Mobilisation nationale du 3 septembre : les engagements des pouvoirs publics
Mobilisés depuis le début de l’été pour dénoncer la crise à laquelle ils font face, les agriculteurs de la FNSEA et de JA se sont réunis à Paris le 3 septembre pour une démonstration de force vis-à-vis des pouvoirs publics.
Avec une mobilisation supérieure aux attentes – plus de 1700 tracteurs place de la Nation au lieu des 1000 annoncés - les agriculteurs qui se sont rendus au Palais Bourbon et à Matignon sont partis confiants présenter leurs revendications. Pour la FNSEA et Jeunes agriculteurs mobilisés le 3 septembre, il ne s’agissait pas de demander à nouveaux des aides mais d’inciter les pouvoirs publics à prendre les mesures conjoncturelles et structurelles nécessaires pour permettre à l’agriculture française de rester compétitive face à ses voisins européens.
Aux députés : « être à nos côtés »
Devant la centaine d’agriculteurs présents devant l’Assemblée nationale, le président de la FNSEA Xavier Beulin a rappelé la nécessité d’avoir des députés « davantage à nos côtés sur les territoires ». « Que fait-on à l’Assemblée nationale depuis trop longtemps ? On légifère, on contraint, on nous appuie sur la tête ! », a-t-il souligné, rappelant qu’il n’était pas normal que le président de l’Assemblée nationale Claude Bartolone ne se saisisse que maintenant du problème. Pour la FNSEA et JA, des lois sont nécessaires par exemple en matière de simplification ou pour permettre aux agriculteurs de se regrouper pour construire des bâtiments.
Une soixantaine de députés étaient présents à l’extérieur (une trentaine de Républicains, une vingtaine de socialistes et quelques députés d’EELV) pour afficher leur soutien et dialoguer avec les agriculteurs. Emmenés par Xavier Beulin et Thomas Diemer, président de JA, la délégation est venue rencontrer le président de l’Assemblée pour demander un changement de méthode de travail en évitant notamment les excès de zèle français dans l’élaboration de nouvelles normes. « On ne demande pas un retour vingt ans en arrière au niveau environnemental », a expliqué Michel Dauton, agriculteur en Pays de la Loire, à la sortie du rendez-vous. La demande principale était surtout de faire en sorte « qu’avant toute nouvelle norme, il y ait une estimation en matière de coût social, et une approche au niveau de la faisabilité dans la pratique de notre métier ». « Aujourd’hui, on est ensevelis sous les lois », dénonce Adrien de son côté, un JA de la délégation venu exprimer son « réel espoir de rester dans les campagnes ». Le message a visiblement été entendu par le président de l’Assemblée Nationale Claude Bartolone qui s’est engagé, à l’issue de la rencontre, à faire pression au niveau législatif pour éviter l’excès de normes.
Le gouvernement renforce le plan de soutien
Une délégation s’est ensuite rendue à Matignon où les agriculteurs ont discuté pendant près de deux heures avec le Premier ministre Manuel Valls, en présence de Stéphane Le Foll. « Je veux dire au monde paysan que la France ne lâchera pas ses agriculteurs. Désespoir, humiliation, colère, nous les entendons. Nous y répondons. C’était l’objectif du plan de soutien de juillet. C’est l’objectif des mesures complémentaires que nous venons de prendre », a annoncé à l’issue de la rencontre le Premier ministre. Ce dernier n’a pas ménagé l’emphase pour qualifier son soutien aux agriculteurs, leur adressant « un message d’amour, un message très fort et sincère : vous avez le soutien de toute la Nation ». Un soutien qui entend se traduire dans les faits par un renforcement du plan de soutien à l'élevage, à travers l'augmentation des crédits d’urgence annoncés en juillet : les prises en charge des intérêts d’emprunt atteignent à présent 100 millions d’euros pour 2015, et les prises en charges des cotisations sociales sont élevées à 50 millions d’euros. Pour permettre la restructuration de la dette des éleveurs, une année blanche (report total des annuités de 2015) sera proposée, et le Fonds d’allègement des charges (FAC) sera augmenté, a promis Manuel Valls. Pour faire baisser les charges des agriculteurs, la cotisation minimum maladie sera alignée sur le régime des indépendants, soit « dès cette année, une baisse de près de 500 euros » pour les petites exploitations, a souligné le Premier ministre, ajoutant par ailleurs, qu’« un chantier sera ouvert pour que la fiscalité agricole prenne mieux en compte la volatilité des prix agricoles ». Au-delà de ces mesures d’urgence, le Gouvernement prévoit de faire passer les soutiens publics à l’investissement à 350 millions d’euros par an pendant trois ans, en partie via les régions qui gèrent à présent le deuxième pilier de la PAC. « Chaque année, un milliard d’euros permettra de soutenir l’investissement dans les exploitations », a précisé Manuel Valls qui n’a pas manqué de souligner, en référence au montant demandé par Xavier Beulin, que « ce sont donc au total trois milliards d’euros en trois ans qui pourront être investis dans l’agriculture et l’élevage français ».
Si le moratoire d’un an sur les normes, demandé par la FNSEA et JA, n’a pas été obtenu, le gouvernement a cependant promis que d’ici février, « aucune mesure nationale allant au-delà des obligations européennes ne sera prise ». Les professionnels agricoles seront associés beaucoup plus en amont dans l’élaboration des nouvelles règles, a également promis le Premier ministre en parlant de « nouvelle méthode ». Manuel Valls a également évoqué le conseil des ministres de l’Agriculture européens qui se tient le 7 septembre à Bruxelles. « Nous défendrons des mesures à effet immédiat pour faire remonter les prix : relèvement du prix d’intervention du lait, action en faveur de l’exportation, assouplissement de l’embargo sanitaire russe, notamment sur le porc », a-t-il précisé. Là encore, les agriculteurs seront présents pour défendre leurs revendications au niveau européen.