Jeune producteur de lait de vache en Deux-Sèvres
Reprendre et moderniser, pour faire rempart au lait étranger
En reprenant la ferme familiale à La Chapelle-Bertrand, Clément maintient le fragile tissu des exploitations laitières deux-sévriennes. Pour s’installer, il a réalisé un gros investissement intégrant deux robots de traite. Une stratégie payante.
En reprenant la ferme familiale à La Chapelle-Bertrand, Clément maintient le fragile tissu des exploitations laitières deux-sévriennes. Pour s’installer, il a réalisé un gros investissement intégrant deux robots de traite. Une stratégie payante.
Après ses études agricoles, Clément Charron, 28 ans, a commencé par regarder ailleurs : il a travaillé en ovins, en porcins… Mais quand son père commence à évoquer sa retraite, le jeune homme a un déclic : « il faut faire quelque chose » réagit-il, de façon quasi épidermique.
A l’époque, en 2015, l’Earl de Jacky et Marie-Annick, ses parents, tourne avec un troupeau de 45 prim’Holsteins, pour une SAU de 76 ha. Les bâtiments sont vieillissants, l’environnement laitier est à la déprise générale. « Avant le camion de lait était comme le facteur, il s’arrêtait dans toutes les fermes, témoigne le père de Clément. Aujourd’hui nous ne sommes plus que quatre à faire du lait dans le secteur (La Chapelle, Baulieu, Pompaire). Les quotas laitiers nous ont empêchés d’investir ».
"Agrial nous a soutenu, et alors les banques ont accepté de nous suivre".
S’il n’envisageait pas, au départ, les robots de traite comme moyen de production, Clément change son fusil d’épaule après une visite de ferme en Vendée : « L’organisation avec une aire paillée et une aire d’attente m’a convaincu ». Ayant engagé son parcours à l’installation avec la chambre d’agriculture, l’éleveur voit l’étude de faisabilité de son projet échouer. « Un robot Lely d’une capacité de 750 000 l ne suffisait pas pour tenir l’objectif de production. Avec deux, ça passait ». Convaincre les banques a pris six mois, pour un investissement de près de 700 000 euros à amortir sur 20 ans. « L’investissement comprend les robots d’occasion, la construction et l’aménagement de la stabulation, une fumière de 600m2 et un silo de 55 m sur 14 m. Agrial nous a soutenu, et alors les banques ont accepté de nous suivre. Cependant, la flambée des prix du fer et de la mousse polyuréthane a occasionné un surcoût de 20 000€. Pour le réduire, nous avons réalisé une grosse partie des travaux nous-mêmes ».
Quand il suit le tableau de bord des robots depuis son bureau, Clément ressemble un peu à un commandement de bord. La production, avec 38kg/VL de moyenne, donne plus que satisfaction. « Nos choix ont payé. Après, on ne peut pas dire que les robots font gagner du temps, mais ils en libèrent pour d’autres tâches. Notre suivi sanitaire par exemple s’est beaucoup amélioré et c’est un plus pour la production. Pour que la maintenance ne soit pas trop coûteuse, nous faisons les réparations guidés par téléphone ».
« C’est dur de faire tout ça, et de voir qu’on touche au final une retraite équivalente au RSA, prévient Jacky Charron. Mais c’est nécessaire. Sinon demain, on ira chercher le lait à l’étranger, dans les pays de l’Est ».
Dans la stabulation, les vaches affichent des formes généreuses et beaucoup d’indépendance : elles passent au robot à leur guise et s’accordent même le plaisir se gratter le dos sous les deux brosses à leur disposition ! « Nous avons fait beaucoup pour leur bien-être, souligne Marie-Annick. La toiture est isolée avec des panneaux sandwichs, nous avons fait installer des ventilateurs, des tapis caoutchouc dans les aires d’exercice et d’attente… ».
Clément, qui est aussi devenu papa il y a deux ans, est officiellement installé avec ses parents depuis 2019. Il espère pouvoir être rejoint bientôt par sa femme, salariée en caprins dans une autre exploitation. « Mes parents m’ont trouvé un peu fou de reprendre leur activité, mais j’ai bien vu aussi la petite lueur de joie dans leurs yeux ». Conscients que le contexte est difficile, et que l’investissement humain et financier est lourd dans le métier, Clément et ses parents estiment que ce sont des choix à faire pour préserver l’agriculture locale. « C’est dur de faire tout ça, et de voir qu’on touche au final une retraite équivalente au RSA, prévient Jacky Charron. Mais c’est nécessaire. Sinon demain, on ira chercher le lait à l’étranger, dans les pays de l’Est ».
3 équivalent temps plein
110 vaches laitières
120 ha de SAU (60ha de maïs dont 35 irrigués, 30 de blé, 15 de sorgho, 15 de ray grass)
2 robots Lely des années 2010
1,2 million de litres de lait produits (objectif de 1,5 pour 2022)
37-38 de rendement moyen par vache (34TP et 40TB)