Salarié handicapé à la ferme : une aventure humaine
Éleveur de chèvres à Thouars, Olivier Danel a embauché en CDI Louis-Malo, jeune adulte présentant des troubles cognitifs. Un parcours enrichissant humainement mais complexe, mené de front avec la famille du salarié ainsi que des structures d'accompagnement spécialisées dans le handicap.
Éleveur de chèvres à Thouars, Olivier Danel a embauché en CDI Louis-Malo, jeune adulte présentant des troubles cognitifs. Un parcours enrichissant humainement mais complexe, mené de front avec la famille du salarié ainsi que des structures d'accompagnement spécialisées dans le handicap.
Louis-Malo, 18 ans, est un salarié épanoui, et motivé ! Debout dès 5 h 30, il rejoint une ferme caprine tous les matins dans sa Citroën AMI sans permis.
Pour une durée de 113 h par mois, il assiste Olivier Danel, éleveur à Thouars, en assurant des tâches simples, mais indispensables à l'élevage : alimentation du troupeau, paillage, nettoyage, manutention, saisie des animaux pour les vaccins...
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L'inclusion plutôt que l'Esat : ce parcours du combattant
C'est autour des quinze ans de Louis-Malo que la rencontre avec Olivier s'est nouée. "Nous cherchions un stage pour notre fils, alors en MFR à Bressuire, raconte son père Damien Fouquet. En discutant avec des producteurs chez qui nous achetons nos légumes, nous avons entendu parler d'Olivier, qui serait ouvert à accueillir notre fils."
Louis-Malo présente depuis l'enfance des troubles cognitifs qui l'empêchent de se concentrer longtemps, de lire et d'écrire, ou encore de tenir des propos "de grandes personnes sérieuses" aurait dit le Petit prince de Saint-Exupéry.
"Quand l'opportunité d'être en stage chez Olivier Danel s'est concrétisée, nous avons voulu savoir si des dispositifs existaient à la chambre d'agriculture ou en MFR pour accompagner le handicap. Il y avait tout à faire, se souvient le papa de Louis-Malo. L'inclusion, c'est un parcours du combattant. Et quand on a un autre projet avec son enfant que l'Esat, il faut se retrousser les manches !".
Du temps pour lancer les choses
Louis-Malo se présente à l'exploitation d'Olivier pour un stage en 2021. Il y deviendra par la suite apprenti, parvenant même à décrocher son CAP agricole, puis sera embauché en CDI en 2023. "J'ai vu arriver un garçon tout en force et en sourire. Très timide au départ, mais dont le lien d'affection avec les animaux était évident", retrace l'éleveur.
Organiser le travail de Louis-Malo n'est toutefois pas simple, explique Olivier : "Il faut lui expliquer très précisément ce qu'il a a faire et ne pas lui confier plusieurs tâches à la fois. Nous avons essayé plusieurs fois la traite, mais il y a trop de paramètres à prendre en compte pour lui. Par contre, pour remplir les seaux de ration, ou pour attraper les animaux pour les peser par exemple, Louis-Malo excelle".
Autre aspect à vigiler pour le gérant d'exploitation : l'intégration du nouveau salarié, avec sa différence, auprès des autres salariés de la ferme. "Cela n'a pas été simple pour certains de partager les temps de pause avec Louis-Malo, voir simplement de travailler ensemble dans une ambiance agréable. Ma salariée actuelle l'accueille bien, et comprend son fonctionnement, ils ont de bons échanges car Louis-Malo, une fois en confiance, partage énormément. Elle dit que c'est un plaisir de travailler avec lui !"
"Il faut lui expliquer très précisément ce qu'il a a faire et ne pas lui confier plusieurs tâches à la fois. Nous avons essayé plusieurs fois la traite, mais il y a trop de paramètres à prendre en compte pour lui. Par contre, pour remplir les seaux de ration, ou pour attraper les animaux pour les peser par exemple, Louis-Malo excelle".
L'accompagnement de Cap Emploi
Dans un esprit coopératif, la famille de Louis-Malo et Olivier Danel ont cherché les structures à mettre autour de la table pour pérenniser l'emploi du jeune salarié. Cap Emploi, organisme de placement spécialisé dont l'une des missions est de garantir l'accès à l'emploi et aux formations des personnes reconnues handicapées, a joué le jeu dès la période d'apprentissage de celui-ci. "
En lien avec la structure spécialisée Espoir 79, nous évaluons les besoins du travailleur handicapé pour adapter son poste avec les aménagements nécessaires. Nous accompagnons autant le salarié que son employeur lors de bilans réguliers", pose Anna Benot, chargée des relations entreprises à l'antenne de Bressuire et Thouars.
Des aménagements, conduits avec ou sans l'expertise de la structure, ont aidé Louis-Malo dans sa progression professionnelle : mise à disposition d'un ordinateur personnel pour passer son diplôme, accès à un logiciel qui lit à haute-voix les SMS...
Une compensation possible
Cap Emploi est aussi la porte à pousser pour connaître les aides et compensations existantes quand on emploie un salarié TH. Sur prescription de Cap Emploi, l'association Espoir 79 évalue les difficultés liées au handicap et les besoins de compensation financières liées aux tâches réalisées.
"Le dossier met plusieurs mois à aboutir, mais au final, 40 % du salaire de Louis-Malo me seront reversés, indique Olivier Danel. Ce que je gagne surtout, c'est un salarié ponctuel et investi dans ses tâches, qui arrive tous les matins avec un grand sourire et l'envie de bien faire".
Pour Olivier, touché depuis quelques années par la maladie de Lyme qui le fatigue, la force physique de Louis-Malo tombe à point-nommé : "on se complète !". Quand au handicap, la vision de l'éleveur est claire dessus : "Il faut laisser sa chance à ces salariés. On peut tous être touchés un jour par le handicap, dans sa famille ou soi-même".
Les aides activables
L'ACCEA
C'est une prestation d'appui à la compensation du handicap en formation, qui est sollicitée auprès du Centre ressource formation handicap. Elle permet à une personne en situation de handicap d'intégrer une formation professionnelle de droit commun (financement Région ou France Travail - ex Pôle Emploi) ou un contrat d'apprentissage dans des conditions adaptées à son handicap,
Le Contrat Initiative Emploi (CIE)
Le CIE permet aux employeurs d'embaucher des jeunes (moins de 26 ans) tout en profitant d'une aide financière.
En parallèle du contrat, Cap Emploi 79 met en place une aide à la recherche et à la mise en œuvre de solutions pour le maintien dans l'emploi des salariés handicapés. Elle est financée à hauteur de 2100 € par l'AGEFIPH (Association de Gestion du Fonds pour l'Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées). Un expert spécialisé (Espoir 79 pour les troubles du neurodéveloppement et psychiques) identifie les conséquences du handicap sur l'activité professionnelle et les moyens de le compenser.
Infos : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F21006
La reconnaissance de la lourdeur du handicap (RLH)
Cette aide a pour objectif de compenser financièrement les charges importantes supportées par une entreprise du fait des conséquences du handicap d'une personne sur la tenue de son poste après mise en place de l'aménagement optimal de la situation de travail. L'employeur ou le travailleur non salarié doit constituer une demande de Reconnaissance de la Lourdeur du Handicap au moyen d'un formulaire à retrouver sur le site www.agefiph.fr
Contacts utiles : Cap Emploi 79 - 05 49 79 99 77 - capemploi-79.com - Agefiph - 0 800 11 10 09 (gratuit depuis un poste fixe) - MSA Poitou - poitou.msa.fr/lfp/handicap - Espoir 79 - espoir79@udaf79.asso.fr