Portrait
Micheline Guérin veille au bien-être des autres
Présidente de la fédération départementale des MFR, Micheline Guérin cultive l’altruisme au quotidien. L’autre est son projet, qu’il soit en fin de vie ou en train d’ébaucher son parcours professionnel.
Micheline Guérin.
“Pour moi la bienveillance vis-à-vis des autres est importante. Je suis parfois très certainement naïve mais je cherche toujours le côté positif des événements et des personnes.” Cette phrase envoyée par mail suite à l’entretien, Micheline Guérin y tenait. De cette précision on se serait pourtant bien passé pour brosser son portrait tant sa bienveillance saute au cœur. En effet, en cette matinée barbouillée de gris, l’accueil réchauffe : café, biscuits tout juste sortis du four... Et Micheline de préciser : “Je savais que vous veniez alors...” Alors cette femme qui pèse ses mots mais n’économise pas ses attentions s’est mise aux fourneaux plus tôt ce matin. “Ce qui m’importe, c’est la qualité de la relation avec l’autre, préserver du mieux possible l’être humain est pour moi fondamental”, concède celle qui œuvre pour les autres à l’aube ou au soir de leur vie. Pour les premiers dans le cadre de son engagement au sein des Maisons familiales rurales (MFR) et pour les seconds, via le temps donné à l’association des malades de Parkinson ou à l’accompagnement en fin de vie. “Pour cela, j’ai suivi une formation à l’hôpital de Niort”, déclare celle qui aurait préféré soigner les hommes plutôt que les animaux. “J’ai récemment accompagné mon beau-frère lors de son dernier voyage et je pense que cela l’a apaisé. Je lui ai apporté un dernier moment d’amitié. Je peux affronter la mort, je pense savoir trouver les mots.”
Pourtant les mots, elle pense ne pas les avoir toujours trouvés lors de ses prises de parole en public. “Je ne voudrais pas revoir mes premiers discours. Au début de mon engagement au sein des MFR, je me suis fait violence pour prendre la parole. J’étais trop discrète”, souligne la bientôt septuagénaire aux yeux de l’Etat civil, à peine sexagénaire aux yeux d’un bon nombre de personnes à commencer par ceux d’Hubert, son mari. Une certaine élégance lui vole bien une dizaine d’années. “Je veux donner une bonne impression de moi, je ne me néglige pas”, confie-t-elle.
Mais si Micheline parle de débuts oratoires un peu boiteux, c’est ensuite au pas de course qu’elle a gravi les échelons des responsabilités. En 1981, alors qu’elle est agricultrice, installée avec son mari à Coudray, à Saint-Léger-de-la-Martinière, elle devient présidente de la MFR de Vitré puis de celle de Brioux-sur-Boutonne. “J’y suis allée avec zéro confiance en moi, c’est celui qui m’a sollicitée qui m’a convaincue.” En 2002, elle devient présidente de la fédération départementale des MFR et fait aujourd’hui partie du bureau de la fédération régionale.
A la veille de passer le relais pour laisser la place à “quelqu’un de plus jeune”, Micheline pense avoir apporté, avec son équipe, “une cohésion, une solidarité entre les MFR ainsi qu’un grand respect entre les personnes. En tant que présidente, je ne domine pas, je rassemble”. Citant pour preuve, les salles gavées de participants lors des réunions. Et de poursuivre : “Ma grande satisfaction est d’avoir œuvré pour la jeunesse. Le principe des MFR est de donner une chance à des jeunes qui ne trouvent pas leur place dans le parcours scolaire classique. Je me souviens d’un jeune qui a terminé ébéniste et heureux!”
Une grande satisfaction pour elle est de voir aujourd’hui des anciens élèves scolariser leurs propres enfants en MFR. “On se dit que l’on a bien fait même si on aurait pu faire mieux”, glisse-t-elle le timbre modeste. Et de décrire ensuite le triangle de la réussite pour un jeune :
“ Parents, maître de stage et formateur. Le socle familial est essentiel”.
Des engagements très formateurs
Micheline avoue que ces nombreux engagements lui ont apporté une certaine reconnaissance. “J’ai plus confiance en moi aujourd’hui et ces expériences ont été très formatrices”, avoue-t-elle, le regret d’avoir arrêté l’école à 14 ans encore coincé dans la gorge. “Apprendre me plaisait beaucoup mais j’ai dû arrêter. Mes parents avaient une exploitation laitière et j’ai dû bosser dur avec les hommes. Le travail physique m’a usée”, dit-elle. Le métier d’agricultrice ne l’épanouit guère à l’époque. A vingt ans, elle se marie avec Hubert et après s’être absentée quelque temps de l’exploitation familiale, le couple s’y installe en 1968. “J’ai alors apprécié ce métier au côté de mon mari, je me suis mise à la comptabilité.”Tous deux développent l’exploitation qui compte par la suite, en plus des vaches, des chèvres, du tabac, une poussinière... Tout cela plaît énormément à cette mère de trois enfants car “il y avait de l’animation, du monde à table durant les périodes d’ensilage”. Son besoin de voir du monde est alors assouvi comme paradoxalement, ce besoin parfois d’en être coupée grâce à la lecture. “Il y a trente ans, je me suis abonnée à France loisirs pour m’obliger à lire. Aujourd’hui, je lis avec plaisir tous les soirs.” Les livres de Colette qui lui tendent leurs pages sur l’étagère de la salle-à-manger lui offriront probablement ses prochains moments de bonheur, en marge de la réalité.