Les Hauts de Talmont veulent toujours « créer la différence »
Inauguration du nouveau chai, début de la commercialisation d’un cognac 100% colombard… 2020 aura été une année chargée pour le domaine de Talmont-sur-Gironde, qui continue de jouer la carte des particularités.
Créé en 2003 par trois associés, Michel Guillard, Jean-Jacques Vallée et Lionel Gardrat, le domaine des Hauts de Talmont suit depuis l’origine un chemin atypique. Cela a commencé par les cépages choisis lors de l’implantation sur les falaises de craie qui surplombent la Gironde : « On a planté du Colombard, puis un peu de Merlot et de la Folle-blanche », explique Lionel Gardrat, seul viticulteur parmi les initiateurs, et qui gère aujourd’hui le domaine en plus de son vignoble familial de Cozes.
Puis ce fut, à compter de 2011, l’aventure de la biodynamie. Une manière, selon Lionel Gardrat, de « reconnecter » le vin à son terroir, ce sol calcaire campanien datant du Crétacé qu’il connaît si bien. « On s’est rendus compte que ça apportait quelque chose de plus au niveau de la finition », révèle-t-il. « La biodynamie apporte au vin une certaine tension. » Les pratiques de ce mode de culture sont exigeantes, requièrent des horaires précis pour l’application des traitements, et peuvent laisser sceptiques. Mais Lionel Gardrat y croit dur comme fer, inspiré par ce qu’il observe depuis les vignes du domaine. « Quand vous voyez que la Lune est capable de bouger des millions de mètres cubes d’eau chaque jour, vous vous dites qu’elle peut bien avoir une influence sur le raisin ! »
Un cognac dans un flacon façon whisky
L’année 2020 aura été un moment-clé pour la poursuite de cette aventure. À l’été, le domaine a dévoilé ses premiers cognacs. Une incursion sur le domaine de la distillation charentaise qui a débuté il y a douze ans et a permis de commercialiser un cognac XO de 2008 et un VS, assemblage des millésimes 2014 et 2016, certifié en biodynamie. Le mantra du domaine, « créer la différence pour ne pas tomber dans l’indifférence », a incité les associés à multiplier les critères de distinction sur le produit. L’eau-de-vie des Hauts de Talmont n’est constituée que de Colombard, ce qui est très rare, voire inédit dans les Charentes, selon Jean-Jacques Vallée. Ancien publicitaire, il a aussi conçu un emballage qui détonne. « On a essayé de sortir des codes en reprenant des bouteilles proches de celles du whisky », explique-t-il. Sur l’étiquette de ce ‘‘cognac de l’Estuaire’’, un maigre, poisson qui évolue au pied des falaises de Talmont. « C’est pour bien revendiquer une région loin du centre du cognac. »Un nouveau chai ultramoderne
Le vieillissement du cognac s’effectue désormais à Talmont-sur-Gironde, sur un site qui est l’autre grande nouveauté de l’année. L’espace inauguré à l’automne a été conçu par l’architecte parisien Christian Biecher, qui s’est appuyé sur son homologue de Cozes, Frédéric Daviet, pour l’exécution de ses plans. Il est constitué de deux bâtiments : une maison charentaise traditionnelle, restaurée avec soin, qui accueillera les bureaux et le chai à cognac, et face à elle un nouveau chai accueillant une cuverie, un cave pour le vin en sous-sol et un espace de dégustation. Avec son aspect très moderne, l’ouvrage a suscité quelques remous au sein de la commune. Plusieurs recours et contretemps ont ralenti le projet, au point qu’il a fallu sept ans entre le dépôt du permis de construire et la fin des travaux. « C’est parce qu’on était trois qu’on a tenu », confie aujourd’hui Jean-Jacques Vallée. Par chance, le travail avec les Bâtiments de France s’est extrêmement bien déroulé. « Ils ont eu un rôle très important, parce qu’ils ont tout de suite compris ce qui était proposé. Ils nous ont donné des modifications extrêmement précises qui ont tout de suite été intégrées au projet. »Ces évolutions ont permis de fondre le bâtiment d’acier laqué sombre dans le paysage, le rendant presque invisible depuis le port de Talmont. Un outil plus discret qu’on ne le croirait, mais « très performant », selon Lionel Gardrat. Et qui permettra de renforcer l’ancrage local de la production, puisque le vin « ne quittera Talmont qu’à sa vente », le plus souvent via la boutique installée dans le vieux village aux plus de 500 000 visiteurs annuels.