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Pluviométrie : Y-a-t-il trop d'eau dans les marais charentais ?

L'eau tombe, ruisselle, percole, fuit et cours dans les canaux et fossés.

Y-a-t-il trop d'eau dans les marais charentais ?
Y-a-t-il trop d'eau dans les marais charentais ?
© AC

À regarder les millimètres de précipitations tombés ces mois derniers, nul doute qu'ils ont une incidence sur le milieu. Force est de constater que l'eau emplit fossés, canaux et champs. Certains exploitants tardent à implanter leurs cultures faute de pouvoir entrer dans les parcelles au risque d'embourber tracteurs et semoirs, de voir patauger le cheptel. Mais il est un lieu particulier où la pluviométrie a une acuité particulière  : ce sont les marais. Que l'eau y soit présente n'est pas une nouveauté avec son corollaire: le niveau. Résurgence de vieux débats que les associations syndicales de marais, depuis plusieurs décennies, savent instaurer, installer dans la discussion au marché, en bord de champ ou en réunions agricoles. Interrogés par nos soins, alerté que nous le fûmes par Yvette Thomas sur le sort du marais de Saint Augustin empêché d'entreprendre en cette période, tous les maraîchins, exploitants agricoles ou pas, en conviennent : c'est du domaine de la concertation, du «doigt mouillé» et de la bonne entente entre les acteurs de ces milieux. Si comme François Avrard dans le Marais Poitevin on se félicite de l'utilité (peu reconnue, voire contestée) des drainages, si comme Jean-Marie Gillardeau, sur le seul marais sans bassin versant on dit avoir les moyens («modestes») d'une régulation, la question des niveaux amène souvent la polémique entre ceux qui attendent pour y parquer des animaux et ceux pour qui une zone humide se doit de le rester. Pour Jocelyn Bruneau, dans le marais de Talmont-Ars/Gironde, la chance est venue des coefficients de marées faibles qui permettent d'évacuer l'eau. «Nous dépassons les 600 mm depuis décembre ! Même les forages donnent... Mais l'eau est à fleur de terre.» Scrutant les échelles, son marais laisse les portes ouvertes pour évacuer. Certains semis sont donc retardés. Francis Renaud dans le marais de Moeze constate lui aussi un surplus d'eau  : «il nous fait éviter que les marais noient !» Décideurs sur les trois marais (Moeze, Beaugeay et St Froult), les exploitants entendent rester maîtres de ces décisions de réguler. «Nous regardons la météo pour les semaines à venir et ouvrons les écluses, même le dimanche  ! Pas question de retarder les décisions. C'est important pour nous de vider régulièrement car nous ne pouvons le faire qu'une semaine sur deux.» Tous les maraîchins connaissent la problématique du marais de Saint Augustin, où la pompe de Chalézac en panne cause souci, doublé d'une offensive des environnementalistes et des exigences du milieu ostréicole. Une situation que dénonçait Yvette Thomas à l'assemblée générale de l'Unima. Sur le Curé, un éclusier gère le niveau de ce marais géré par le Syhna. Sur le marais Nord de Rochefort, c'est l'Unima. Jean-Marie Gillardeau, sur le marais de St Agnant, met en avant le «bon sens» qu'il faudra «contractualiser.» Avec humour, il souligne que le seul critère était «se faire engueuler ou pas !» Sur «ses» 500 propriétaires, il estime avoir 10 réclamations par an. «Les marais ne sont pas homogènes  : enlever l'eau dans les points bas assèche parfois les points hauts.» Une modélisation est en cours : «Cela permettra de ne pas imposer un niveau à tout le monde qui ne satisfait personne.» Quant aux investissements, les AS n'ont pas souvent les moyens de leur ambition dans la régulation.

Ça dépend des marais...


Selon Christophe Chastaing, pas question pour l'heure d'une gestion «coordonnée» du niveau de l'eau dans le marais, «seul ressort de chaque association syndicale.» Le directeur de l'Unima poursuit : «chaque association syndicat a des ressources propres de manoeuvre. La hauteur n'est pas unique. Dans la plupart des cas il y a des accords de gestion des niveaux d'eau entre les associations syndicales et l'Etat (Dreal) pour la moitié de la centaine gérées ainsi par une association syndicale. D'autres marais ont des accords locaux de condition de rejet de l'eau, comme à Arvert-Saint Augustin.» Le niveau est bel et bien fixé par l'AS. Les indicateurs sont là pour aider à la décision  : échelles, casiers, canaux. «Il peut arriver des situations où les bassins versants donnent trop...» poursuit-il, «nous insistons auprès des AS de se doter d'indicateurs fiables.» Tout dépend des «enjeux» que l'on assigne à la hauteur de l'eau. «Les niveaux ne sont pas hauts partout. Mais dans la plupart des situations ils sont maîtrisés.» L'Unima est là pour les AS pour les «conseiller» dans leur indépendance de gestion. Quant au rôle d'éponge du marais, Christophe Chastaing explicite les «enjeux» où la vie agricole doit perdurer : «il faut mettre en compatibilité, dans une gestion concertée, l'activité agricole avec l'ensemble des autres enjeux, aval notamment, et inversement.» Le rejet de l'eau ne s'arrête pas en avril...
De son côté, Jean-Marie Gillardeau, président du marais de St Agnant, fin connaisseur de l'historique des AS, ajoute  : «Le niveau de l'eau est une question de toujours... deux siècles. C'est là base de la création des AS avec les aménagements.» Le niveau «optimum» est du ressort de l'AS  : «pas ou peu d'échelles pour mesurer. Mais cela change et devrait déboucher dans le cadre du contrat territorial sur un règlement d'eau (normes préalablement définies) pour que tout le monde puisse avoir sa part, exploitants, chasseurs, promeneurs pêcheurs.» Cette subjectivité est «source de discussion», «même entre exploitants», d'autant que l'eau des marais sert à irriguer des terres hautes et que les huîtres n'aiment pas les écarts de salinité. Les besoins de chaque marais va à l'encontre de l'idée d'une gestion départementale. Il milite pour que tous les acteurs se mettent autour de la table afin que «chacun mette son grain de sel et trouve un dénominateur commun.»

 

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