercuter l’augmentation des coûts de production.
Après un premier redressement en 2010, puis en 2011, le revenu de la ferme « France » a progressé une nouvelle fois de 9,4 % en 2012, pour s’établir à 38 300 euros par actif, selon la Commission des comptes de l’agriculture de la Nation. En 2012, calculé sur les trois dernières années, le revenu atteint son niveau historiquement le plus élevé. Mais cette tendance générale masque des évolutions contrastées selon les productions et les régions. L’année 2012 s’est en effet caractérisée par une nouvelle poussée des prix des céréales, oléagineux et protéagineux qui a profité aux exploitations de grandes cultures. En contrepartie, les coûts de production, notamment ceux de l’alimentation animale, se sont accrus et ont pesé sur les revenus des éleveurs. Par ailleurs les conditions climatiques assez défavorables de l’année 2012 (gel, intempéries du printemps et de l’été) ont eu un impact négatif sur les volumes des productions fruitières et viticoles.
Avec 76 500 euros en moyenne par actif non salarié, le résultat courant avant impôts de l’ensemble des exploitations de grandes cultures bat son record historique de 2007. Les moissons de céréales, même si elles n’ont pas été très abondantes, ont été dopées par les prix qui ont augmenté en moyenne de 20 %. Les prix des oléagineux et des protéagineux ont enregistré une évolution analogue qui a largement compensé la baisse de la sole et des volumes produits. Conséquence de ces évolutions favorables, l’augmentation du revenu des régions céréalières frôle, voire dépasse 50 % dans le Centre, l’Ile-de-France et la Haute-Normandie. La tendance est cependant moins marquée en Picardie (+30 %) et a fortiori dans le Nord-Pas-de-Calais, moins spécialisé et plus touché par des événements climatiques exceptionnels (inondations) fin 2012.
En 2012, les éleveurs d’herbivores ont été à nouveau confrontés à la hausse des coûts de l’alimentation animale, notamment celle des tourteaux. Les producteurs de lait ont en plus pâti du repli du prix du lait et de la collecte. Si bien que le revenu moyen des producteurs de lait s’est inscrit en net recul de 17,4 % à 24 700 euros. Dans les régions à forte empreinte laitière, le revenu des agriculteurs suit la même pente : -10 % en Basse-Normandie et en Lorraine et -3 % en Franche-Comté. Les producteurs de gros bovins résistent mieux malgré un repli des abattages et des exportations de bovins maigres. Au niveau national, le revenu moyen reste quasi stable à 17 100 euros (-0,6 %), mais se situe toujours à la moitié du revenu moyen de l’ensemble des exploitations. La situation des éleveurs d’ovins et de caprins est encore plus défavorable. Le revenu moyen national accuse une nouvelle baisse en 2012 après celle de 2011 et se retrouve à 16 500 euros (-14 %) à des niveaux observés dans les années 2008-2009.
Mauvaises conditions climatiques
En ce qui concerne le revenu moyen des producteurs de porcs, il a atteint 52 900 euros, en progression de 49 % sur l’année précédente grâce à une hausse des prix et malgré la flambée des coûts de l’alimentation du bétail. La situation est plus contrastée chez les aviculteurs. Le revenu s’affiche à 37 400 € en progrès de 23,4 %. Les producteurs d’œufs ont bénéficié de l’embellie des prix consécutive à la mise aux normes et au ralentissement de l’activité alors que les producteurs de volaille de chair ont subi une augmentation des coûts de production qui n’a pas été compensée par une revalorisation des prix.
Quant aux viticulteurs, ils ont dû faire face à de mauvaises conditions climatiques en 2012 qui ont frappé la plupart des vignobles. Il s’en est suivi une baisse historique des vendanges, à leur plus bas niveau depuis quarante ans qui n’a pas été comblée par la hausse des prix. Et malgré la mobilisation des stocks, le résultat courant avant impôts s’affaisse en 2012 à 32 800 euros par actif (-30,5 %).
Côté fruits, le gel et les intempéries qui ont sévi au printemps et à l’automne ont affecté la production notamment dans le Centre et en Poitou-Charentes. Néanmoins, la revalorisation des prix a permis de compenser la baisse des volumes : au final, le revenu des producteurs de fruits s’inscrit en hausse de 9,3 % à 27 100 euros. Pour les producteurs de légumes qui avaient subi de plein fouet la crise de l’E.coli en 2011, la situation s’est également améliorée : leur revenu remonte à 34 900 euros en progression de 94 % sur 2011 et de 20 % sur celui de 2010.
Céréaliers : la hausse sera effacée en 2013
Si les producteurs de céréales reconnaissent que l’année 2012 a été satisfaisante en termes de revenu, ils attirent l’attention sur le fait que cette hausse a été « totalement effacée » depuis. Le prix du blé a en effet perdu 25 % depuis novembre dernier et le maïs 28 %. « Le revenu en céréales et oléo-protéagineux pour 2013 sera beaucoup plus proche de la moyenne de toutes les exploitations », estiment l’AGPB et l’AGPM. Pour les céréaliers, « ces évolutions doivent inciter nos pouvoirs publics à décider d’une utilisation mesurée des marges nationales de redistribution intersectorielle des crédits de la Pac ». Avant d’ajouter : « il n’est pas dans l’intérêt de la France d’exposer son secteur céréalier à d’insurmontables distorsions de concurrence face à ses rivaux européens, notamment allemands ».
Les éleveurs de viande bovine au plus bas
La FNB observe une fois de plus que « les producteurs spécialisés bovins viande sont encore et toujours au plus bas des revenus en France », que cette situation « perdure depuis des années », et que rien ne permet de supposer à ce stade une réelle amélioration pour 2013. Les charges ont encore continué à progresser (+4 %), alors que les cours des bovins maigres sont inférieurs à ceux de 2012 sur les six premiers mois et que les cours des jeunes bovins ne sont en hausse que d’à peine 2 à 3 %. Certes, la revalorisation des prix des bovins est indispensable, estime la FNB, mais les pouvoirs publics et les élus politiques « n’ont d’autre choix que d’orienter prioritairement les aides de la future Pac vers l’élevage bovins-viande pour une revalorisation effective et conséquente des soutiens par exploitation ».
FNPL : utiliser la déclinaison nationale de la Pac
Alors que les comptes de l’Agriculture placent l’élevage laitier très en dessous de la moyenne nationale des revenus agricoles, la FNPL souhaite que le ministre de l’agriculture utilise les marges de manœuvre de la Pac en faveur de la production laitière. Il s’est d’ailleurs engagé à ce que « la priorité soit la redistribution des aides en faveur de l’élevage et de l’emploi », en soulignant que « certaines productions ont besoin de plus d’aides que d’autres ». Pour la FNPL, la production laitière en fait partie. D’ailleurs, le syndicat se montre favorable à la mise en place d’un paiement redistributif (surprime aux premiers hectares) et au couplage des aides. Surtout, la FNPL demande que l’enveloppe de couplage de 13 % des aides puisse servir à la mise en place d’une « prime significative à la vache laitière ». Celle des 2 % supplémentaires destinée à soutenir la production de protéines « doit pouvoir être fléchée pour les élevages laitiers ».