Cédric Tranquard : Une envie farouche de défendre le métier
Elu président de la FNSEA 17 mi-janvier, il entend mener son syndicat lors des élections chambre. Portrait.
A chaque question, avant de répondre, il marque une ou deux secondes pour répondre. Le temps de jauger la question, peut-être de l’éluder, mais surtout pour être précis. Un temps, une pause qui semble la marque de fabrique du nouveau président de la FNSEA 17. Fraîchement élu, il ne cache pas que son organisation se met en pole-position pour les élections à la chambre d’agriculture de janvier 2019. A 41 ans, cet éleveur laitier affiche son parcours comme autant de fenêtres ouvertes : fils d’agriculteurs, bac pro à St Genis, salarié dans le GAEC (140 vaches laitières, 250 ha, 3 associés) dont il est membre aujourd’hui, installé en 2002, ancien président des Jeunes Agriculteurs, président de l’ASA Boutonne, pour quelques semaines encore, membre de la Chambre d’agriculture.
D’abord la diplomatie
L’homme n’est pas avare de paroles, mais les mesure, les pèse. Pourtant, on perçoit au détour d’une intonation, des impatiences, des retenues, des mots choisis. «Je ne suis pas forcément politiquement correct. Mais je dis les choses ! Normal pour que nous soyons audibles.» Sa ligne de conduite : la défense du monde agricole, mal-aimé, décrié, mis à mal par les crises, économiquement faible.
«Il faut que nous puissions vivre de notre métier» débute-t-il. Sa haute stature, trimballée sur nombre de manifestations, en impose dans biens de réunions. Cédric Tranquard, diplomate. En témoigne la pugnacité dont il a fait preuve à l’ASA Boutonne pour qu’émergent les réserves de substitution. «On nous a beaucoup demandés. Trop» lâche-t-il rétrospectivement alors que l’enquête d’utilité publique débute à la mi-février. Pour lui, rien n’est contradictoire entre prise de position et travail avec l’administration, DDTM notamment. Il a plutôt la dent dure avec les politiques, nouveaux venus dans l’arène, ignorants du fait agricole. Partisan du travail collectif d’une profession, il replace son syndicat dans le lobbying, sans exclure pour autant les actions ponctuelles de masse. Lui, qui maintenant twitte, assure vouloir une «équipe FNSEA 17», mélangeant anciens syndicalistes, présidents de la structure et nouveaux issus des JA. Une dynamique qui devrait «construire» le «projet agricole départemental», socle des prochaines élections, «avec des propositions.»
Être audibles
«Nous devons remettre du syndical à la chambre…» analyse-t-il, «d’autant qu’aujourd’hui, il est possible de faire bouger les curseurs en faveur de l’agriculture.» Il prend en exemple l’action de Brouage (juillet 2017) : «nous l’avons imaginé, l’avons fait. Cela a fait bouger.» Syndicaliste dans l’âme, Cédric Tranquard ne segmente pas l’agriculture, mais parle au pluriel : traditionnelle, conventionnelle, bio, raisonnée… «dès l’instant où elles correspondent à des attentes, à des modes de production viables.» Il s’amuse des étiquettes. «Non, je ne suis pas le défenseur de l’agriculture productiviste. Il ne faut pas mener des batailles de chapelles, mais plutôt les dépasser.» Partisan de prendre les «dossiers très en amont», le nouveau président de la FNSEA 17 parle d’épuiser d’abord tous les ressorts de la concertation, de la discussion. Ensuite, «marquer le coup. Si nécessaire. Le but du syndicat n’est pas de passer son temps en manif devant la préfecture. Il faut préparer les dossiers. L’action, la manifestation est la dernière solution.» Pour l’ancien para à Pau, les pistes à explorer sont multiples pour «défendre le métier différemment» : «il faut établir une ligne et s’y tenir sérieusement. On peut tout dire pour mieux se comprendre. Même si certains sont vraiment sourds ou n’ont pas la capacité à entendre.» Un nouveau métier de diplomate s’ouvre à Cédric Tranquard, qu’il lui faudra doubler d’une impulsion syndicale, même s’il ne croit pas au charisme d’un homme, mais bien plus au travail d’équipe et des nouvelles technologies. «Un tweet bien placé, circulant à grande vitesse, peut faire changer plus rapidement l’opinion ou les positions.» Le président de la FNSEA 17 aura l’occasion s’expliciter ses vues lors de la prochaine assemblée générale de son syndicat, le 19 mars prochain à Saintes.