Boulangeries : les élus s'engagent
Il est des boulangeries qu'on dit "communales". Les locaux et le matériel appartiennent à la municipalité. Une pression financière de moins pour les commerçants et un facteur d'attractivité supplémentaire pour les communes qui ne se voient pas vivre sans leur boulanger.
La boulangerie de La Chapelle-Viviers était pour le couple Coussot "une opportunité". Celle de quitter la Charente-Maritime ! Pas banal mais c'est bel et bien dans ce coin de campagne de la Vienne que Sonia et Pascal Coussot ont choisi de poser leurs valises en fin d'année dernière. " Nous avons été 15 ans à côté de Saintes, après Saint-Hippolyte et Nancras d'où nous sommes originaires. On nous a demandé ce qu'on venait faire ici " sourit Sonia Coussot qui l'explique principalement par l'amour des petits villages et leurs habitants. "On prend le temps de discuter et les habitants, notamment les plus âgées, apprécient beaucoup. On nous a très bien accueillis ici. C'est plaisant et cela change un peu de la côte où les locaux sont très chauvins". Sonia Coussot est à la caisse, pendant que Pascal, son époux, est au fournil. Il propose la baguette du chef, à partir de farine blanche et de graines sur le dessus, le pain torchon et la tradigraines ou encore le pavé d'avoine et de maïs. Marque de fabrique : la galette charentaise. "Ça change du broyé du Poitou " précise Sonia Coussot. Le couple a fait des investissements, pour la pâtisserie notamment, faite maison et pour le coin des pizzas qu'ils proposent les mercredis, vendredis et dimanches, de 18h30 à 20h30. Des investissements toutefois minimes car ils n'ont pas eu besoin de racheter les locaux et le matériel existant, ceux-ci appartenant à la municipalité.
Solution clés en main
Car à La Chapelle-Viviers, les élus ont pris la cause de leur boulangerie dès 2010. "L'ancienne boulangerie était dans une ruelle, pas vraiment passagère. Ici, c'était un menuisier. On a racheté cet ensemble pour en faire un pôle commercial " décrit Patrick Charrier, maire de la commune. Et aujourd'hui, avec la boulangerie, la commune bénéficie d'un restaurant et d'un salon de coiffure. Et pour les boulangers, c'est donc un moyen d'alléger l'investissement de départ.
L'exemple de La Chapelle-Viviers n'est pas unique. À Ceaux-en-Loudun, la boulangerie est communale depuis 2012. " La boulangerie était mal située et le boulanger de l'époque avait demandé à la municipalité d'en reconstruire une ailleurs, avec un logement. Les boulangers se sont suivis. Un couple de région parisienne s'est installé il y a deux ans et cela se passe très bien " explique Régis Savaton, maire de la commune qui a réitéré l'opération avec l'épicerie-restaurant ouvert l'année dernière. " Ce sont des solutions clés en main pour des jeunes professionnels qui veulent s'installer et n'ont pas forcément les moyens d'investir. La commune devient agent immobilier en quelque sorte. Ce n'est pas vraiment son rôle mais celui des élus est quand même de dynamiser la commune " précise l'élu, pas peu fier de ses commerces, face à l'école et sa centaine d'élèves. Fier aussi de sa " vraie" boulangerie alors que les communes environnantes sont plutôt équipées de distributeurs de pain. " Il faut ensuite que les habitants jouent le jeu " rappelle tout de même le maire.
Pas d'épée de Damoclès
À Saint-Jean-de-Sauves, la boulangerie est face au restaurant et à côté de la boucherie. Les trois commerces sont communaux. Anthony Pothet a repris la boulangerie en septembre dernier qu'elle était fermée depuis 1 an. L'achat du bâti et du matériel a représenté un investissement de 100 000 € mais pour le maire, Christian Moreau, c'est un passage obligé. "C'est surtout un service indispensable qui doit être rendu aux habitants".
Et pour le boulanger, après son parcours de formation, notamment au sein des compagnons du devoir, et plus de 10 ans en tant que responsable d'une boulangerie à Poitiers, la boulangerie de Saint-Jean-de-Sauves était l'opportunité de s'installer à son compte sans avoir besoin de prêt bancaire. "Financièrement, ça aurait été compliqué. J'ai une famille et une maison à payer. Ne pas avoir besoin d'investir dans son outil de travail, c'est plus rassurant. On ne se lève pas le matin avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête". D'autant qu'il avait à cœur d'être en milieu rural. "Le lien avec la clientèle est différent "explique le boulanger qui propose, à côté de ses différentes sortes de pain, des pâtisseries, créations en chocolat et même pizzas, burgers et kebab, les mercredis et samedis. "On est à la campagne, il faut proposer des choses à nos clients pour leur éviter de prendre la voiture " complète Anthony Pothet.