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[MàJ] Les amendements contre la taxation des vins apéritifs rejetés

Y voyant un enjeu de santé publique dans le cadre de la lutte contre l’alcoolisme, les parlementaires pourraient frapper les consommateurs au porte-monnaie.

Si l’amendement Dufeu Schubert est finalement validé, la catégorie des vins apéritifs sera taxée à hauteur de 3 € par décilitre d’alcool pur.
Si l’amendement Dufeu Schubert est finalement validé, la catégorie des vins apéritifs sera taxée à hauteur de 3 € par décilitre d’alcool pur.
© AC

Mise à jour du 21/11/2019 : Le sénateur de Charente-Maritime Daniel Laurent, président de la commission Vigne & Vin au Sénat, avait présenté des amendements visant à supprimer ou rejeter la mesure Dufeu Schubert concernant la taxation des vins apéritifs (voir ci-dessous). Ils ont été rejetés lors des discussions préparatoires sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale entre le 12 et le 14 novembre. Mais cette même loi a également été rejetée un peu plus tard suite aux annonces de l’exécutif sur de nouveaux financements pour les hôpitaux. Avec le jeu des navettes parlementaires, c’est donc l’Assemblée qui doit reprendre le travail sur le texte. Au final, l’amendement Dufeu Schubert devrait toutefois être adopté, ouvrant la voie à d’autres taxations de boissons alcoolisées.

Article initial du 14/11/2019 : C’est un vieux serpent de mer qui resurgit à la faveur de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) par le Parlement : une taxation des alcools pour prévenir l’alcoolisme. Ce sont les députés qui ont ouvert le feu en adoptant le 29 octobre un amendement instaurant une taxe sur les ‘‘premix’’ (mélanges de boissons alcoolisées et non-alcoolisées) à base de vin, ou ‘‘vins apéritifs’’. Cette taxe « vise essentiellement à protéger les publics jeunes et les femmes qui sont plus attirés par ce type de premix » et qui sont l’objet « d’un marketing ciblé », assure Audrey Dufeu Schubert. La députée de Loire-Atlantique (LREM) est à l’origine de cet amendement préalablement adopté en commission des affaires sociales ; elle l’avait déjà proposé, sans succès, lors de l’examen du PLFSS 2019.
Jusqu’ici, les ‘‘premix’’ étaient taxés à hauteur de 11 € par décilitre d’alcool pur... à l’exception de ceux à base de vin, exonérés de cette mesure. L’amendement modifie cette distinction en instaurant une taxe comportementale moindre, à hauteur de 3 € par décilitre d’alcool pur contenu dans ces produits de type rosé-pamplemousse ou blanc-pêche. Un choix que dénonce la Fédération française des vins d’apéritif (FFVA), pour qui cela « reviendrait à faire disparaitre cette catégorie viticole pourtant définie dans un règlement européen depuis près de 30 ans et qui nécessite la mise en œuvre de plus de 20 000 hectares de vignes ».

Frapper le comportement

« Il s’agirait d’une première taxe comportementale pour les Français sur des produits viti-vinicoles. Bien loin des enjeux de sante publique car les vins d’apéritifs sont peu alcoolisés et peu consommés par les jeunes, cette taxe ne prend absolument pas en compte les données de consommation », a déclaré Aymeric de Beauville, président de la FFVA. Selon le Conseil national des vins aromatisés (CNVA), ces boissons à base de vins ayant des degrés d’alcool relativement faibles (moins de 10 degrés) répondent à une « demande des consommateurs souhaitant diminuer leur consommation d’alcool, notamment lors d’apéritifs dinatoires, tout en conservant un caractère convivial. » Ces produits cibleraient des consommateurs de plus de 35 ans. « Il n’y a aucune volonté de la part des producteurs de masquer l’alcool dont la teneur est clairement indiquée sur les bouteilles et toute la communication autour des produits respecte scrupuleusement la loi Evin. » Le marché est pourtant en déclin ou passé de mode, depuis quelques temps. Le législateur est donc un peu à la traîne sur le sujet, ciblant peut-être un produit peu responsable de l’alcoolisation de jeunes préférant sans doute bières, premix à base d’autres alcools et autres spiritueux pris en « shot ».
« L’amendement Dufeu-Schubert adopté en commission aurait pour impact de taxer davantage des produits moins alcoolisés et donc de créer un effet de report sur des produits plus alcoolisés, craint le CNVA. Le résultat en termes de recettes fiscales serait nul et il serait contre-productif en matière de comportements responsables. » Les producteurs, les opérateurs, les investisseurs de cette filière de vins aromatisés mettent en avant des savoir-faire français, plus naturels. « L’art de l’assemblage des fruits, des épices et du vin fait partie d’une tradition ancestrale. »

Le pineau pas concerné

Le pineau des Charentes n’est pas concerné par cette taxe, puisqu’il s’agit d’un vin de liqueur. Reste que la démarche de « taxe comportementale » a de quoi inquiéter. Les producteurs et leur organisation savent que le combat « fiscal » est celui d’une vigilance à tous les instants, tant les griefs « anti-alcooliques » travaillent à museler le secteur. Un amendement est si vite arrivé, et ce n’est pas Agnès Buzyn qui leur dira le contraire. « L’exonération dont bénéficient actuellement les boissons aromatisées à base de vin ne repose sur aucune justification en termes de santé publique », a avancé la ministre de la Santé et des Solidarités.
Taxer davantage les vins aromatisés ne libérera sans doute pas plus de parts de marchés dans le secteur des apéritifs. L’approche des consommateurs ou les utilisations ne sont pas les mêmes entre un rosé-pamplemousse et un pineau. Et dans la bataille du linéaire ‘‘apéritifs’’ des supermarchés, c’est bien souvent le prix qui est déterminant… pour aller voir plus loin, dans le rayon des alcools forts par exemple. L’éducation à un mieux boire, fer de lance de nombre de communications, pourrait faire les frais de l’amalgame qu’instituerait une taxe comportementale. Pour les producteurs, à qui Agnès Buzyn promet pourtant qu’ils ne subiront « aucune pénalisation », tous les espoirs reposent désormais sur le Sénat, qui examine jusqu'au 16 novembre le texte. Le vote est prévu le 19 novembre... avec ou sans l'amendement.

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