Congrès FNSEA
Renforcer l’efficacité du syndicalisme agricole
Les congressistes affichent une grande fermeté sur la question de l’avenir de la PAC et lancent les fondations d’un nouveau syndicalisme « pour mieux rassembler et agir ».
La FNSEA a choisi la Bourgogne pour tenir son 64e congrès (du 30 mars au 1er avril), au parc des expositions d’Auxerre dans l’Yonne. Une forte participation : plus de 750 congressistes, délégués syndicaux, soit cent de plus qu’en 2009 à Poitiers, y sont inscrits.
Traditionnellement temps fort pour l’organisation syndicale, ce 64e congrès revêt cette année un caractère encore plus particulier « du fait de la conjoncture agricole et de l’ambiance syndicale sur le terrain », comme l’a souligné, devant la presse, le président Jean-Michel Lemétayer. « Ce congrès 2010 intervient après une année 2009 « chaude » sur le plan syndical, mais aussi une année désastreuse avec une conjoncture extrêmement dégradée dans tous les secteurs de production qui s’est traduite par un effondrement du revenu des paysans ».
Les difficiles débats franco-français autour du bilan de santé de la PAC, les congrès 2009 de la FNSEA et des JA marqués par l’expression de désaccords, la crise laitière depuis plus d’un an, l’action vérité de la FNSEA sur les marges de même que les rassemblements d’octobre…, l’organisation syndicale a connu une année mouvementée. « Ces événements ont interpellé sur le terrain et ont mis en avant le besoin d’écoute, d’explication, d’accompagnement des agriculteurs (…). Il s’agit de nous pencher sur notre fonctionnement, sur notre organisation et sur l’avenir de notre syndicalisme à la fois revendicatif et responsable pour explorer toutes les voies possibles pour améliorer l’efficacité de la FNSEA », souligne le président de la FNSEA. Le rapport moral 2010 intitulé « un syndicalisme responsable pour rassembler et agir », présenté par les secrétaires généraux et débattu par les congressistes le mercredi 31 mars, tente de répondre à la question « quel rôle pour notre syndicalisme majoritaire demain ? ».
Pour clôturer cette première journée de congrès, l’industriel français Vincent Bolloré a été choisi comme grand témoin. « Symbole d’une réussite exceptionnelle dans un contexte difficile », parti de la fabrication de papier à cigarette (OCB) et papiers spéciaux, il fabrique aujourd’hui des voitures électriques, s’intéresse aux médias avec une chaîne de télévision et des journaux gratuits… « Nous avons des leçons à retenir de cet homme, devenu vrai capitaine de l’industrie ».
Arrêter les consensus mous
La crise des marchés et leur régulation, ce qui va se passer en Europe et la future PAC qui va se mettre en place…, toutes ces questions sont au cœur des débats de ce congrès à Auxerre. « Ce qui sera décidé pour 2013 se prépare aujourd’hui », commente le leader syndical. Jeudi 1er avril, au cours d’une table ronde sur « l’avenir de la Politique agricole commune », des partenaires syndicaux européens anglais, allemands, irlandais, hongrois, espagnols participent au débat en expliquant leur vision de l’avenir. Le Commissaire européen à l’Agriculture, Dacian Ciolos, retenu à Bruxelles, participe aussi à ce débat avec une intervention enregistrée en vidéo. Sur la question cruciale de la future PAC, le président de la FNSEA ne mâche pas ses mots : « Tout le monde sait que c’est au niveau européen que les choses vont bouger. Il faut éviter que la politique agricole, mise en œuvre après 2013, ne soit que la résultante d’orientations budgétaires. Au président de la République de démontrer jusqu’où la France peut aller dans ce sens et j’espère qu’il ira jusqu’au bout. Il faut arrêter les consensus mous où les consensus où on se couche… La France a la nécessité de redresser la tête et d’avoir des exigences ». Pour le président de la FNSEA, il s’agit de définir ce que les agriculteurs peuvent espérer ou non d’une politique agricole d’après 2013. Le ministre de l’Agriculture viendra clôturer le congrès de la FNSEA : « J’attends de lui qu’il nous dise clairement ce qu’il met derrière le mot régulation ».
« Améliorer notre fonctionnement pour faire aboutir nos revendications »
Selon Dominique Barrau, secrétaire général de la FNSEA, « le rapport des Français avec leur agriculture a changé ». Les consommateurs sont plus sensibles qu’ils ne l’étaient autrefois aux préoccupations des agriculteurs, mais aussi plus attentifs aux questions environnementales. A contrario, du fait de la perte du poids démographique de l’agriculture, il y a beaucoup moins d’élus agricoles ou ruraux sur lesquels les organisations agricoles peuvent s’appuyer. Conclusion : « Nos méthodes de sensibilisation » doivent changer, insiste-t-il.
Les agriculteurs eux-mêmes n’entrent plus en militantisme comme on entre en religion. Ils sont devenus « zappeurs » en fonction de leur situation familiale ou d’autres préoccupations… Ce qui n’est pas sans poser de questions à une organisation qui essaie de concilier un positionnement à la fois responsable et revendicatif et une vision à long terme. Alors que la notion de court terme et d’événementiel prévaut, que l’information circule de plus en plus vite et que beaucoup d’agriculteurs de base attendent des réponses immédiates.
Autant de questions qui interpellent le syndicalisme majoritaire sur les nouveaux moyens d’intervention à mettre en œuvre, la réorganisation du réseau pour être plus proche des décideurs notamment au niveau régional et plus pertinents vis-à-vis du monde associatif et environnemental qui influe fortement sur l’opinion de la population et des élus.