Interview
Producteurs et transformateurs alliés dans le développement du bio
Jeudi 6 mai, Agrobio Poitou-Charentes tenait un conseil d’administration électif. Patrick Dauron, issu du GAB 17, a pris la présidence. Interview.
Patrick Dauron, vous êtes agriculteur en Charente-Maritime. Quel est votre parcours ?
J’ai 62 ans. Je suis céréalier dans les environs de Tonnay-Boutonne en Charente-Maritime. Il y a un peu plus d’un an, l’exploitation comptait également un atelier laitier. Après trente ans d’astreinte, nous avons décidé avec mon épouse de vendre les vaches pour nous dégager un peu de temps. A l’époque, j’étais président du GAB 17.
Vous passez de la présidence du GAB 17 à celle d’Agrobio Poitou-Charentes. Quelles sont vos ambitions pour cette structure régionale ?
2009 a été une année charnière. 2010 lui emboîte le pas. Sur ces deux dernières années, on sent un intérêt grandissant pour l’agriculture biologique. Après une longue période de stabilité, le nombre des agriculteurs labellisés augmente de manière significative. Les conversions progressent de 20% sur 2009 et début 2010. Notre objectif est bien entendu de maintenir cette dynamique. Pour ce faire, Agrobio Poitou-Charentes travaille sur plusieurs dossiers et notamment la mise en place du pôle conversion. Il s’agit, à l’image du Point info installation, de rassembler tous les acteurs du monde agricole susceptibles d’intervenir dans le cadre d’une conversion à l’agriculture biologique. Ensemble, et dans l’intérêt des futurs producteurs bio, les différents organismes de développement, économiques, de gestion, construiront et partageront les outils qui permettront aux exploitants de se projeter, d’envisager sereinement leur avenir.
En théorie, il suffit aujourd’hui de cocher des cases sur le dossier PAC pour devenir agriculteur bio. Mais la réalité est tout autre. Pour que la production biologique s’impose, nous n’avons pas le droit à l’erreur. Les gens qui s’engagent dans le respect du cahier des charges doivent réussir économiquement. Nous devons, tous ensemble, nous donner les moyens de les aider techniquement.
Vous évoquiez plusieurs priorités. Quelle est ou quelles sont les suivantes ?
L’équipe d’Agrobio Poitou-Charentes a travaillé au cours de l’hiver à une étude prospective. Un groupe de réflexion a œuvré avec le soutien d’un cabinet privé. De ce travail sont nés six scénarios de développement de l’agriculture biologique. Certains sont plus probables que d’autres. La disparition pure et simple, comme le maintien d’un modèle qui resterait confidentiel parce qu’élitiste ou utopique, sont invraisemblables.
Pour décider de ce que sera l’agriculture biologique demain, nous devrons mettre les moyens pour l’un des trois autres schémas. Pour savoir sur lequel miser, nous présentons ce travail dans les quatre départements depuis le début du mois de mai. Les agriculteurs sont appelés à exprimer leur point de vue. Quel avenir souhaitons-nous à l’agriculture biologique : un avenir qui dépende des entreprises de négoce international, ou encore de la GMS via le développement des marques distributeurs, ou bien un avenir qui passera par une association entre producteurs et transformateurs au profit d’un développement en région ? Majoritairement, les exploitants se prononcent pour ce dernier.
Si l’on reprend les objectifs nationaux, 20% de la SAU nationale devrait être convertie à l’agriculture biologique d’ici à 2020. Comment tendre à cet objectif, tout en maîtrisant le développement ?
- En Poitou-Charentes, si la tendance se confirme, 6 % de la SAU régionale sera convertie d’ici 2020. Si tout se déroule bien, peut-être serons-nous à 10%. 20% me semblent improbables pour différentes raisons. Il faut trouver les agriculteurs motivés, intéressés. Il faudra également trouver des moyens. Dans les GAB, les salariés sont surbookés. Le développement de ce modèle agricole ne se fera pas sans miser sur le conseil technique.