Conjoncture
Sous le double effet de la baisse des cours et de la hausse des charges
Conjoncture
Les jeunes agriculteurs sont particulièrement sensibles à la baisse des cours de la viande et à la hausse des charges. Ils s’inquiètent d’une situation qui tarde à se retourner en leur faveur.
Anthony Vaillant, installé à la Chapelle-Largeau, déplore : « on n’a plus de marge de manœuvre.»
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Guy du Repaire
Les jours se suivent et se ressemblent. Sur le front des revendications, il n’y a pas de trêve, et en particulier pour les éleveurs de bovins et d’ovins. Depuis plusieurs mois, ils dénoncent des chutes de cours et des hausses de charges. Ils reprennent à leur compte les calculs de l’Institut de l’élevage. Pour un jeune bovin charolais classé U-, le coût de production s’élève à 3,90 ? par kilo, alors que les cours se situent à 3,30 ?. Le manque à gagner de 0,60 ? par kilo, représente 240 ? par animal a calculé Alain Chabauty, président de la section bovine de la FDSEA. « C’est largement la marge de l’éleveur », dit-il.
La revalorisation des prix est donc bien la première revendication des éleveurs. « Il faut que les entreprises arrêtent la spirale à la baisse, en particulier sur les marchés européens », poursuit-il. La grogne est accentuée par le manque de transparence dans les transactions commerciales. La filière semblait avoir adopté la machine à classer. Mais les critiques dont elle fait l’objet à l’usage exaspèrent les éleveurs. Pour eux, elle est plus fiable, plus constante, dans son analyse qu’un estimateur. Des modifications ont été apportées, mais elles sont remises en cause par des abattoirs qui se trouvent être dans une situation concurrentielle défavorable. « Cela ne justifie pas leur refus », insiste-t-on à la section bovine.
Quelques jours seulement après la parution des comptes départementaux, les éleveurs attendent des pouvoirs publics « un rééquilibrage » des revenus en leur faveur. Ils privilégient une simplification, voire un abandon, des mesures de précautions qui ont été prises après la crise de l’ESB et « qui ne se justifient plus aujourd’hui ». « On va beaucoup trop loin, dans un système coûteux. Qu’on les poursuive sur les animaux âgés, mais pas pour tous », insiste Alain Chabauty.
Les jeunes sont
plus vulnérables
Avec des annuités importantes à rembourser, les jeunes sont particulièrement vulnérables. Anthony Vaillant, se souvient au moment de son installation, en 2004, que le message était à la baisse des quantités, pour réduire les charges. « On a joué le jeu », dit-il. Mais « avec l’augmentation du prix des engrais, des phytos, des semences…, on n’a plus de marge de manœuvre », déplore-t-il. La seule perspective qui se présente à lui est la revalorisation des prix de vente. En 2006, il vendait les jeunes bovins âgés d’un an, pesant 350 à 370 kg, 4,12 ? le kilo. « Aujourd’hui, ils sont à 3,80 ? le kilo », se désole-t-il.
Cette production est celle qui s’adapte le mieux à son système. Avec 130 vêlages répartis entre l’automne et l’hiver, le bâtiment est occupé à longueur d’année par les jeunes bovins qui représentent la moitié du chiffre d’affaires de l’exploitation. Les réformes constituent l’autre moitié.
Le système naisseur-engraisseur est courant dans les coteaux de la Chapelle-Largeau. « Finir les animaux est la meilleure solution », dit-il. Il n’imagine pas faire autre chose, « même quand on mange de l’argent. Parce que ceux qui arrêtent l’engraissement n’y reviennent pas », assure-t-il. Le Gaec, avec son père Yves, et son oncle Michel, lui permet « de mieux passer les coups durs ». Mais « si on ne retire plus rien pour vivre pendant un an, ça ne peut pas durer », s’empresse-t-il de nuancer. Il a beau utiliser les 30 hectares de céréales pour nourrir ses animaux, les aliments qui doivent être achetés, en particulier pour la finir les animaux ont atteint des sommets.
La transparence
des transactions
Dans ces périodes de difficulté, la transparence des transactions prend une importance particulière. Celle qu’est censée apporter aux éleveurs la machine à classer dans les abattoirs, mais aussi dans tous les autres maillons de la filière, découpe et distribution comprises. Selon Anthony, « le prix de la viande dans les grandes surfaces est effrayant ». Avec un prix correct, comme en 2006, et un niveau de charges raisonnables, « on doit pouvoir vivre de notre métier », poursuit-il. Il estime qu’il faut continuer à engraisser car les outils d’abattage « sont une chance » pour le département. « En contrepartie, les abattoirs doivent nous payer correctement. » Il en va de leur intérêt et de celui des éleveurs.
Guy du Repaire