Le ministre de l’agriculture ne convainc pas la FNB
L’assemblée générale de la Fédération nationale bovine a pointé la responsabilité des pouvoirs publics, qui n’ont pas encore pris conscience des difficultés des éleveurs et de l’aval de la filière qui ne joue pas la carte de la production nationale.
Chabauty (79).
«Vous êtes responsable, en tant que ministre, de la situation. Les pouvoirs publics ont tardé à prendre conscience de l’ampleur de la crise », a déclaré Jean-Pierre Fleury, président de la FNB, en accueillant le ministre de l’agriculture au congrès de la Fédération nationale bovine qui s’est déroulé à Bourg en Bresse, dans l’Ain, les 3 et 4 février. Accueilli sous les huées, Stéphane Le Foll a été soumis à un véritable réquisitoire. Le plan de soutien à l’élevage, annoncé le 3 septembre dernier et complété en janvier dernier ? « Les intentions sont bonnes », notamment en matière d’année blanche, a convenu Jean-Pierre Fleury, mais pour préciser aussitôt « que l’argent n’est pas suffisant ».
L’étiquetage de l’origine de la viande dans les produits transformés ? « Il faut mettre les moyens, notamment à Bruxelles », a conseillé le président de la FNB.
La Pac ? « La France est aux abonnés absents à Bruxelles », alors que se jouent des négociations qui conditionnent l’avenir de la viande bovine. Selon lui, la commission européenne ne se préoccuperait que de signer des accords de libre-échange, hier avec le Canada, aujourd’hui avec les États-Unis, demain avec le Mercosur.
Un ministre sans solutions
Aux pouvoirs publics, il est également reproché de ne pas procéder aux contrôles et aux sanctions sur les manquements au niveau des relations commerciales, comme le prévoit la loi. L’accumulation des normes et des réglementations plombent la compétitivité des exploitations, de même que les difficultés des déclarations Pac, le rejet des dossiers sécheresse, les lourdeurs de la méthanisation, la persistance des difficultés d’exportation liées à la FCO ainsi que la disponibilité des vaccins. Autant de sources de mécontentements auxquelles le ministre de l’agriculture a eu du mal à répondre.
Dans sa corbeille, le ministre n’avait finalement qu’un nouveau décret sur la pesée, le classement et le marquage pour moraliser les relations commerciales entre l’éleveur et l’abatteur. Ce texte, à paraître prochainement, fixera un laps de temps pendant lequel l’éleveur pourra accepter ou contester le classement de ses animaux. Surtout, il a annoncé un assouplissement du régime des installations classées pour l’environnement (ICPE). Sur le modèle déjà en vigueur pour le porc et la volaille, un régime d’enregistrement va se mettre en place entre 400 et 800 places. Stéphane Le Foll a également confirmé qu’il allait publier un décret sur l’origine des viandes dans les produits transformés, sans attendre le feu vert de Bruxelles.
Bigard et les industriels sur la sellette
Les débats se sont également focalisés sur le comportement de la filière qui ne joue pas la carte du troupeau allaitant et notamment du principal opérateur, le groupe Bigard, qui contrôle 40 % de l’abattage en France. Convié aux travaux du congrès, il a décliné l’invitation. « Nous voulons un nouveau modèle de construction de la valeur dans la filière qui intègre les coûts de production », a plaidé Jean-Pierre Fleury. Le groupe est accusé de ne pas s’être inscrit dans une démarche de revalorisation du prix à la production, sous l’égide du ministre de l’agriculture au mois de juin dernier. « Aujourd’hui, il manque 60 cts/kg par carcasse, soit 250 euros par animal », déplore le président. Au groupe Bigard, il est également reproché de torpiller la stratégie d’exportation. La plate-forme Export mise en place l’été dernier n’a, à ce jour, conclu aucun contrat. Il lui est également reproché de bloquer les travaux menés par l’interprofession sur la segmentation du marché pour mieux valoriser les viandes issues du troupeau allaitant. Et ainsi de jouer la carte des prix les plus bas.