Éleveur laitier en bio, il mise sur l'agrivoltaïsme
Pour sécuriser son exploitation laitière, Mathieu Renaud se lance dans un projet d'installation agrivoltaïque avec des panneaux qui produiront de l'électricité et protégeront les animaux durant les fortes chaleurs.

À Baignes-Sainte-Radegonde, Mathieu Renaud fait pousser un projet d'agrivoltaïsme sur son exploitation laitière bio, avec un double objectif : améliorer la rentabilité économique de sa ferme sans en dénaturer les terres. Porté par l'entreprise Sam Solar, un opérateur spécialisé, il développe un projet photovoltaïque sur 25 hectares de prairies qui seront toujours pâturées. Son exploitation laitière compte "80 animaux sur une surface de 67 hectares, dont 47 pâturables et une vingtaine en prairie pour l'alimentation".
Adapté aux vaches
Côté technique, le cœur du projet repose sur l'installation de trackers bifaciaux, des panneaux solaires montés sur pieux et orientables, capables de suivre la trajectoire du soleil pour maximiser la production. Installés à une hauteur de 5 mètres, ces équipements laissent un dégagement de 2,20 mètres minimum, garantissant le passage sécurisé du bétail, y compris en cas de comportements imprévisibles liés à la reproduction. "Le but est d'éviter qu'un animal ne se blesse, en se redressant sous les panneaux et de leur permettre d'avoir de l'ombre l'été", précise l'éleveur.
L'installation prévoit une couverture partielle, soit environ 34 % de la surface clôturée afin de préserver la photosynthèse de l'herbe et éviter les effets d'ombrage excessifs."Une parcelle témoin sera maintenue sans équipement pour comparer les rendements. En cas de perte supérieure à 10 %, les installations devront être partiellement ou totalement démontées", précise l'éleveur.
Attention à l'empreinte écologique
Contrairement à l'éolien, il n'y a pas de fondation en béton : l'ensemble du système est démontable, grâce à des pieux métalliques directement ancrés dans le sol, assurant ainsi une réversibilité du projet à l'échelle du bail de 30 ans, renouvelable deux fois dix ans. Le financement du démantèlement est provisionné dès l'obtention du permis de construire. Conformément à la réglementation encadrant les projets agrivoltaïques, le projet s'engage à préserver la vocation des parcelles. Ce qui peut être à double tranchant. "Ça ne me gêne pas, l'installation se fait sur des parcelles qui sont exclusivement pâturées. C'est ce que j'ai envie de faire. Mais demain, si je décide de faire des céréales sur des parcelles, ça va être compliqué."
Les 25 hectares concernés seront clôturés avec des dispositifs de sécurité (caméras, portails verrouillés) pour limiter les intrusions et protéger les infrastructures. Toutefois, des passages sont prévus pour la petite faune, tandis que les clôtures empêcheront l'entrée de la grande faune sauvage (sangliers, chevreuils), réduisant ainsi le risque sanitaire (tuberculose notamment). Le projet intègre aussi une plantation massive de haies (plusieurs kilomètres), servant à la fois de compensation écologique et d'outil d'intégration paysagère, bien que leur efficacité visuelle ne soit attendue qu'à moyen terme. "Pour ce type de projet, une enquête publique n'est pas requise. En revanche, des réunions publiques obligatoires sont bien prévues, et plusieurs ont même été ajoutées au-delà de ce qui est imposé. Le projet a été présenté aux élus de la commune, aux vice-présidents de la communauté de communes, ainsi qu'à la Chambre d'agriculture, qui a également réalisé une étude économique."
Sécuriser le revenu
Le revenu va permettre à l'éleveur de sécuriser l'avenir de l'exploitation. "Est-ce que les terres agricoles ont vocation à produire de l'énergie ? Le problème, c'est que si ce n'est pas du panneau solaire, demain, ce sera de la méthanisation ou autre chose. Le problème des terres agricoles, c'est qu'aujourd'hui elles doivent tout faire : des matériaux de construction, de l'énergie pour du biogaz ou de l'électricité... Et il faut qu'elles nourrissent les gens. En tant qu'agriculteur, si on ne compte que sur la partie alimentation, ce n'est pas viable !", note Mathieu Renaud. Le choix de cette source d'énergie est la plus en accord avec sa production. "Avec la méthanisation, toute l'herbe serait partie dans le méthaniseur. Là, ce sont des terres qui sont uniquement pâturées."
Il reconnaît y aller un peu à contrecœur. Mais "l'argent de l'agrivoltaïsme va me permettre de rénover des bâtiments et de refaire les toitures. Aujourd'hui, sans source de revenu complémentaire, ce serait impossible."