Les sangliers sévissent dans le secteur de Brigueuil
Josette et Gérard Bru sont exploitants à Saint-Junien en Haute-Vienne, mais un tiers de leurs terres se trouvent en Charente. Ces trente hectares de prairies qui bordent la forêt de Brigueuil sont régulièrement ravagés par les sangliers, qui viennent y faire des trous. Jean-François Boulesteix, éleveur à Brigueuil, subit le même préjudice.
«C’est bien simple : depuis ces dernières semaines, j’ai l’impression de ne faire que ça». «Que ça» fait référence au dossier d’indemnisation de dégâts de sangliers, que Gérard Bru, éleveur de 70 mères limousines à Saint-Junien, s’efforce de faire reconnaître. Pour cela, il a téléphoné partout : à la mairie de Brigueuil, à la société de chasse locale, à la Chambre d’agriculture de Charente, à la fédération départementale des chasseurs, à la Direction des territoires, à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage... Selon les interlocuteurs, il a eu le sentiment d’être plus ou moins écouté. «On a réussi à décrocher une battue. L’arrêté est pris pour un mois, alors on espère qu’il puisse y en avoir d’autres, en fonction des résultats de la première» confie Gérard Bru, conjoint-collaborateur sur l’exploitation de sa femme, Josette. Le couple est combatif. Il vaut mieux : il doit faire face au saccage régulier de ses trente hectares situés en bordure de forêt de Brigueuil depuis l’automne dernier. Et «trop, c’est trop...» tempête la cheffe d’exploitation de 54 ans. A ses côtés, son mari explique : «Vu l’ampleur des trous réalisés par les sangliers, en quête de nourriture et notamment de vers de terre pour compléter leur besoins en protéines, je ne sais même pas si nous allons pouvoir faucher ou mettre nos animaux dans ces prairies».
Jean-François Boulesteix : des champs "minés"
Jean-François Boulesteix, éleveur à Brigueuil, est leur voisin et subit la même punition. «Cela fait plus d’un an que j’alerte les chasseurs. Mes champs sont minés de haut en bas», soupire l’éleveur allaitant de 50 ans.
Les agriculteurs pointent notamment du doigt les deux chasses privées, qui s’étendent au coeur de la forêt de Brigueuil. Comme eux, ils sont une quinzaine d’agriculteurs à subir le même préjudice, sans arriver à se fédérer. «La plupart des exploitants sont dégoûtés», avance Jean-François Boulesteix comme explication à ce manque de combativité de leurs collègues.
Ce n’est pas le cas des Bru : ayant reçu la visite de deux experts mandatés par la fédération de chasse, dont ils doutent de l’impartialité, Gérard Bru a décidé de porter l’affaire devant la justice. Sur les conseils de son assureur Groupama, Josette et Gérard Bru s’engagent dans une procédure judiciaire à l’encontre de la société locale de chasse et de la fédération départementale des chasseurs : «C’est la seule façon de se faire indemniser».
Le temps presse : la procédure doit être enclenchée dans les six mois après l’apparition des dégâts. Et surtout l’herbe repousse dans les trous : «On les voit moins», regrette Gérard Bru. Et justement, assis au fond d’une de ces cuvettes creusées par des hardes de sangliers, les exploitants charentais et haut-viennois n’en perdent pas leur humour : «Au moins ici, on peut dire qu’on a investi dans de nouveaux troupeaux : les sangliers !»
Prise de conscience en Haute-Vienne
En Haute-Vienne, les organisations professionnelles agricoles ont pris le dossier des dégâts de sanglier en main. «Car le problème, s’il est plus important sur nos terres de Charente, touche aussi nos parcelles de Haute-Vienne. Mais ici, la fédération départementale des chasseurs est venue clôturer nos terres et la FNSEA 87 a décidé d’emmener le préfet au champ le 20 avril pour lui faire constater l’étendue des dégâts»