Covid-19
Un coup de plus sur la tête des agriculteurs
La crise pèse sur le moral des agriculteurs. Ce qui revient le plus, au cours des conversations avec les organismes d’aides, est le manque de reconnaissance financière et l’angoisse de composer au quotidien sans visibilité sur « l’après ».
La crise pèse sur le moral des agriculteurs. Ce qui revient le plus, au cours des conversations avec les organismes d’aides, est le manque de reconnaissance financière et l’angoisse de composer au quotidien sans visibilité sur « l’après ».
« Si cela dure trop longtemps, on arrête ». Ces mots, Sylviane Landeau, conseillère au Resa 79 (Réseau d’écoute et de solidarité en agriculture) les a entendus d’un couple de quarantenaires installé depuis cinq ans, mais aussi de chefs d’exploitation à la carrière beaucoup plus longue. « Le contexte était déjà très morose avant le Covid-19, avec la perte de l’ICHN, la fluctuation des cours ou encore l’hiver pluvieux qui a noyé certains semis d’hiver. Le confinement ajoute une grande inquiétude sur les débouchés, qui se traduit parfois par des situations très dures », expose Sylviane Landeau. Celle qui accompagne une centaine d’agriculteurs environ par an, pour des conseils ponctuels ou des démarches plus approfondies, n’a pas noté plus d’appels dus au Coronavirus – « beaucoup d’agriculteurs sont mobilisés par les travaux des champs » – mais un renforcement des fragilités déjà existantes et l’apparition de nouveaux profils. « Des productions plus spécialisées se retrouvent très désemparées. Eleveur de chiots, producteurs de pigeons, fermes pédagogiques, paysagistes, pour ne citer qu’eux, se retrouvent parfois sans aucun revenu ».
Ne pas rester seul avec ses problèmes
« On fait de notre mieux et on est toujours pénalisés », « Où passe notre rémunération quand la demande augmente ainsi que les prix en magasin ? », « Que faire quand la pluie a ruiné mes semis de triticale ? », voilà encore des témoignages que Sylviane Landeau et sa collègue Valérie Berton (conseillère pour le sud du département) reçoivent au quotidien. Leur première mission : écouter, rassurer. Puis aiguiller vers les services et démarches qui permettront de surmonter la mauvaise passe, où tout du moins d’activer les bons leviers pour ne pas s’enfoncer plus. Et accompagner s’il le faut sur la durée. « Il ne faut pas hésiter à nous appeler, ne serait-ce que pour obtenir une info administrative », insiste Valérie Berton. Dans la jungle des formulaires et déclarations, le Resa guide les agriculteurs dans leurs procédures. « Il y a une sorte de flou artistique général avec le Covid-19, pointe Sylviane Landeau. Il faut lire entre les lignes des mesures d’aides annoncés par l’Etat, cocher les bonnes cases, réagir vite pour demander des reports d’échéances bancaires, d’impôts, de charges, sachant qu’ils ne sont pas toujours acceptés... En cette période, 200 euros qui partent pour l’électricité par exemple peuvent faire très mal. Chez certains, la question d’avoir encore assez de budget pour nourrir sa famille se pose, d’autant plus que les enfants, confinés, ne vont plus à la cantine ou chez leurs grands-parents ».
En attente d’aides institutionnelles
Le Resa a déjà tiré la sonnette d’alarme auprès des autorités compétentes pour améliorer les dispositifs d’aides aux agriculteurs, mais les retours se font attendre. « Avec cette crise, c’est le moment ou jamais de mettre en place un RSA dérogatoire qui ne se baserait pas sur des conditions de ressources des années précédentes mais bien sur la période en cours, parfois dramatique » se désolent les deux conseillères. Pour Sylviane Landeau, des mesures comme les bons alimentaires délivrés par la MSA sont une aide précieuse mais devraient pouvoir être renouvelés plusieurs fois par an. Constatant des insuffisances dans la prise en compte du quotidien parfois difficile vécu dans les exploitations, les salariées du Résa restent plus que jamais mobilisées, n’hésitant pas à décrocher leur téléphone pour prendre des nouvelles des uns et des autres et voir comment leur être utile. « Nous restons à l’écoute des colères, des doutes, et veillons à détecter dès que possible les difficultés dans les fermes, avant que le découragement prenne toute la place. Notre ligne téléphonique est toujours ouverte, et tout appel reste bien sûr confidentiel ».
Un accompagnement financier par la Fd Cuma