Des volailles en pâturage tournant dynamique
À Port-d’Envaux, Stève et Lydie Barreaud ont lancé un élevage bio de poules pondeuses. Entre enclos mobiles et agroforesterie fruitière, ils testent à petite échelle des techniques innovantes.
Dans une autre vie, Stève Barreaud était conseiller développement local à la Chambre d’agriculture de Charente-Maritime. Mais ça, c’était avant. Après un passage dans le Tarn, il est revenu dans le département et est passé de l’autre côté de la barrière : il est devenu agriculteur. La Ferme de Pibot, son exploitation, est installée à Port d’Envaux, à quelques centaines de mètres de la Charente. Sur un terrain de 3,78 hectares, il élève pour l’instant 400 poules pondeuses, avec un objectif à terme de 1200. « On ne voulait pas 3000 ou 6000 poules », assure Stève Barreaud, qui indique avoir fait le choix de la race Lohmann. « La poule de Marans, on y avait pensé, mais ce n’est pas assez productif. » Toutefois, il n’exclut pas d’en introduire plus tard.
À l’heure actuelle, ses poules fournissent environ 360 œufs par jour, ramassés chaque jour vers 14h, et qu’il écoule notamment sur le marché de Saintes au prix de 2,20 € la boîte de six. La demande est importante : « on est vraiment sur un boom de la consommation locale et bio », assure-t-il. Ce débouché lui prend beaucoup de temps, aussi réfléchit-il à passer par une AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne). Il vend aussi ses œufs au supermarché Leclerc de Saint-Georges-des-Coteaux, à un prix évidemment moins intéressant pour lui que sur le marché, ainsi qu’à quelques autres clients.
Des poulaillers déplacés tous les trois jours
L’originalité de cette exploitation ? Les deux poulaillers sont mobiles. Et pour cause, ils ont été aménagés par le couple à partir de structures sur roues préexistantes. « Ça nous a coûté 400 € le mobile-home, explique Stève Barreaud, plus 2000 à 2500 € pour l’équipement. » Le sol est fait de caillebotis, pour que les fientes tombent directement à terre et ne stationnent pas dans l’habitat. Les poules, qui disposent à l’intérieur de nombreux nichoirs, peuvent rejoindre la terre ferme grâce à de petites rampes qui mènent à l’enclos, entouré de clôtures électriques, où elles évoluent en journée. Le principe est celui du pâturage tournant dynamique : « on déplace les cabanes tous les trois jours », avec à chaque fois démontage et remontage des clôtures. Une technique parfois utilisée avec les bovins, beaucoup moins avec les gallinacés, où quelques rares expérimentations ont été menées, en Allemagne par exemple. Le nourrissage des poules se fait avec les ressources du sol – graines, insectes – et avec des céréales bio, achetées en Vendée. L’éleveur réfléchit aussi au nourrissage par les orties.
La production d’œufs n’est pas la seule finalité de l’exploitation : la technique de déplacement des mobile-homes se mêle à l’agroforesterie. « Au départ, nous n’étions pas intéressés par l’élevage, mais par les fruits », indique Stève Barreaud. Les époux ont donc planté des lignes d’arbres fruitiers, avec des essences classiques comme noisettes, noix, pêches et prunes (à chaque fois des variétés anciennes), mais aussi d’autres moins utilisées, comme du sureau, du coing, du tilleul… L’objectif affiché demeure la biodiversité. 380 arbres ont déjà été plantés, 300 autres devraient l’être prochainement. L’espacement entre les rangées est assez large, ce qui a plusieurs intérêts. Évidemment, il permet actuellement de manœuvrer les mobile-homes, mais il pourrait aussi permettre le passage de tracteurs si les usages du terrain évoluaient à l’avenir, pour produire des céréales en agroforesterie par exemple. En dernier recours, il serait toujours possible d’y planter de nouvelles rangées au milieu de celles déjà existantes.
Un an et demi de ponte pour les poules
Pour la protection des animaux, les deux éleveurs misent beaucoup sur la prévention, avec la distribution de petit lait pour les poules. Ils ont toutefois conscience qu’ils devront peut-être avoir recours à d’autres méthodes pour préserver leurs animaux. « On est jeunes, reconnaît Stève Barreaud, les problèmes sont devant nous ! » Et le caractère très expérimental de son projet fait qu’il s’attend à en rencontrer d’autant plus. « Nous sommes sur des techniques innovantes, alors pour avoir des conseils techniques, c’est compliqué ! Quand on est l’innovateur, quelque part, ce n’est pas sécurisant. » Toutefois, il a contacté Gérard Kéraval, conseiller en élevage monogastrique de la Chambre d’agriculture 17-79.
En tout, le couple a investi 90 000 € pour son installation, en incluant le prix du terrain. Les premières poules ont emménagé dans ces poulaillers deluxe en avril dernier. Elles quitteront les lieux en octobre 2020, après un an et demi de ponte. Certaines pourraient être destinées à la transformation, en rillettes par exemple, mais d’autres pourraient connaître une retraite bien plus longue. « L’idée, c’est d’en faire des poules d’agrément, révèle Stève Barreaud. Sur le marché, beaucoup de monde nous demande des vieilles poules pour leur jardin. »
Une nouvelle édition pour le guide des producteurs bio
C’est en présence de Françoise de Roffignac, vice-présidente du Conseil départemental en charge de l’Agriculture, que les co-présidents du GAB17 Julien Lucy et Vincent David ont dévoilé la nouvelle mouture du Guide Bio des producteurs de Charente-Maritime, pour les années 2019 et 2020. Sa présentation a été harmonisée avec celle des autres départements dépendant de la FRAB Nouvelle-Aquitaine. Le livret, qui recense 95 références, est « très demandé, il a beaucoup de succès », selon Vincent David. « Nous avons dû en rééditer », confirme Julien Lucy. À l’heure de la numérisation, le choix d’un support physique peut surprendre, mais répond selon les co-présidents à une véritable demande. « Pour le site, la question s’est posée », explique Julien Lucy, « mais les producteurs voulaient une version papier. Ça permet d’avoir de la visibilité. » « Le site est beaucoup plus réactif, ajoute Vincent David, mais le papier, c’est un support que le public apprécie. » Il est distribué chez les producteurs, les offices de tourisme ou encore les mairies.