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Moins de pénibilité et moins de charges disent les uns, moins de liberté disent les autres
En Deux-Sèvres, certains éleveurs continuent de castrer, d’autres pas. Alors que l’aval prend position, les éleveurs tendent l’oreille. La perspective de se libérer des chantiers de castration retient l’attention de bon nombre d’entre eux.
Dans le prolongement de la déclaration de Bruxelles (lire en page 9), la Cooperl a créé une filière mâle entier. Au cours de la dernière année, 80% des élevages en contrat avec cette coopérative ont abandonné la castration. Depuis, en Deux-Sèvres, coexistent deux modèles de production. Quand les uns ont fait le choix de ne plus intervenir sur les jeunes porcelets, d’autres poursuivent selon les règles de l’élevage traditionnel basé sur la castration des jeunes mâles. Leurs arguments sont multiples. « Nous ne sommes pas en 2018. Tant que les textes ne sont pas votés nous avons le choix », commente Marc Sauquet, naisseur engraisseur à Villiers-en-Plaine. A la tête d’un élevage de 270 truies, dont il engraisse 70% de la production, le chef d’entreprise qui travaille avec la Cooperl préserve par ce choix sa liberté d’acheter où bon lui semble alimentation et produits vétérinaires. « Le cahier des charges qui cadre la production de mâles entiers, confirme Stéphane Métais, technico-commercial à la Cooperl, arrête la composition de l’aliment distribué aux animaux. Les cochons non castrés ont une consommation en baisse d’environ 15%, alors même que leur croissance est plus rapide. La ration alimentaire est donc complémentée en lysine, vitamine, phosphore et calcium pour renforcer l’organisme. Ce complément est intégré aux aliments fabriqués à la ferme pour les éleveurs qui ont une Faf. »
Quand ici le choix est offert à l’éleveur, ailleurs, avec d’autres opérateurs, il ne se présente pas. Une réalité qui n’affecte pas particulièrement les producteurs qui continuent de castrer. Certains expriment une certaine réserve quant aux performances avancées par les défenseurs de ce nouveau modèle. Le risque d’agressivité des animaux en élevage est un frein ça et là évoqué. En revanche, la perspective de se libérer du chantier de castration retient l’attention des producteurs. Cette étape est spontanément décrite comme pénible et gourmande en temps de travail. Mais le risque en la supprimant n’est-il pas de voir la castration chimique se développer ? Bon nombre d’éleveurs s’interrogent.
Les convaincus, ceux qui comme Sébastien Aymé, de Rom, se sont engagés dans la filière naissante du mâle entier, semblent l'adopter. « C’est moins de temps de travail, moins de risques sanitaires, moins de produits pharmaceutiques utilisés et moins d’aliments consommés, pour des porcs qui poussent plus vite et dont le taux de gras à maturité est inférieur à ce qu’il était dans le précédent système. Au final, un porc vendu coûte 5 euros de moins », juge l’exploitant, à la tête d’un atelier de 870 truies et par ailleurs administrateur à la Cooperl. Jean-François Rimbault, qui pilote à Faye-sur-Ardin un atelier comptant post-sevrage et engraissement, témoigne d’un changement de conduite. « Les courbes de croissance ressemblent d’avantage à celles des femelles. Quand en fin de période d’engraissement on restreignait les animaux pour limiter le développement du gras, désormais, on déplafonne. Par ailleurs, la conduite est simplifiée par le fait que l’on ne sexualise plus les bandes. »