Equidés
La filière équine s’attelle à sa professionnalisation
Marianne Dutoit est présidente de la Fédération nationale du cheval (FNC) depuis trois ans. Unique syndicat, la FNC estime que le chantier est vaste car la filière équine est non structurée.
Quel est le rôle de la Fédération nationale du cheval ?
- On est d’abord un syndicat, notre rôle est donc la défense des éleveurs et des agriculteurs.
Vous parlez d’agriculteurs et d’éleveurs mais depuis 2004, la filière équine est passée dans le domaine agricole. Quels en sont les avantages ?
- En effet, toute activité équestre est considérée comme agricole hormis le spectacle. Les avantages sont considérables notamment sur le plan fiscal. Pour ma part avant cette loi de 2004, j’avais trois comptabilités différentes et aujourd’hui je n’en ai plus qu’une (NDLR : Marianne est éleveuse de chevaux, elle est à la tête d’une école d’équitation et a développé une activité d’accueil à la ferme. Elle est basée dans le Gers).
Le cheval occupait une place centrale au sein des exploitations, avant la mécanisation. Pourquoi cette reconnaissance comme filière agricole à part entière a-t-elle tardé ?
- C’est une filière peu organisée, éparpillée en une pléthore d’associations. Et puis, on dépendait des Haras nationaux depuis Colbert (NDLR : contrôleur général des finances de France de 1665 à 1683). On recevait des aides publiques, on avait un certain confort d’où peut-être la non-urgence à s’organiser. De plus c’est une filière atypique car 80% des éleveurs ne sont pas des professionnels, ils ont un autre métier à côté. D’ailleurs l’élevage en tant que tel n’est pas rentable. Il faut se diversifier, les éleveurs sont en plus étalonniers, font de la pension… Sur les 46 000 éleveurs que compte l’Hexagone, seulement 1500 d’entre eux ont plus de cinq poulinières, et c’est à partir de ce seuil que l’on commence à développer de l’économie. Enfin, c’est un secteur au sein duquel on est plutôt individualiste en raison d’une concurrence très présente entre les différents éleveurs.
Comment les éleveurs se diversifient-ils selon les régions ?
- En Normandie, on trouve des éleveurs de bovins et de chevaux de course ou de haut niveau. Dans d’autres régions, l’élevage est jumelé à la pension de chevaux. Dans le Massif central, on trouve des systèmes extensifs avec chevaux de trait et production de viande. En Deux-Sèvres, l’élevage équin est jumelé à celui de moutons ou de bovins avec une tendance à la diversification vers l’étalonnage et la pension.
Cette filière ne souffre-t-elle pas d’un manque de professionnalisation, n’est-on pas dans un monde de passionnés?
- Il est vrai qu’on est d’abord dans une passion mais depuis trois ans, les choses évoluent. Il y a une réelle prise de conscience : on cherche à équilibrer ses comptes, on lance des formations… Et puis, on commence à parler du cheval dans le premier pilier de la PAC, ça, c’est une révolution. Mais il est vrai que le cheval évoque le sport et avec les courses, on est vraiment dans le domaine du rêve. L’éleveur rêve de faire de l’un de ses chevaux un champion. Or il faut élever beaucoup d’animaux pour espérer sortir un champion.
Le cheval peut-il alors être un produit d’appel pour devenir agriculteur ?
- Oui, c’est un produit d’appel mais qui doit être bien pensé. Car c’est un métier difficile, l’élevage de chevaux n’est pas mécanisé, la pailleuse n’existe pas. Notre métier est dur car même s’il consiste en partie à monter à cheval, cela, répété plusieurs fois par jour peut être éreintant. Il y a peu de jeunes qui embrassent cette profession et quand c’est le cas, notamment pour ceux qui enseignent, ils sont nombreux à jeter l’éponge au bout de trois ans.
Quel est le profil de l’exploitation idéale pour en vivre ?
- Le mieux est de cumuler un peu d'élevage, un peu d’enseignement et de la pension. Mais il faut que l’ensemble soit géré par plusieurs personnes.
Le cheval ne constitue-t-il pas un trait d’union entre le rural et l’urbain ?
- Oui, quand je me balade avec mes élèves, la discussion naît facilement avec les passants. Et puis le cheval est, selon un sondage Sofres, le deuxième animal préféré des Français après le chien et devant le dauphin. En revanche, il existe une distance entre les éleveurs de chevaux et ceux de bovins par exemple. Et ce serait surtout aux premiers de faire des efforts car étant reconnu en tant qu’agriculteurs, ils veulent les mêmes droits mais il ne faut pas qu’ils oublient qu’ils ont aussi des devoirs.
Le chantier semble vaste pour cette filière encore non structurée, quelles sont vos missions aujourd’hui ?
- Nous souhaitons défendre les aspects réglementaires. Nous misons aussi beaucoup sur la professionnalisation et notre souhait est de donner aux OPA les outils pour mieux comprendre la filière cheval et accompagner les porteurs de projet. Ainsi que mettre en place des formations.
A lire dans Agri79 :
- le 17 juillet 2009 : Sophie Danvy, responsable du service recherche et développement des Haras nationaux, dresse le bilan de la part de la génétique dans la filière équine. Et un détour par le Haras du Géry, à Nueil-les-Aubiers, où Denis Gauffreteau pratique l’insémination artificielle.
- le 24 juillet 2009 : l’installation en équin avec Claire Duriez, laquelle dirige le centre équestre Equi feel à Secondigné-sur-Belle. Le point également avec la chambre d’agriculture des Deux-Sèvres sur l’accompagnement des porteurs de projet.
- le 31 juillet 2009 : l’équithérapie ou comment le cheval peut apporter du bien-être aux personnes souffrant de troubles divers. Des cours sont dispensés à la Maison du cheval, à Sansais. «Le cheval est un booster émotionnel», précise Yves Decavel, médiateur social.
- le 7 août 2009 : le domaine de Perré, à Saivres, est une véritable maison de retraite pour les chevaux en fin de vie ou en convalescence. Cette structure fait partie du réseau Patur’age 79 développé par le conseil général et la Filière équidés 79.