Elections: « Un sentiment d’abandon dans les campagnes »
A quelques jours du premier tour des élections départementales, le président de la Chambre d’agriculture, Dominique Marchand, confie ses inquiétudes.
Comme beaucoup, Dominique Marchand redoute que l’abstention soit le grand gagnant de ces élections départementales « new look » des 22 et 29 mars. Et comme bon nombre d’observateurs, il craint la tentation du vote extrême, y compris dans les zones rurales. « Les instituts de sondage annoncent un vote FN élevé chez les agriculteurs et ils pourraient bien avoir raison car il y a un sentiment d’abandon qui s’est installé dans les campagnes. Les gens ont l’impression de ne plus être écoutés et surtout entendus. Et puis le redécoupage électoral n’a fait que le conforter avec une perte de pouvoir des campagnes au profit des villes. En plus, la création des grandes régions va encore plus favoriser l’émergence de grandes métropoles. Si Poitiers peut tirer son épingle du jeu dans la nouvelle grande région, qu’en sera-t-il pour le montmorillonnais ou le loudunais ? Je pense que l’on est tout près d’une fracture dangereuse entre rural et urbain. L’agriculture est la colonne vertébrale du monde rural, si elle ne tient plus, tout s’écroule » s’inquiète le président de la Chambre d’agriculture.
S’il a tenu à s’exprimer ainsi à la veille du scrutin c’est d’abord parce que l’actualité agricole est très inquiétante. «Le contexte économique est assez désastreux et on peut comprendre le désarroi de certains qui ne croient plus à rien. Prenons l’exemple de la nouvelle PAC dont nous a dit qu’elle était faite pour favoriser l’élevage. Quand on y regarde de plus près on s’aperçoit que beaucoup vont y perdre, à l’exception des éleveurs ovins et peut être des caprins. Dans un département intermédiaire comme la Vienne, 2/3 des éleveurs sont aussi des polyculteurs, avec cette réforme la ferme Vienne va plus perdre que gagner». Dominique Marchand prend un autre exemple : le pseudo choc de simplification promis par le chef de l’Etat. « Les déclarations Pac sont de plus compliquées à remplir, on nous dit que les choses vont être simplifiées et tout devient plus compliqué avec les SIE (Surfaces d’Intérêt Ecologique), la mise en place du compte Pénibilité, etc». Face à ce constat bien morose, le président de la Chambre d’agriculture ne veut pas pour autant que le monde rural jette le bébé avec l’eau du bain et succombe à l’abstentionnisme et au vote extrême. « Le repli sur soi n’est pas la solution. Dans la Vienne, beaucoup de nos productions sont exportées, il ne faut pas l’oublier. Il faut aller voter, c’est important. Le monde agricole doit sortir de son isolement et participer à de vrais projets de territoire ». Dominique Marchand veut encore croire à l’avenir des départements « c’est un bon niveau de proximité, au moment où les centres de décision vont s’éloigner avec la création des grandes régions » et il est très favorable au projet d’Assises du monde rural porté par la majorité départementale. «Au delà de la tarte à la crème des circuits courts que tous les candidats mettent en avant alors que cela ne peut représenter que 10 % de la ferme Vienne tout au plus, ces assises me semblent être un signal porteur d’espoir ». Faute de grives…