Les sangliers, énième retour
Toujours autant de sangliers, toujours autant de dégâts et une colère qui devient noire chez les agriculteurs.
On prend les mêmes et on recommence, pourrait-on s’amuser à dire. Sauf que là, la situation ne fait plus du tout rire depuis plusieurs années. Les sangliers continuent à faire des dégâts sur les prairies, sur des parcelles de cultures des agriculteurs. La colère, le dégoût, l’absence de mesures réelles pour lutter contre ces suidés s’entendent encore plus dans les campagnes, notamment en Haute Saintonge. «La semaine dernière, avec l’ACCA de Corignac, j’ai posé une clôture autour de ma parcelle, puis j’ai semé. Résultats, quelques jours après, le pré est mort. Les sangliers ont tout détruit y compris la clôture» s’insurge Cédric Bouyer, agriculteur et boucher à Corignac. «Je viens de perdre 1500 euros de semences en peu de temps. À cela, je ne compte pas mon temps passé, ni le prix du gasoil. Qui peut supporter une telle situation ? Je suis le seul agriculteur sur ma commune. Mon cas ne doit pas intéresser la fédération départementale des chasseurs. A l’ACCA, on me comprend. Les chasseurs sont aussi désappointés que moi face à une telle situation. Jusqu’à présent, ce sont des mesurettes qui ont été prises. Faut-il arriver au cas extrême de déposer plainte contre la FDC17 ?» tempête-t-il. Une fois de plus, il va envoyer une demande d’indemnisation auprès de la fédération. Une fois de plus, il va passer du temps à envoyer un courrier. Il poursuit : «Cela ne concerne pas uniquement les agriculteurs, mais aussi les habitants. Les sangliers n’hésitent plus à venir jusque dans les jardins. Certains dépriment de voir autant de dégâts chez eux. La peur s’installe dans la campagne.»
Même colère et même constat pour Emmanuel Ambroise, agriculteur à Cercoux et à la tête de l’association «Les victimes du grand gibier». Selon lui, «la fédération de la chasse se veut toujours optimiste chaque année, mais le résultat s’aggrave. Tout le monde croise les doigts pour qu’il y ait moins de glands. C’est une aberration !» Il avance un chiffre : «Nous sommes sur le secteur de gestion F. En 20 ans, nous sommes passés de 68 à 765 sangliers prélèvés». Depuis le sud du département, il partage le même sentiment que ceux (agriculteurs ou non) qui sont touchés par les sangliers : «on trouve qu’il y a une opacité, une omerta. On a l’impression de ne pas être écoutés.» Pour lui, la solution passe par la chasse libre. «Quant à la peste porcine, si elle venait à arriver chez nous, ce serait un mal pour un bien» concède-t-il.
Des tirs à l’approche, au 1er juin
De son côté, la Chambre d’agriculture invite les agriculteurs concernés par les dégâts à remplir le formulaire de déclaration de dégâts. En remplissant ce questionnaire, cela aide à réaliser un état des lieux. En effet, il est nécessaire d’évaluer les populations excessives et de montrer les dégâts qu’elles occasionnent.En début de semaine, la CDCFS, commission départementale de la chasse et faune sauvage, a tenu une réunion afin de faire le point sur les dispositifs mis en place. «Depuis le début de l’année, un quota de sangliers était imposé, notamment sur certains secteurs où il y avait un problème.» rappelle Philippe Cimetière, agriculteur, chasseur et élu Chambre d’agriculture, en charge de la chasse. Cependant, ces quotas n’ont pas été réalisés. «On connaît la difficulté de l’année, avec la sécheresse. Il n’a pas été facile de faire des battues pour prélever des sangliers. Sortir des chiens avec des températures élevées, c’est compliqué.» explique l’élu. Mais, il avance aussi une autre explication : «le souci, c’est qu’au 1er juin, on avait la possibilité de faire des tirs à l’approche, le matin de bonne heure ou le soir tard. Je déplore que des présidents d’ACCA ne soient pas à la hauteur de leurs responsabilités ou des obligations qu’ils ont. Ils auraient pu saisir cette opportunité et mobiliser des chasseurs qui ont envie de faire du tir à l’approche. Cela aurait permis d’éliminer quelques sangliers sans faire de battues et de régler quelques problèmes.» Il donne en exemple l’île d’Oléron où cela ne s’est pas fait. Il reconnaît qu’avec la saison estivale, c’est plus compliqué vu le nombre de touristes. «Cependant, ils auraient pu le faire en juin.» rétorque-t-il. Deux-trois miradors ont été installés sur Oléron. Il trouve que «cela n’est pas suffisant».
La profession agricole, les agriculteurs, maintenant les habitants des communes, sont excédés. Reste à juger et jauger de l’existence d’une volonté de toutes les parties de tout faire pour endiguer ce problème. Même si des signes positifs sont notés ici et là.