Dossier aviculture
Pas d'avenir dans la filière sans investissements dans la production
Alexis Baillargeau, président de la section avicole de la Fnsea 79 estime que les éleveurs ne doivent pas être oubliés dans le plan d’avenir pour la filière. Revenu et liberté d’entreprendre sont des priorités.
Dans quelle situation se trouvent les éleveurs avicoles actuellement ?
La conjoncture est plutôt favorable en ce moment pour la production de poulet, que ce soit sur le marché intérieur ou à l’export. A contrario, le marché de la dinde est engorgé. Il y a beaucoup de stock, ce qui entraîne une forte pression à la baisse des prix. Par ailleurs, ce qui est positif, c’est que le cours des matières premières baisse depuis plusieurs semaines. Dans ce contexte, les producteurs qui avaient accepté en début d’année que les prix de reprise baissent sur 2 à 3 lots d’animaux seulement attendent de voir si les industriels tiendront paroles. Enfin, nous pouvons avoir des craintes pour les prochains mois. Il semblerait que les GMS font pression dès à présent sur les industriels pour baisser les prix de vente en utilisant l’argument de la baisse des prix de l’aliment. Ceci est intolérable. Il n’est pas possible d’appliquer une baisse alors qu’il a fallu des mois pour tenir compte de la hausse du prix des céréales.
Concernant spécifiquement les producteurs Doux, comment jugez-vous la situation ?
Ce n’est plus le dossier Doux mais la saga Doux ! Même si la perspective d’une reprise par Didier Calmels permet d’entrevoir une lueur d’espoir sur ce dossier, pour le moment, on est dans le flou total quand aux décisions qui seront prises. Par ailleurs, depuis plusieurs semaines, Doux propose à ses producteurs une modification de contrat. Cette modification permettrait selon les dires de l’entreprise, de garantir les mêmes conditions de revenu aux producteurs mais pour cela ils devront faire un lot de plus par an ! Nous sommes loin du slogan « Travailler plus pour gagner plus ». Chez Doux, ils en ont fait du « Travailler plus sans gagner plus ». C’est insupportable.
Un plan d’avenir pour la filière est en cours d’élaboration, qu’en pensez-vous ?
Pour garantir un avenir à cette filière, il faut d’abord investir dans le maillon de la production. Certains ont oublié que sans éleveurs, les abattoirs fermeront et que les salariés employés dans ce secteur seront tous au chômage. S’il y a un acteur à renforcer selon moi, c’est bien l’éleveur. Il faut qu’on lui donne les moyens d’augmenter sa production de manière conséquente. Cela veut dire du revenu et de la liberté d’entreprendre. Par liberté d’entreprendre, je veux dire qu’il faut arrêter de mettre des bâtons dans les roues (environnementaux, urbanisme, procédure) de ceux qui veulent investir dans l’act de production en France. Ce n’est pas soutenable. Par ailleurs, il faut que ce plan permette de pérenniser la filière exportatrice française. Pour cela, au-delà de soutenir la production, il faudra aussi faire évoluer la politique monétaire européenne actuelle qui, avec un euro fort, nous pénalise sur les marchés à l’export. Il faut aussi qu’on développe nos débouchés sur le marché français. À ce titre, il faut que nos outils industriels soient économiquement performants et commercialement puissants. Au vue de la différence de résultat entre l’un des grands groupes privés et bon nombre des coopératives françaises, on peut douter de la force économique et commerciale de certains de nos groupes.
Propos recueillis par
damien beaumard