Des maraîchers et horticulteurs qui limitent les pertes
Dans la période de confinement que l'on vient de vivre, on observe que les producteurs vendant en direct ou commercialisant en circuit court sont parvenus à limiter la casse sur leur exploitation, non sans quelques ajustements dans leur organisation pour répondre à la venue plus fréquente des clients. Exemples sur des entreprises maraîchères et horticoles de la Vienne.
La vente en direct de ses légumes et ses fruits bio sur la ferme voisine à La Baie Des Champs, à Sèvres- Anxaumont, représente 70 % du chiffre d'affaires de Thomas Portron, à la tête de l'entreprise maraîchère Tomates et Potirons. Le reste des ventes se fait grâce à l'approvisionnement d'un biocoop, de restaurants et d'un magasin de producteurs.Forcément, les ventes aux restaurateurs se sont largement réduites. Heureusement, pour Thomas Portron, certains établissements se sont mis à faire de la vente à emporter. C'est le cas par exemple de « La Cuisine de comptoir » à Migné-Auxances, où le maraîcher livre encore des fruits et légumes. Sa production intéresse aussi « Le Pince Oreille », à Poitiers, qui prépare aussi des plats à emporter. « C'est une période pour moi, où je fais les implantations pour les légumes d'été. Ce n'est pas un moment où je m'attendais à faire des ventes mirobolantes. L'impact aurait été plus grave si c'était arrivé cet été », pense le jeune maraîcher. Toujours est-il que la demande des consommateurs a finalement été forte. « Beaucoup de personnes se sont rendu compte qu'il y avait des producteurs près de chez eux, et ont trouvé d'autres lieux d'achats, devant la crainte de se retrouver dans les grandes surfaces où beaucoup de monde circule. » Thomas se réjouit de voir que des exploitations ont cette « capacité à toucher les consommateurs » et de revoir renaître « un contact direct entre producteurs et citoyens. Si nos produits leur plaisent, ils reviendront. »Thomas Portron, qui installe régulièrement son étal devant la boutique de la Baie des Champs, avait arrêté la commercialisation 15 jours avant le confinement. « J'ai finalement laissé des légumes en vente à la boutique car il y avait de nombreuses demandes. » Des sollicitations tellement fortes, qu'une vendeuse ambulante qui parcourt le sud de Poitiers avec son camion, et avec laquelle le maraîcher travaille régulièrement, lui a demandé plus de volumes que d'habitude. « Ça a été une autre opportunité pour moi. »
15 personnes à la foisÀ la Graine fleurie, à Monthoiron, les pratiques de vente ont aussi été modifiées ces dernières semaines. Dès les 15 premiers jours du confinement, cette entreprise horticole dirigée par Virginie Azile a été contrainte de fermer ses portes. « On a mis en place des livraisons à domicile, après des commandes passées sur notre compte Facebook. » L'étau s'est ensuite un peu desserré pour l'exploitation avec, début avril l'autorisation pour les consommateurs de venir sur place pour prendre leurs achats sous forme d'un drive . « Les personnes se garaient au portail de l'exploitation et on mettait leur commande dans le coffre. » Un dispositif toujours en place actuellement. Mais depuis avril, les clients ont la possibilité d'entrer dans les 1 700 m2 de serres, les 700 m2 de pépinières, et les 600 m2 de plants potagers. « La limite est fixée à 15 personnes maximum. Les personnes sont disciplinées. » Virginie Azile reconnaît que son entreprise a bénéficié de la clientèle qui a pour habitude d'aller dans les jardineries, qui n'ont pas pu vendre de plantes pendant un mois. « Des clients, qu'on ne connaissait pas, ont été contents du service qu'on leur a rendu en les livrant. » L'horticultrice note que ce mois d'avril a été « intéressant commercialement. Je me souhaite un résultat identique en mai, qui est toujours un gros mois en termes de vente. » Elle sait en revanche qu'elle ne pourra pas organiser ses traditionnelles portes ouvertes qui se déroulent le 2e week-end de mai. « On y accueille 200 personnes/jour. On fait des gestes commerciaux pour les clients. » Des remises qu'elle a décidées, en attendant, de proposer sur le compte Facebook de l'entreprise.
Circuits courtspour les fraisesAux Délices du Sillon, à Linazay, c'est la fraise qui est la star en ce moment. Salariée sur l'exploitation familiale (grandes cultures, tabac, plant de pommes de terre, noisetiers) Adeline Mérigot y a lancé la production de fraises (2 300 m2 de serres pour l'instant, et 7 000 m2 en tout à partir de début 2021). Plantées en février, les premières fraises (variétés Gariguette et Favori) ont commencé à être récoltées il y a 15 jours. « Je les commercialise à des boulangers, et des épiceries des alentours, ainsi qu'à deux grandes surfaces du sud Vienne. » « Deux restaurateurs se sont aussi montrés intéressés », ajoute Daniel Mérigot, le père d'Adeline.L'objectif pour la maraîchère était aussi d'être présente, pour cette première campagne, sur les marchés de Vivonne, Couhé et Civray. Faute de places suffisantes actuellement, elle n'a pas pu y proposer sa production. Elle a donc organisé de la vente directe, du lundi au samedi, de 17 h à 18 h 30, dans un bâtiment qui sera, une fois entièrement restauré, le point de vente de l'exploitation. L'agricultrice, qui fait entrer un seul client à la fois dans cette grange, précise que pendant la vente, elle porte un masque et se lave les mains régulièrement avec un gel hydroalcoolique. Adeline n'a pas hésité à faire profiter de ce lieu à des collègues, pour le plus grand plaisir des consommateurs qui peuvent ainsi acheter d'autres produits locaux : le 3 mai dernier leur étaient proposés des fromages de chèvre au lait cru de l'exploitation La Margelle des Papes à Usson du Poitou.Les projets pour la production de fraises ne manquent pas, complète Daniel Mérigot, avec l'installation d'un distributeur automatique sur l'exploitation mais aussi sur deux ou trois autres sites, pour « satisfaire les clients qui ne peuvent pas venir sur l'exploitation».