L'histoire d'une alimentation 100 % à l'herbe
Pour assurer une alimentation de ses troupeaux à l'herbe exclusivement, Nicolas Paillier, de Gourgé, sursème dans les prairies naturelles qu'il ne retourne plus. Cette conduite garantit productivité et résilience du couvert.
Associé des magasins Plaisirs Fermiers de Niort, Nicolas Paillier valorise l'ensemble de sa production sur le marché local. « Nous sommes au contact de la clientèle. Les personnes qui viennent acheter dans nos magasins sont en recherche de cohérence ». Par leur acte d'achat, ils apprécient de faire vivre les agriculteurs du territoire, croit-il, mais moins peut-être parce qu'ils sont agriculteurs que parce que leurs pratiques sont respectueuses du maillage paysager de Gâtine, favorisent le développement de la biodiversité, participent à la dynamique sociale locale. Conscient de cette attente, Nicolas, en s'appuyant sur son goût de l'expérimentation, son sens de l'observation et son esprit d'analyse, a progressivement bousculé ses références acquises.
Les premières années à Gourgé, l'éleveur renouvelait ses prairies tous les cinq ans. « Je suis sur des terres à faible potentiel. Cette pratique est contre-productive. Elle casse une dynamique. Aujourd'hui encore, après plus de cinq ans, certains couverts ont du mal à recoloniser toute la surface ».
Maillon d'un écosystème, Nicolas a appris à accompagner le fonctionnement naturel pour produire. Au retournement, il préfère désormais sursemer. Chicorée, plantain et trèfle sont mis en terre, en semi-direct, pour enrichir le couvert en place lorsque l'éleveur le juge nécessaire. Alors qu'il nourrit tous ses animaux exclusivement à l'herbe - pour être en phase avec les attentes des consommateurs qui fréquentent les étals des magasins où il valorise sa production - Nicolas mise sur la productivité de ses prairies. Une priorité que les sécheresses estivales bousculent ces dernières années. Intransigeant sur la composition de l'alimentation de ses animaux, le contexte pédoclimatique l'a conduit l'an dernier à ajuster sa conduite.
Valorisation et cohérence
Pour éviter d'être à court d'alimentation, l'éleveur a baissé le nombre de ses animaux. « Les clients continueront à venir aux magasins, si et seulement si, nous leur donnons l'occasion d'avoir confiance. Ce qui se passe dans mon exploitation doit être en phase avec l'histoire qu'ils viennent écouter dans les Plaisirs Fermiers ».
Pour stabiliser le revenu de l'exploitation, l'éleveur, en recherche permanente de cohérence, a ajouté aux troupeaux alors composés de 450 brebis, pour environ 500 agneaux valorisés à l'année, et 20 Parthenaises, pour 15 veaux sous la mère croisés Angus commercialisés, un atelier poules pondeuses plein air bio. Jamais à court d'idées, Nicolas construit pour s'ouvrir demain de nouvelles perspectives. « Nous travaillons également avec six voisins, le Civam de Gâtine, le CPIE de Coutières et Prom'haie, à la création d'un cahier des charges puis d'une marque, Animaux élevés exclusivement à l'herbe ».
Pour l'éleveur, la durabilité d'un tel système dépend de la capacité des exploitants à valoriser leurs produits. Dans le domaine, le parc naturel régional de Gâtine en construction pourrait être une belle opportunité pour ceux que ça intéresserait.
CONCOURS GÉNÉRAL AGRICOLE 2020
Les candidats appelés à défendre leurs pratiques
Au salon de l’agriculture en février dernier, Nicolas participait au concours général agricole des pratiques agro-écologiques, mention prairies et parcours. Quelques mois plus tôt, il était désigné lauréat du département, dans la catégorie pâturage exclusif, par les membres du jury local, constitué par le CPIE de Coutières et composé d’un agronome, d’un botaniste, d’un paysagiste, d’un apiculteur… « Ces dernières années, les vidéos de L214 portent le discrédit sur l’élevage. Produire de la viande, c’est mon métier. J’en vis. En montrant, par le biais du concours général agricole, le potentiel des prairies, tant en termes de biodiversité que de production agricole, j’espère convaincre ceux, choqués par les images, que ces images ne sont pas la réalité dans tous les élevages, et mes collègues éleveurs, que l’alimentation à l’herbe est durable sur un plan agronomique et écologique ».
Lauréat des Deux-Sèvres, Nicolas ne le sera finalement pas au niveau national. Néanmoins, avec Ludovic Pachot, vainqueur départemental 2017, ils sont heureux d’avoir contribué à la communication autour d’un système qu’ils jugent économiquement viable et qui valorise les modestes terres de Gâtine. Ils encouragent les éleveurs qui souhaiteraient faire connaître leurs pratiques à contacter le CPIE d’ici le 23 mai. C.P.
Contact : Anthony Benay : anthony@cpie79.fr ou au 05 49 69 01 44.