« L’usage collectif et mutualisé de l’eau répond à l’intérêt général »
Le préfet des Deux-Sèvres espère faire émerger un consensus dans les jours, voire les semaines à venir, sur les réserves de substitution de la Sèvre niortaise. Cette semaine, pro et anti préparaient leurs arguments.
La réunion visant à l’émergence d’un consensus sur le sujet des réserves de substitution pour le bassin de la Sèvre niortaise a lieu ce vendredi 21 septembre. Isabelle David, préfet des Deux-Sèvres, s’y est préparée. La représentante de l’État qui ne peut envisager l’absence de consensus (lire ci-dessous) est satisfaite de constater les nombreuses contributions formulées en amont de celle-ci. Effectivement, le 6 juillet dernier, et suite à la seconde réunion de concertation, elle proposait un texte dont le contenu, de son point de vue, pourrait faire naître un accord. « J’ai appelé les différentes parties engagées sur ce dossier à me faire remonter leurs remarques avant le 14 septembre. Elles l’ont fait ». Parce que pro et opposants se parlent, « librement », jeudi 13 septembre, lors d’une conférence de presse, la représentante de l’État était déterminée à rester confiante.
Mardi 19 septembre, à quelques jours du rendez-vous, invitation à des conférences de presse et communiqués, adressés par les parties prenantes, arrivaient dans les rédactions. Une effervescence qui confirme pour les uns, comme pour les autres, l’importance de l’échéance qu’ils abordent avec des positions qui pourraient bien amener Isabelle David à un exercice difficile.
La profession agricole veut un consensus
Conscientes de l’enjeu qui se cache derrière ce consensus souhaité par la représentante de l’État, la chambre d’agriculture 79 et la Coop de l’eau 79 ont affûté leurs arguments. « Suite aux multiples échanges qui ont eu lieu dans le cadre de la médiation », la chambre consulaire et le porteur de projet des 19 réserves de substitutions proposent, dans le cadre de ce rendez-vous, « de notables évolutions au projet initial », affichent-ils dans un communiqué de presse commun. Un choix qui répond à la tendance qui se dessine chez les agriculteurs. « Depuis 4-5 ans, le modèle agricole est en pleine mutation, et les nouvelles générations d’agriculteurs sont de plus en plus attentives aux attentes des consommateurs. Disposer d’un accès à l’eau sécurisé, tout en diminuant de presque la moitié les prélèvements d’eau l’été d’ici 2022, permettra de conforter et d’amplifier ces évolutions récentes, qui font la part belle à la diversification, aux circuits de proximité et à la “montée en gamme” (bio, labels, filières locales…) », étaye Thierry Boudaud, vice-président de la Coop de l’eau.
Ce consensus, permettant au projet de voir le jour, les acteurs de l’agriculture l’espèrent. Coopératives, négociants agricoles sont également dans cette attente. « L’accès à l’eau l’été permet de sécuriser les investissements et le développement de filières diversifiées et de proximité. La production de soja non-OGM est de celles-ci. Légumineuses, fourragères, protéines végétales, semences, fruits et légumes, plantes aromatiques et médicinales représentent « des belles ambitions pour ce territoire, idéalement situé entre Nantes et Bordeaux, très bien desservi par le rail, la route et la mer », expose Jean-Marc Renaudeau, président de la chambre d’agriculture. Et de poursuivre : « nous disposons de foncier et de porteurs de projets pour devenir la ceinture maraîchère, fruitière, fourragère et de productions diversifiées locales pour tout le littoral atlantique ». S’adressant aux élus locaux et aux acteurs du territoire, il interroge : « Comment exister entre ces deux métropoles en pleine croissance, si nous n’avons pour seul horizon qu’une agriculture appauvrie par la mise en concurrence mondiale, sans investissements ni perspectives » ?
Les opposants prudents
« Cet usage collectif et mutualisé de l’eau » que propose la profession agricole à travers ce projet est « unique en France. Il répond à l’intérêt général car il enraye le déclin amorcé et nous donne les moyens de nous adapter au réchauffement climatique », pose le communiqué. Un point de vue que ne partagent pas les associations d’opposants réunis au sein du collectif Bassines Non Merci. Lors d’une conférence de presse, elles tenaient à le faire savoir en amont de la réunion du 21 septembre. « Ce que la Coop de l’eau appelle contrat de territoire est en fait un contrat territorial de gestion quantitative de l’eau (CTGQ)», juge Patrick Picaud. Soutenu par Jean-Jacques Guillet, Joëlle Lallemand, Thierry Baudry et Pierre Lacroix, « c’est un projet de territoire, contraignant et opposable aux agriculteurs qui ne le respecteraient pas », que tous appellent. Si les échanges vont dans ce sens, alors les « bassines » pourraient être « considérées comme des outils envisageables », par le collectif. Freinés néanmoins par une confiance très limitée dans la capacité des politiques à faire appliquer la réglementation, les opposants restent prudents. « En 2017, alors qu’un contrat de territoire était nécessaire pour obtenir les financements de l’agence de l’eau, le CTGQ a été transformé en semblant de contrat de territoire. Présenté à la clé du Sage, il a été voté. Les associations que l’on représente se sont opposées », rappellent les membres du collectif. La majorité a versé du côté du projet. « Parce que les citoyens ne sont pas assez associés », jugent les opposants, appelant ces derniers à se mobiliser le 21 alors qu’ils seront en négociation avec le préfet et les défenseurs du projet.
La question de l'eau en Deux-Sèvres : qualité, quantité, projets agricole et environnemental... tous les aticles du dossier du 31 août 2018.
http://www.agri79.fr/actualites/les-agriculteurs-mouillent-la-chemise:1QSV62Y3.html
http://www.agri79.fr/actualites/l-eau-un-moyen-de-securiser-l-avenir-des-exploitations:OA0ZGY3C.html
http://www.agri79.fr/actualites/une-nappe-haute-deborde-dans-les-rivieres:YLSQUWSY.html
http://www.agri79.fr/actualites/irrigation-un-petit-tour-par-les-chiffres:SO2BFOUG.html
Conférence de presse
Eau : à la recherche du consensus
«J e suis persuadée que l’agriculture ne peut pas fonctionner sans irrigation. Cette irrigation doit toutefois être réfléchie. Elle doit être économe en eau ». Convaincu que le travail engagé en Deux-Sèvres présente tous les atouts pour qu’émerge un consensus, le préfet, déterminé à œuvrer pour qu’il en soit ainsi, reconnaît que la montre peut jouer en la défaveur du projet. Pro et anti ne sont pas dans la même temporalité, juge Isabelle David. « Pourtant, si nous ne trouvons pas rapidement de lieux communs, je crains que le projet ne finisse par être abandonné ». Une réalité que refuse d’envisager aujourd’hui le préfet du département. « Si ce projet, dont la finalité est de préserver le milieu et particulièrement l’été, ne se fait pas, alors l’irrigation se poursuivra selon le modèle actuel ». Gérée au plus près des exigences du milieu, la gestion de l’eau qui s’applique aujourd’hui est moins favorable que ne le sera celle proposée dans le projet ».
C.P.