Un budget contraint pour la Chambre d'agriculture de Charente
La Chambre d'agriculture de Charente est l'une des rares compagnies consulaires agricoles, dirigées par le syndicat de la Corordination Rurale. Interview de son président, le viticulteur Xavier Desouche.
Qu’en est-il du budget de la chambre d’agriculture pour l’année 2015 ?
Xavier Desouche : Nous faisons une bonne année puisque nous terminons avec 99 700 € de bénéfice. Nous avons eu des charges en baisse de 3 %. On fait attention partout. Les charges de personnel sont en baisse, celles de fonctionnement, légèrement aussi. En recettes, nous avons fait 112 000 € de prestations de services en plus que le prévisionnel. C’est lié à la nouvelle PAC et aux MAE mais aussi au plan « Rebondir » mis en place pour relancer les prestations. Cette année, sur la PAC, nous avons fait des recettes supplémentaires mais nous avons aussi embauché du personnel intérimaire. Au final, on a fait une PAC quasiment à zéro.
A combien s’est élevée la ponction sur le fonds de roulement ?
X. D : A 977 000 € ! Alors que nous mettions de l’argent de côté pour faire de gros travaux sur notre bâtiment principal à Angoulême, on ne fera pas tout ce qui était prévu. On se posait la question de refaire ce bâtiment pour le mettre aux normes. On ne se pose même plus la question. Nous n’en avons plus les moyens ! On a provisionné pour le budget de l’an prochain une part de travaux de 60 000 à 70 000 €, notamment pour régler des problèmes de toiture et d’infiltration d’eau.
La chambre a aussi voté le rachat du pôle viticole à Segonzac. Qu’elle a été votre réflexion sur ce dossier ?
X. D : Il est inclus dans les comptes. Il va nous coûter 735 000 €, comprenant le prix d’achat à la communauté de communes de la Grande Champagne (650 000 €) et divers frais notariés et une partie de TVA non récupérable. Notre réflexion a été de plusieurs ordres. Nous avons été ponctionnés sur notre fonds de roulement car il dépassait les 90 jours. En faisant l’achat du pôle de Segonzac, en auto-financement pour une partie, et à l’emprunt pour 200 000 €, cela fait tomber notre fonds à 80 jours. Par ailleurs, lorsque nous avons regardé toutes les conventions et les baux, cela ne nous allait pas. Nous avions un coût annuel de 37 000 € indexé. En plus, il y avait une clause très dangereuse pour la chambre qui devait s’engager à faire l’entretien du gros œuvre. Notre volonté est aussi de maintenir un pôle viticole départemental très fort dans cette nouvelle grande région qui se dessine. Je veux que le pôle viticole charentais garde sa spécificité en vins à eaux-de-vie.
Comment se présente le budget 2016 ?
X. D : Nous n’avons aucune visibilité. C’est pour cela que l’on a fait un budget prudent avec beaucoup de sécurité. On ne sait pas trop comment va s’appliquer la loi NOTRe. Nous avons aussi anticipé une baisse des prestations, car nous aurons moins de MAE. Avec la crise agricole générale, on peut s’attendre à ce que les agriculteurs recourent à minima les services extérieurs.
Quel risque fait peser la loi NOTRe sur le budget de la chambre ?
X. D : Nous avons une convention avec le conseil départemental pour un ensemble de missions qui tourne autour des 500 000 €. La loi NOTRe risque d’interdire les aides aux entreprises. Comment est considérée une chambre d’agriculture ? Pour certains comme une entreprise, pour d’autres non. La lecture est compliquée. La loi n’est pas encore ficelée. Je pense qu’on aura du mal à y voir plus clair avant fin 2016. Par prudence, on a prévu un budget initial 2016 déficitaire de – 141 000 €. Le budget initial 2014 était déficitaire de – 70 000 € et nous avons fini en positif. On espère faire pareil. Si demain, nous n’avons plus la subvention du département, il va falloir réfléchir à une réorganisation totale et on devra arrêter plein de missions. Soit on retrouve une partie des subventions auprès de la Région, soit on n’arrivera pas à maintenir l’ensemble du personnel. Ce n’est pas possible ! Pour nous, 500 000 € correspondent à 9 ou 10 équivalents temps plein. Sur un budget de 7 millions d’€, 4 millions sont consacrés aux frais de personnel.
Vu les contraintes budgétaires du département, vous risquez d’avoir de toute façon une baisse de ces aides ?
X. D : C’est pour ça que nous avons pris des mesures globalisées pour anticiper l’ensemble des baisses, comme celles qui pourraient venir de FranceAgrimer ou du Casdar. On se rend compte que le conseil départemental a baissé les subventions d’une bonne partie des associations de 10 %.
Ces contraintes budgétaires accrues au niveau départemental, ne vont-elles pas favoriser le processus de régionalisation des chambres d’agriculture ?
X. D : Certains le voient comme cela, comme l’APCA. Ce n’est pas ma vision, ni celle de certains autres présidents de chambre. Nous allons devoir faire plus de mutualisation pour être plus efficaces. L’important dans une chambre d’agriculture, c’est que les techniciens soient en contact avec les agriculteurs pour les aider.